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Dossier : Pourquoi la saison 4 de «Community» est mauvaise ?

Publié le 10 mai 2013 par Masemainecinema @WilliamCinephil

Le 17 septembre 2009 arrivait sur NBC une nouvelle série crée par Dan Harmon : « Community ». Connaissant un succès public et critique, la série fût renouvelée pour une deuxième saison, puis pour une troisième. Le 7 février 2013, la saison quatre de « Community » arriva sur NBC, mais ne parvient pas à renouer avec le succès qu’étaient les précédentes saisons … Pourquoi ? Pour répondre à cela, il faut d’abord revenir sur les trois premières saisons et comprendre pourquoi la série était une réussite.

Tout commence avec Jeff, ancien avocat obligé de repasser son diplôme, et qui aimerait bien faire plus ample connaissance avec Britta, du cours d’espagnol. L’ancien avocat monte alors un faux groupe de soutien d’espagnol afin de se retrouver seul avec la jeune fille, mais c’était sans compter Abed qui va se joindre au groupe tout en invitant d’autres personnes. Ce « faux groupe » de soutien va alors devenir vrai. Là, à la manière de « The Breakfast club » qui est plus d’une fois référencé dans la série, des personnes qui n’ont rien en commun vont se familiariser aux autres et former, petit à petit, une « famille ». La série ne se cache à aucun moment de cette influence puisqu’en plus des phrases d’Abed à propos du film, ils vont jusqu’à reproduire certaines scènes, notamment celle de la danse dans l’épisode seize de la saison une.

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« The Breakfast Clubd » de John Hughes, 1985

Mais « Community », c’est avant tout l’histoire de personnes ayant des problèmes. Chaque personnage possède sa névrose. Jeff est égoïste et a un problème avec son père. Britta rate tout ce qu’elle entreprend et est une éternelle révoltée. Troy était la star de son lycée mais il a perdu sa bourse sportive à cause d’une blessure et se retrouve à Greendale. Annie est une élève modèle mais sort d’une dépendance à la drogue. Shirley est une mère devenue célibataire après que son mari l’ait trompé. Pierce est un vieux misogyne, sexiste et raciste. Quant à Abed est bien … c’est Abed. Il a une grande culture cinéphile et sériephile et ne peux s’empêcher de faire des références ici et là, et de voir sa vie comme une sitcom. Ce sont ces complexes et autres problèmes qui vont créer des conflits au sein de ce groupe, pour mieux se réconcilier en suite. D’ailleurs, dans la plupart des épisodes et surtout dans la saison une, Jeff se fout complètement du groupe et ce n’est qu’à la fin de chaque épisode qu’il les aide et règle tout avec un de ses fameux discours inspirés.

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Dis comme cela, « Community » ressemble à n’importe quelles sitcoms de ces dix dernières années. Mais les grosses particularités de cette série sont ses références, son absurdité, et son côté méta.

Impossible de ne pas voir certaines références que ce soit à Star Wars, Indiana Jones, Die Hard, Batman, ou des petits pics à l’encontre de certaines stars du show-business. Je crois que c’est cela qui est assez jouissif avec « Community », c’est de chercher ces références et de les comprendre. Bien sûr certaines nous passent sous les yeux sans qu’on les remarque (soit on n’a pas vu le film en question, soit notre regard était attiré par une autre référence ou simplement parce qu’on était pris par un fou rire à cause de la blague précédente). Tout le monde n’a pas la culture d’Abed et on ne peut pas tout comprendre. Mais la série reste accessible avec des références à 80% grand public.

L’absurdité est aussi un élément plus qu’important au sein de la série pour qu’elle fonctionne. Quand j’emploie le terme « absurdité », il faut l’entendre au sens le plus noble et le plus large. Cela peut aller de la découverte d’un trampoline magique, à un concours de paint-ball ou à la construction d’un fort de couvertures dans cette université qu’est Greendale. Lorsque cette absurdité est ajoutée aux références de la culture pop, cela nous donne les meilleurs épisodes de « Community ». Les concours de paint-ball prennent un air de western spaghetti  de Sergio Leone pour finir en space-opéra Star Wars, un épisode d’Halloween se transforme en véritable film de zombie, et un héritage destiné à Pierce devient une partie de jeux-vidéo rétro.

