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Les Chemins de Fer en Haute-Savoie

Publié le 26 avril 2013 par Pierrehk

André Duval, ancien président de la CCG est opposé au tram de St Julien: il préconise plutôt une liaison ferroviaire entre la ligne SNCF actuelle entre St Julien et Annemasse et la gare de la Praille. Voici ci-dessous une étude sur les chemins de Fer de Haute-Savoie qui ne manque pas d'interet et qui peut enrichir le débat. 

Quelques réflexions autour du chemin de fer en Haute-Savoie

 

 Un peu d’histoire :

Les voies ferrées se sont fortement développées en Haute Savoie entre 1850 et 1905 : Culoz vers Geneve (1858) vers Thonon (1880), Aix-les-Bains vers Annecy (1866), vers La Roche (1883), vers Cluses (1890), vers le Fayet (1898) pour les voies normales et d’Annemasse à Samoëns (1892), Annecy à Albertville (1901), Annecy-Thônes (1898), Le Fayet Chamonix (1901) pour les voies métriques.

Après un arrêt jusqu’après la guerre de 1914,  de nombreux projets ont été envisagés dans les années 1920 : Seyssel-Annecy par Frangy, Saint-Julien –Annecy, Fillinges-Boëge et Habère-Poche, Thonon-Abondance et le Biot. Certains de ces projets ont eu des premières réalisations mais aucun n’a été au bout pour manque de finances et pour concurrence avec l’automobile.

Fernand David  va cependant à Paris chercher des crédits pour financer ces infrastructures qui exigeraient plus de 20 000 000 de francs de capitaux et n’obtient qu’un petit million.

Finalement les lignes à voies métriques soit ne sont pas réalisées soit sont abandonnées, la dernière celle de Samoëns en 1959. Il ne reste que la ligne  du Fayet à Chamonix, puis vers Martigny en Suisse.

Un exemple  en Suisse : le Canton des Grisons

Ce canton a connu le même développement des chemins de fer légèrement plus tardivement entre 1880 et 1913 mais uniquement à voies étroites ou métriques. Comme en beaucoup d’endroits en Suisse ce réseau s’est maintenu jusqu’à nos jours et irrigue l’ensemble du territoire avec 360 kilomètres de voies ferrées. Un dernier tunnel de 19km a été creusé et mis en fonctionnement en 1999. Il vient d’être reconnu au patrimoine mondial par l’Unesco. Les raisons de cette réussite : une présence touristique importante en hiver et en été, une homogénéité du réseau, un pays très montagneux, et une réglementation moins technocratique laissant plus de place à l’initiative individuelle. Il faut ajouter à ces raisons aussi une productivité qui n’a rien à envier aux grandes compagnies ferroviaires européennes.

Quelques statistiques 2011: L’entreprise a transporté  10 654 000 voyageurs ou 300 000 000 voyageurs*km, 813 000 tonnes de marchandises, 436 000 voitures pour un chiffre d’affaire de 320 000 000 CHF, les touristes comptent pour 60% des voyageurs mais 80% des recettes correspondantes. L’ensemble des recettes de la clientèle couvre 60% des charges de fonctionnement et 30% de celles d’investissement ce qui est remarquable pour un système de transport collectif.

 En France

Revenons d’abord à la Haute-Savoie qui a vu ses lignes à voies étroites abandonnées ou non réalisées. On peut dire que la seule ligne restante celle qui relie le Fayet à Chamonix et au Valais le doit à sa relation avec la Suisse. Elle connaît actuellement un regain d’intérêt avec aux heures de pointe une fréquence de passage de l’ordre de 20 minutes. Par ailleurs pour le réseau à voies normales les lignes ne sont qu’à voie simple et donc de capacité limitée. Peu de travaux ont été réalisés depuis l’électrification. Pour des raisons bien obscures des aménagements comme le shunt d’Etrembières  sont toujours en question sans début de réalisation. Peut-être que la décision du doublement de la voie Aix-les Bains Annecy a été prise.

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En jaune, le tracé du shunt d'Etrembieres qui permet un acces direct à la vallée de l'Arve

Une étude menée sous l’égide du ministère de l’environnement décrit une situation assez catastrophique des chemins de fer français.  Tous les investissements ont été consacrés depuis 20 ans au seul TGV, les lignes normales n’ont pas été entretenues et beaucoup en mauvais état obligent à des ralentissements anormaux.

Les TER en  charge des Régions ont une rentabilité très faible, seules 25% des charges sont couvertes par les recettes clients. Tout compté les recettes globales de la SNCF couvrent 50% des charges. La coordination entre TGV, TET, Trains intercités, TER est loin d’être optimale. Selon cette étude il faudrait décider d’un moratoire sur les nouvelles lignes TGV dont les rentabilités sont moindres que les premières réalisées, celles-ci  couvrant, il est vrai, la totalité de leurs charges de fonctionnement.

La productivité de la SNCF a pris un  certain retard par rapport aux chemins de fer allemands qui se sont ouverts plus largement à la concurrence. Ceux-ci ont aussi bénéficié d’une politique plus volontariste d’effacement de leurs dettes, alors qu’en  France on n’a utilisé qu’une manière déguisée de soustraire les dettes à l’exploitant en séparant SNCF et RFF.

La même étude constate que le chemin de fer est adapté à deux types de besoins : celui des liaisons entre grands centres de population, et celui des services de banlieues pour les pendulaires. En dehors de ces utilisations, l’automobile ou l’autobus du coté du transport de personnes ou le camion coté transport de marchandises par leur souplesse sont mieux adaptés, oubliant ici les problèmes environnementaux*. On le verra dans le chapitre suivant le moyen de transport efficace pour l’intérieur des zones denses semble être le tramway.

