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Dans le scriptorium; Paul Auster

Par Sylvielectures
Dans le scriptorium; Paul AusterJe suis un Ovni... J'ai lu "Dans le scriptorium", de Paul Auster, sans connaître aucun de ses autres livres...
Et alors ? que m'est-il arrivé ?
Ai je laissé tomber ce livre énigmatique et dérangeant ?
Me suis je sentie exclue du club des fans seuls à même de goûter toute la substantifique moelle de ce roman ?
Et bien non! aussi bizarre que cela puisse paraître à maints lecteurs assidus de Paul Auster (que j'ai découverts avec grand plaisir avant de rédiger ce post, soit dit en passant), je n'ai pas abandonné !
Au contraire, j'ai été intriguée et émue par ce Monsieur Blank, vivant une expérience extrême, et ne s'en sortant pas.
Il est confronté à la vieillesse, à l'amnésie, à la maladie, à l'enfermement, et il s'accroche comme un beau diable à la quête de sens pour sa vie.
Il se hisse à sa triste réalité, réduite au strict minimum, et prend conscience qu'il n'a peut-être même plus la force de l'explorer dans son entier.
Y-a-t-il une porte, un placard ? Il se rend compte qu'il ne l'a peut-être pas encore remarqué...
Une seule chose semble maintenir son désir d'exister : le bureau, sur lequel est posé un manuscrit qui lui fait peur mais auquel il arrive à se confronter courageusement, et des photos, sur lesquelles il tente de reconstituer l'histoire qu'a du être sa vie.
Dans le scriptorium, il voit des mots écrits sur des bandelettes et qui disent ce que sont les choses qui l'entourent. Sans ces "pense-bêtes", serait-il encore capable de les appréhender ces objets qui sont sa réalité ?
Où est-il, Que fait-il ? Qui a-t-il pu bien être ?
Nous le suivons dans cette quête désespérée qui le maintien en vie mais nous comprenons bien qu'il ne peut pas arriver au bout. Il est soumis à un étrange protocole de soins qui le laisse hagard à cause des médicaments administrés.
D'ailleurs, est-ce un soin ou une punition ? et si c'est une torture, de quoi l'accuse-t-on ? et que veulent ils savoir ?
Nous comprenons bien que les personnages qui viennent soit le réconforter, soit le questionner sont des héros de romans. Ils ont pris chair alors que celui qui leur a donné vie est en train de disparaître.
Son existence se réduit à être l'objet d'un texte écrit consignant le plus méticuleusement possible ses moindres gestes, bruits, paroles et réactions. Ce "rapport" est rédigé à partir d'une monstrueuse installation qui le filme et l'enregistre en permanence dans sa cellule blanche...
Cette construction en abîme m'a intriguée.
J'ai été touchée par ce questionnement qui nous donne à tous le vertige : qui nous encre dans la réalité ? le mot ou la chose ? le signifiant ou le signifié ? l'évènement ou le récit ?
L'écrivain est-il celui qui crée le vide entre les deux au risque de s'y perdre ?
Mais je m'égare sans doute un peu là... Il y a beaucoup de choses dans ce roman qui m'ont complètement échappées, et donc je vous renvoie aux excellents billets des uns et des autres, que je cite en bas de page.
Mention spéciale à Flo et à Florinette, sur leur Austerblog,
et coup de chapeau à l'entretien avec l'auteur du magazine "Lire", que j'ai lu avec grand intérêt :
.. "Peu importe si le lecteur ne connaît pas tous mes personnages, s'il n'a pas lu tous mes précédents ouvrages, cela n'enlève rien à l'histoire. Bien sûr, ce roman sera plus savoureux pour quelqu'un qui se souvient du rôle de chacun mais je ne voulais pas que ce livre tourne à l'exercice de style ou à l'autocélébration d'une œuvre..."
..."
..."Je veux casser le mur qui existe entre la fiction et la réalité."
Dans tous les cas, ce livre m'a convaincue d'une chose : Je vais de ce pas ajouter à ma LAL "Cité de verre", de Paul Auster, conseillé par Paul Auster ! La boucle est bouclée :))
"Il y a dans la chambre un certain nombre d’objets et, sur chacun d’eux, on a fixé une bandelette de papier blanc où figure un mot écrit en capitales. Sur la table de chevet, par exemple, le mot est table. Sur la lampe, le mot est lampe. Jusque sur le mur, qui n’est pas un objet au sens strict, il y a un bout de papier qui dit mur. Le vieil homme relève un instant les yeux, il voit le mur, il voit le bout de papier fixé au mur et il prononce à voix basse le mot mur. Ce que l’on ne peut savoir à ce stade, c’est s’il lit le mot écrit sur le bout de papier ou s’il nomme simplement le mur. Il se pourrait qu’il ne sache plus lire mais qu’il reconnaisse encore les choses pour ce qu’elles sont et soit encore capable de les appeler par leur nom ou, à l’inverse, qu’il ait perdu la capacité de reconnaître les choses pour ce qu’elles sont mais qu’il sache encore lire."
..." Une fois parvenu à se hisser dans le siège de cuir, il se balance d’avant en arrière pendant un bon moment afin de se calmer les nerfs. En dépit de ses efforts physiques, il comprend qu’il a peur de poursuivre la lecture du manuscrit. Pourquoi cette peur le possède, voilà ce qu’il ne peut expliquer. Ce ne sont que des mots, se dit-il, et depuis quand les mots ont-ils le pouvoir d’inspirer à un homme un effroi quasi mortel ? Pas question, marmonne-t-il d’une voix sourde, à peine audible. Et puis, pour se rassurer, il répète les mêmes mots en criant de toutes ses forces : pas question ! Inexplicablement, ce soudain éclat de voix lui donne le courage de continuer. Il prend une profonde inspiration, fixe des yeux les mots devant lui et lit les deux paragraphes suivants :"
Une critique d'Ellen Salvi, sur Zone Littéraire:"une histoire de Paul Auster se mérite, mais à la fin quelle récompense !"
Le fameux article de lire, décrié par certains blogueurs : Entretien avec Paul Auster, par François BusnelLa version courte du billet de Flo, fan de l'œuvre , et ici, la version longue, ou "Bonus" sur Austerblog, entièrement consacré à l'auteur et rédigé par la même flo et florinette.
On peut lire ce que cette dernière en dit sur l'article de base de l'Austerblog, ou sur son blog : les lectures de Florinette,
un billet tout aussi passionné d'Essel,
O.C. d'Acide critique n'a pas aimé et l'argumente,
Papillon en parle aussi, ainsi que Laurent,et Chimère,
"Pour ses 60 ans, Auster s'est autorisé un roman complexe et génial, qui dit tout des obsessions des écrivains."écrit François Busnel sur TV5Monde,
Sur trois critiques, une seule vraiment enthousiaste : Club des rats de biblio.net,

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