« Community » livre aussi des épisodes qui suivent un principe, un contexte ou reprennent un film de A à Z. Par exemple, c’est le cas de cet épisode où Abed se retrouve à la friteuse de la cantine pour que ses amis puissent avoir des ailes de poulet au repas. L’épisode prend alors une tournure à la mode « Les affranchis » de Martin Scorsese. La série va aussi, plus d’une fois, aller du côté du documentaire réalisé par Abed à chaque fois (la fausse mort de Pierce ou la publicité pour Greendale réalisé par le Dean), et du reportage du genre de History Channel (la bataille du fort de couvertures contre celui d’oreillers).

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Le tout saupoudré d’un peu de méta. Pour ceux qui l’ignore « méta » signifie que l’objet en question est conscient d’en être un, et s’interroge sur sa nature. Lorsque l’on dit qu’une série est méta, c’est qu’elle est consciente d’en être une. À plusieurs reprises, Abed va insinuer d’être conscient de faire parti d’une série. Dans le huitième épisode de la saison 2, les personnages vivent un épisode huis-clos, ce qui a le don de faire râler Abed car il n’aime pas ces épisodes. Cela permet aussi de parler d’autres séries, Abed (encore et toujours) fait remarquer que « Law & Order » on piqué le principe d’un avocat devant repasser son diplôme dans un de leurs arcs narratifs.

Pour moi, l’épisode, qui illustre au mieux ce qu’est la série, est le onzième de la saison deux. C’est l’épisode de Noël entièrement réalisé en stop-motion où les personnages sont en silicones avec armatures.

À la suite d’un choc, Abed ne voit ce qui l’entoure qu’en pâtes à modeler. Ses amis, aidés du professeur Duncan, vont amener Abed dans une séance de thérapie, tandis que lui veut trouver le sens de Noël. En plus d’être référencé (« Charlie et la chocolaterie ») et d’être très drôle, cet épisode intitulé « Abed’s Uncontrollable Chrismas » est aussi très beau. L’animation en pâte à modeler et stop-motion est magnifique. Rare sont les séries qui osent faire un épisode entier comme cela. Mais en plus d’être d’une beauté visuelle, « Abed’s Uncontrollable Chrismas » est beau sur le plan émotionnel. Lorsque que Duncan balance à Abed la triste vérité sur son choc émotionnel qui l’a poussé à imaginer son monde ainsi, il « casse » Abed. C’est là que ses amis, d’abord tous partis un par un, reviennent afin de ramener Abed qui est littéralement congelé dans de la glace. Ses amis décident de croire à la réalité d’Abed, et dégage Duncan à coup de ptérodactyle de Noël (j’adore ce gag). Le groupe de soutien n’a jamais autant ressemblé à une famille, prenant soin les uns des autres et passant Noël ensemble devant un film.

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Voilà à quoi ressemble « Community » durant ses trois premières saisons. Une série innovante prenant de vrais risques, composée de références excellentes et d’un humour bien à elle. Le côté méta apportant un charme et une originalité à cet ensemble.

Vous allez me dire : « Mais comment une série peut être aussi extraordinaire et devenir en l’espace d’une saison aussi mauvaise ? ». Je vais essayer de répondre à cette question.

L’un des gros points faibles de cette saison quatre, c’est la non-présence de Dan Harmon à la tête de sa série. Le showrunner a été viré et écarté de sa propre série, sans véritable raisons. NBC aurait remplacé Dan Harmon pour élargir le public de « Community ». Il est vrai que l’humour de Dan Harmon n’est pas forcément accessible à tout le monde si on n’a pas les clés pour comprendre, mais au moins les références étaient de qualité. C’est comme cela que l’on se retrouve, avec le premier épisode de la saison 4, avec un épisode en mode « Hunger Games ». Alors oui, la référence est comprise de tout le monde mais … la qualité n’est pas forcément là.

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Ma tête destinée à NBC pour avoir viré Dan Harmon

Autre problème : le désistement de Chevy Chase de la série, qui se retrouve absent à plusieurs reprises de la saison quatre ou alors n’est que partiellement là. On peut dire ce que l’on veut, le personnage de Pierce a beau être détesté des autres personnages, il n’en n’est pas moins adulé des fans. Véritable vieux connard, Pierce Hawthorne est un personnage phare de la série, qui jusqu’à lors n’est pas passé inaperçu et qui a à plusieurs reprises servi de « méchant ». Bref, Pierce Hawthorne m’a manqué.

