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La politique économique au Japon

Publié le 07 mai 2013 par Raphael57

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Tout commence par le retour dans le cockpit japonais de Shinzo Abe :

Depuis le second semestre 2012, le Japon traverse une récession économique (que la tragédie de Fukushima a amplifiée) qui se conjugue avec une déflation quasi permanente depuis 1997.

Évolution de la croissance au Japon

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[ Source : http://www.tradingeconomics.com ]

C'est pourquoi, à rebours des politiques d'austérité menée en Europe, Shinzo Abe a mis en place un programme de relance économique de plus de 170 milliards d'euros. Celui-ci est basé sur le financement de grands travaux, une politique monétaire expansionniste et des aides aux entreprises. Examinons plus en détail cette politique monétaire.

Tout d'abord, il est prévu un doublement de la base monétaire d’ici la fin de 2014, ce qui signifie que la Banque du Japon va augmenter ses achats d'obligations d'État et même acquérir des actifs plus risqués (ETF, fonds communs immobiliers,...). Le but recherché est de faire baisser les taux d'intérêt sur les obligations à long terme et de relancer l'investissement. De manière moins avouable il s'agit aussi probablement de déprécier le yen afin de gagner en compétitivité-prix.

L'objectif d'inflation est quant à lui passé à 2 %, non sans heurts... En effet, nous avons dit plus haut que le pays est confronté à une déflation, comme on peut le voir sur le graphique ci-dessous qui montre que l'inflation est en moyenne négative depuis 1995. L'expansion de la base monétaire, pourtant prononcée depuis 1997, n'a pas réussi à inverser en raison de la baisse des salaires et de la poursuite du désendettement du secteur privé.

Évolution du taux d'inflation au Japon

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[ Source : http://www.tradingeconomics.com ]

La réussite de cette politique monétaire dépendra entre autres de l'évolution des salaires nominaux et de l'anticipation d'inflation que formeront les investisseurs :

 * si les salaires nominaux n'augmentent pas, alors cette hausse de l’inflation réduira le pouvoir d'achat, entraînant l'économie dans une récession encore plus profonde.

* si l'anticipation d'inflation augmente, alors les taux d'intérêt nominaux augmenteront également, ce qui revient à dire que les taux d’intérêt réels ne baisseront pas et donc qu'il n'y aura pas eu de soutien au désendettement. Pire, une hausse des taux d’intérêt nominaux provoquerait une panique sur le marché obligataire et coûterait très cher à l'État, dont le taux d'endettement public a atteint 220 % du PIB en 2012 !

Pour l'instant il semble que cette politique de relance ait redonné le moral aux consommateurs, qui se mettent à dépenser davantage. Il n'y a de toute façon pas de sortie de crise possible si les agents économiques n'anticipent pas une hausse de leurs revenus futurs : quels ménages augmenteraient leur consommation, quelles entreprises augmenteraient leurs investissements, s'ils n'espèrent aucune hausse de leurs revenus à venir ?

Pour finir, n'oublions pas que le Japon n'est pas le seul pays à mener une politique monétaire très souple pour soutenir l'activité. Certes la croissance de la base monétaire fut très forte au sein de la zone euro depuis 2008 :

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[ Source : Natixis ]

Mais aux États-Unis la Fed va beaucoup plus loin, puisqu'elle achète également des titres risqués le tout pour 85 milliards de dollars par mois !

En définitive, le Japon démontre que pour faire face à une crise, un État doit se servir de toutes les armes de la politique économique : changements structurels conjugués à une politique budgétaire et une politique monétaire expansionnistes pour soutenir l'activité (et la demande). Remarquons également que cette relance a lieu alors même que le taux d'endettement public est stratosphérique et que Shinzo Abe est réputé être... conservateur !

Malheureusement, les États membres de la zone euro ne semblent pas prêts à coordonner leur politique économique autrement que sur la base du moins-disant social et de l'austérité... et ce ne sont pas les changements cosmétiques, annoncés il y a quelques jours par la Commission européenne, qui changent l'orientation néolibérale de la politique économique européenne, n'en déplaise à notre ministre de l'économie !


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