* Pour un voyage aller-retour à Lyon Perrache depuis Saint-Julien-en-Genevois un bus rempli à 60% a coûté 17,5 € par personne, le billet de train aurait coûté 55 €,  de plus l’horaire du bus était à la demande. Notons toutefois que nous n’avons pas évalué ce qu’aurait coûté le billet de groupe auprès de la SNCF.

Transport et Genève

Il est intéressant d’analyser maintenant le système de transport dans l’agglomération genevoise, il concerne de manière assez notable l’ensemble du département. Les mouvements pendulaires sont, du fait d’une séparation de plus en plus nette entre les emplois qui sont à Genève et les habitants en France, très lourds.

D’abord le train est utilisé pour deux directions, celle de Lausanne avec des fréquences de moins d’un quart d’heure aux heures de pointe et celle de Bellegarde avec une moindre fréquence de l’ordre de la demi-heure. Pour des distances respectives de 60km et 35 km les temps de parcours sont de 48 et 34mn ce qui est très satisfaisant.

Ensuite à l’intérieur de l’agglomération, ce sont les trams qui ont la meilleure rentabilité si on oublie les coûts d’infrastructure, la couverture des charges de fonctionnement par les recettes de transport est de l’ordre de 50%. Les vitesses commerciales sont en moyenne de 15kmh avec une ligne à 19kmh. Les trolleybus ont des résultats du même ordre 47% de taux de couverture, vitesses commerciales équivalentes entre 13 et 16kmh50. Enfin le troisième moyen, l’autobus, a des caractéristiques beaucoup plus dispersées. Les voies réservées en particulier devant les feux de circulation leur permettent des vitesses allant jusqu’à 25kmh, mais les taux de couverture des charges varient de 7% pour les lignes dites petites à 54% pour une grande ligne.

Quelques premières conclusions

Les statistiques de l’INSEE donnent une bonne référence pour discuter de la place de chacun des moyens de transport sur le département et vers Genève en particulier. Ce qu’elles disent : en moyenne les Français habitent à 26-30km du lieu de travail et leurs trajets sont de l’ordre de 35minutes. Ainsi les frontaliers qui habitent à l’intérieur de ces 30km ne devraient pas mettre plus de temps pour aller travailler.

On a vu que le train offrait une solution admissible selon ce critère aux habitants de Bellegarde. Le tramway ne peut pas être pris en considération vu sa vitesse de service pour ces frontaliers, sinon partiellement en fin de trajet. La même conclusion peut être tirée en ce qui concerne le trolleybus. La voiture individuelle, si la route n’est pas encombrée par les pendulaires, et l’autobus s’il peut éviter les goulots d’étranglement grâce aux voies réservées, seraient sous ces conditions des solutions intéressantes. Mais la réservation sur longue distance en zone rurale est difficilement concevable. Donc dans beaucoup de cas le train reste la seule solution. C’est pourquoi pour l’entrée sud de Genève le barreau sud(liaison entre la voie Saint-Julien-Bossey et la gare de La Praille) est indispensable, le CEVA pouvant apporter la solution pour l’est de la Savoie du nord. Le tram de Saint-Julien  pour le territoire au delà de Saint-Julien  n’a que très peu d’intérêt, ne pouvant être qu’une partie du trajet parmi un minimum de trois et donc de durée supérieure à l’heure, la solution BHNS (bus à haut niveau de service) aurait été une solution  suffisante et plus sage, vu son intérêt limité,permettant au barreau sud de gagner plusieurs années.

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Un tracé ferroviaire(en rouge) proposé pour relier la ligne SNCF du Salève à la gare de la Praille

On pourrait rêver que les projets envisagés dans les années 1920 soient tous réalisés et que la Haute-Savoie bénéficie d’un réseau complet de trains du type de celui des Grisons.  Il apporterait des solutions à beaucoup de problèmes pour les pendulaires vers Annecy et Genève, pour les accès aux stations de ski ….Son coût réduit, infrastructure et matériels roulants, par rapport à un réseau à voies  normales est un grand avantage.

André Duval
mars 2013

Je me suis permis, pour une meilleure compréhension et visualisation de ce que propose Andé Duval d'inclure 2 cartes qui illustrent ce qu'il en est du shunt d'etrembières, qui permet d'éviter l'arret en gare d'Annemasse pour aller vers la vallée de l'Arve, et aussi d'un tracé possible(approximatif) reliant la ligne SNCF St Julien-Annemasse à la gare de la Praille (avec connexion au CEVA).

Si la proposition d'André offre une bonne réponse aux problèmes de transport du territoire sud de Genève, elle me parait être entachée de 2 faiblesses.

Au jour d'aujourd'hui, le projet de tram vers St Julien semble être acté par Genève et la Confédération qui est prête à en prendre 40% à sa charge. Proposer cette nouvelle option risquerait à mon sens de menacer la probabilité de voir le tram se réaliser sans aucune garantie que ce projet ne soit approuvé, car on sait à quel point les genevois n'aiment pas voir leur campagne dénaturée.

D'autre part, s'il n'existait pas une voie directe Bellegarde - Genève, une telle proposition prendrait tout son sens, mais du fait qu'elle existe, je ne pense pas que les Genevois soient favorables, pour les mêmes raisons environnementales, à un nouveau tracé dans la campagne qui ne serait utile qu'aux frontaliers français.

Ce qui ne veut pas dire qu'une telle solution ne s'impose pas à la fin du XXIème Siècle, car évidemment elle a du sens. Selon la bonne règle du "un tiens vaut mieux que deux tu l'auras", je considère que notre intéret à court terme est de soutenir le projet du tram. Quiand nous l'aurons, on pourra voir......


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