Même avec ces problèmes « techniques », cette saison aurait pu être un minimum bonne mais au lieu d’innover (ce que la série faisait avec ces trois premières saisons) ils nous resservent ce que l’on a déjà vu.

Un épisode en marionnettes style « Muppet Show » était une bonne idée ! Nous ressortir le coup de la thérapie à cause d’un événement marquant l’est moins. J’ai eu l’impression de revoir « Abed’s Uncontrollable Chrismas » … L’épisode n’est pas mauvais en soit, c’est juste que cette désagréable sensation de déjà-vu est présente toute la saison quatre et enlève la jouissance qu’était la découverte d’un nouvel épisode.

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Les trois premières saisons avaient aussi amenés petit à petit des choses qui étaient resté en suspens et que l’on découvrira avec cette quatrième saison.

Je pense notamment au père de Jeff, que l’on découvre enfin cette année. Quelle déception … Pour la découverte de ce père, je m’attendais à un épisode digne des meilleures de la série (ce n’est pas comme si on nous parlait de ce père depuis la première saison …) et j’ai eu le droit à l’un des pires. Cette saison quatre a cru qu’en invitant des guests dans la série, cela la rendrait meilleur. On retrouve donc James Brolin en papa Winger, mais l’alchimie entre les deux acteurs ne marche pas et l’épisode est clairement mal foutu ! Pendant que Jeff et Britta sont chez le père de ce dernier, les autres fêtent Thanksgiving chez Shirley. Des deux histoires, je ne sais pas laquelle est la plus ennuyeuse …

Je ne parle pas de la relation entre Troy et Britta qui est juste RI-DI-CU-LE ! D’ailleurs, elle se terminera comme elle a commencé : sans réel raison et c’est pas plus mal car on s’en foutait depuis le début. On sent que les acteurs sont un peu perdu et ne sont pas dirigés comme dans les précédentes saisons, et arrivent parfois à jouer très mal … Les personnages sont eux aussi mal exploités, les nouveaux gérants de la série n’ayant pas compris leurs enjeux. Si le personnage de Kim Jeong, Chang, est mal exploité cette saison, l’acteur s’amuse comme un fou avec le personnage ! Au final, ce n’est que Jim Rash, qui joue le directeur de Greendale, qui s’en sort avec les honneurs. On voit qu’il fait tout pour être au top, et l’effort est beau.

Community - Season 4

Après un épisode assez sympa sur les origines du groupe de soutien (saison quatre, épisode douze : « Heroics Origins »), le season final est arrivé ramenant avec lui l’arc narratif de la ligne temporelle la plus sombre. Cette ligne temporelle avait été crée lors d’un excellent épisode de la saison trois (épisode trois, « Remedial Chaos Theory ») et les versions diaboliques des personnages programmaient de venir dans la « bonne » ligne temporelle y mettre leurs grains de sels. J’attendais beaucoup de ce season final, et même si il s’avère très bon par rapport au reste des épisodes de cette saison, je ne peux m’empêcher d’être déçu. Cet épisode n’a pas eu le traitement qu’il aurait mérité ! Un double-épisode aurait été PARFAIT et n’aurait pas eu ce goût de bâclé qui reste en travers la gorge après le visionnage de ce season final.

C’est ce sentiment qui définie le mieux cette saison quatre : bâclé. Avec treize épisodes, la série aurait dû se concentrer que sur un ou deux arcs narratifs mais au contraire de cela, elle en a collectionné et les a bâclé un à un. Celui de Changnesia avec Chang ne sert pas à grand-chose, son dénouement étant envoyé dans la scène post-épisode de « Heroics Origins ». Mais en plus de cela, il ouvre un autre arc avec le directeur Spreck de City College dévoilant une arme pour détruire Greendale, qui ne sera pas réglé dans cette saison.

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Au final, je suis content que cette saison quatre n’ait duré que le temps de treize épisodes, le calvaire n’en était que raccourci. NBC a annoncé qu’une saison cinq verrait le jour l’année prochaine, j’espère qu’elle sera meilleure car la série mérite une saison de qualité. Un conseil pour la chaîne : laissez Jim Rash écrire les scénarios des épisodes !

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#sixseasonsandamovie



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