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Interview : Gonzales

Publié le 22 avril 2008 par Laurent Gilot @metalincmag
Propos recueillis par Laurent Gilot
Photo DR
On a fait la connaissance d’un Gonzales un poil nombriliste au début de sa carrière européenne, à la fin des 90’s, on le retrouve aujourd’hui beaucoup plus altruiste sur son nouvel album "Soft Power". Entretien avec un artiste hors normes qui cherche toujours à surprendre.
Cela fait maintenant 7 ans que tu œuvres en tant qu’artiste solo en parallèle à tes activités de productions avec Renaud Letang (Feist, Micky Green, Jean-Louis Aubert, Jane Birkin…). Quel regard portes-tu sur ton parcours ?
Gonzales : Au cours de ces dernières années, je suis passé, sans le vouloir, du statut d’outsider éternel à celui d’insider. C’est une succession d’accidents, de rencontres qui ont fait de moi ce que je suis aujourd’hui. Il y a une certaine continuité, un sens dans tout ce que j’ai fait jusqu’à présent. Je suis assez ouvert aux évènements et je prends souvent des décisions instinctives en rapport avec ma volonté permanente de surprendre les gens, et, par la même occasion, de me surprendre. Comme je suis toujours à la recherche de la prochaine « surprise », je change un peu de vie, de métier, de style de musique… J’aime cette façon d’aborder les choses, elle me correspond totalement.
Tu es d’origine canadienne, tu as vécu à Berlin et, aujourd’hui, à Paris, te considères-tu comme un artiste exilé ? As-tu trouvé des nouvelles racines dans la capitale française ?
G : J’habite Paris depuis 2003… Globalement, oui, je me sens un peu déraciné… De plus, la plupart de mes amis canadiens, comme Peaches, Mocky ou Feist, sont des musiciens qui voyagent beaucoup donc on essaye de se retrouver soit à Paris, soit à Berlin. L’une des caractéristiques des canadiens est le fait de se sentir moins enraciné que d’autres nationalités... Ils sont un peu comme des nouveaux juifs, des gens sans véritable pays…
Comment as-tu abordé la réalisation de cette nouvelle étape discographique ?
G : Comme je te l’ai dit, ce qui me motive vraiment, c'est le désir de surprendre, de prendre des risques. L'année dernière, j'ai pris la décision de faire un disque d'une manière professionnelle. Je ne voulais plus passer pour un "outsider" alors que je suis devenu un "insider". Avec une nomination aux Grammy Awards, huit disques d'or, je suis désormais un artiste reconnu et cet album devait en être le reflet.
Lorsqu'on voit la pochette de "Soft Power" et que l'on écoute les morceaux, on note une certaine nostalgie pour les seventies. Comment analyses-tu cela ?
G : A cette époque, j'écoutais la musique qui me tombait dans les oreilles par accident. Il y avait des sons que j'entendais et j'avais une réaction émotionnelle immédiate. Je ne cherchais pas à savoir si ces musiques correspondaient vraiment à mes goûts. C'était une époque où l'on pouvait avoir un maximum d'émotions alors que tout cela résultait d'une espèce de maîtrise quasi-scientifique de la musique.
Comme s'est mis en place le processus d'enregistrement en studio ?
G : Les studios Ferber, là où j'ai enregistré mon disque et là où le disco a été inventé, ont un son très authentique. Cette particularité fait que les morceaux de mon album ont une facture classique. Auparavant, ma musique paraissait plus originale parce qu'elle était enregistrée à la maison avec les moyens du bord mais, en fait, elle était composée d'une manière totalement classique. Je pense que la musique est une science au même titre que l'enregistrement. J'ai une vision de la musique très conservatrice. Pour "Soft Power", je me suis attaché les services de musiciens canadiens car je me sens plus à l'aise avec eux. Ils ne se sentent pas attachés à une culture musicale particulière comme les français qui sont prisonniers de traditions pesantes dans le domaine…
Est-ce que l’apport de ces musiciens a remis en cause ta façon de travailler ?
G : En fait, j'ai enregistré ce disque avec Renaud Letang. Pour la première fois, j'ai laissé quelqu'un intervenir dans mon processus de création. J'ai pris conscience de tous les bénéfices du travail en équipe. C'est douloureux pour moi parce qu'à la base, je suis quelqu'un de très égoïste, mais je me rends compte que pour accéder à un niveau supérieur, il faut travailler en équipe. C'est cela le "Soft power" : chercher le pouvoir, être ambitieux tout en sachant qu'il faut attirer les gens, les intégrer pour arriver à un résultat probant. Le "soft power" fait débat en ce moment dans la course à la présidentielle aux Etats-Unis, c'est un vrai terme politique. Il n'est pas nécessaire d'utiliser la force pour convaincre les gens, il vaut mieux les encourager pour les attirer à soi. Obama est plus dans le "soft power" alors que Georges Bush est plutôt "hard power". Au début de ma carrière, j'étais Georges et aujourd'hui, je suis Barack (rires).
Gonzales "Soft Power" (Mercury/Universal)
www.gonzpiration.com


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