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Si la télé publique coûte trop cher, le gouvernement, le parlement et les élections encore plus !

Publié le 14 juin 2013 par Lino83

Si la télé publique coûte trop cher, le gouvernement, le parlement et les élections encore plus !

Le gouvernement grec ferme l’entreprise publique de télévision. C’est-à-dire une chaîne internationale, 19 chaînes régionales, six radios, un magazine de programmes de télévision, un site internet et la totalité des archives nationales audiovisuelles. Trois mille personnes sont débarquées. Même la dictature des colonels n’avait pas osé. Pourtant cette décision monstrueuse est parfaitement logique. Elle est même sage du point de vue qui guide l’action du gouvernement qui a déjà accepté la dictature de la troïka. (Attention : je suggère au journal « Libération » de recopier les phrases qui suivent pour les citer hors contexte et titrer « Mélenchon trouve sage la fermeture de la télévision grecque »). A quoi sert une télé publique quand il y a déjà des chaînes privées qui ne coûtent rien à l’Etat ? (un tweet pour Aphatie : « Selon Mélenchon la télé publique coûte trop cher ! ») Il est logique que le raisonnement du moindre coût, en tout et pour tous les sujets, conduise à cette décision. Il n’y a aucune limite à l’extension du domaine d’application de ce raisonnement. Pour les libéraux, tout ce qui est public est illégitime. Tout ! On entend dire parfois que les libéraux voudraient réduire l’Etat à ses fonctions régaliennes. C’est faux. L’armée et la police par exemple sont d’ores et déjà en voie de privatisation comme le montre la prolifération des officines de sécurité dans tous nos pays et celle des compagnies de mercenaires déjà à l’œuvre en Irak et en Afghanistan. Tout, absolument tout, sera donc privatisé soit par mise en vente des secteurs publics soit par leur disparition pure et simple. Bien sûr nous allons dire haut et fort notre indignation et réciter les diverses mantras d’usage sur de tels sujets. Mais il ne se passera strictement rien. (« Le Monde : « Mélenchon pense qu’il est inutile d’agir contre la fermeture de la télé grecque ») L’Union européenne et les eurobéats nous ferons dévaler la pente libérale jusqu’au bout. Le Parlement européen, avait bondi pour condamner le changement d’une attribution de fréquence au Vénézuéla ! Cette fois-ci la Commission s’est contentée de « prendre note » de la décision du gouvernement grec en rappelant que c’est une décision souveraine. Le comble de l’hypocrisie. Bien évidemment dans la mesure où il s’agit cette fois-ci de médias on doit s’attendre à l’expression de beaucoup d’émotion. De belles tartines de bons sentiments seront beurrées en public. Mais il s’agit tout de même d’un gouvernement d’union nationale en Grèce. Imagine-t-on que les socialistes et la droite vont se tirer dessus eux-mêmes ? Quelqu’un a-t-il l’intention de leur poser à Paris une question gênante ? Allons donc ! Je conseille donc de ne pas se laisser manipuler. Inutile de courir devant. Voyons ce que vont déclarer et faire les sociétés de rédacteurs et autres comités de vaches sacrées dans les différentes rédactions « prestigieuses » du pays. Voyons comment elles expliquent que le libéralisme s’applique à tous sauf à elles ! Pourquoi prendre seuls à notre charge de défendre la main qui nous frappe ? La vérité est que la disparition de ces outils de propagande officialistes n’a aucune espèce de conséquences concrètes pour nous. Que rabâchaient du matin au soir les « journalistes » éthiques et indépendants de ces organes de presse ? Qu’il n’y avait « pas d’autre politique possible ». Ils sont servis ! Les défendre est une posture médiatiquement profitable. Mais elle ne saurait être aveuglée.

La liberté qu’il s’agit de défendre c’est celle d’une caste en accord avec le système, qui l’a bien défendu et qui renvoie systématiquement dos à dos victimes et bourreaux. Il s’agit d’un milieu qui permet sans broncher une surexploitation des précaires et intermittents absolument éhontée. On ne saurait défendre la liberté de la presse et le droit à l’information en donnant l’impression d’avaliser les privilèges moraux et matériels d’une caste. Je ne défendrai pas la télévision publique grecque sans rappeler ce que doit être un vrai service public de l’information. On ne défendra pas le service public de l’information sans parler des conditions de sa démocratisation. On ne défendra pas la télévision grecque sans exiger que soit dénoncée la politique qui conduit à cette monstruosité et notamment celle qui frappe tous les jours les pauvres gens. On ne défendra pas les journalistes sans rappeler que les métallos, les cheminots, les hospitaliers, les enseignants, qu’ils méprisent et ridiculisent le reste du temps, dont ils ont dénoncé sans relâche les « privilèges »et contre qui ils ont soutenu avec zèle toutes les mesures qui les frappaient sont eux aussi dignes de respect. Bref notre indignation contre une mesure insupportable ne doit pas fonctionner comme un blanc-seing et une amnésie. Au contraire il faut que l’exécution de la télé publique grecque fasse réfléchir les personnels des médias. Il faut qu’une prise de conscience s’opère dans leurs rangs. Il faut qu’elle aille au-delà du cercle des précaires et des techniciens déjà majoritairement conscients et politiquement convaincus, jusqu’aux bureaux où trônent les bons statuts professionnels. C’est là qu’il est temps d’ouvrir les yeux. C’est là qu’il s’agit de comprendre de quel monstre est en train d’accoucher la hiérarchie des normes à laquelle tous ces gens ont cru et qu’ils défendent chaque jour. A eux de comprendre que la liberté de penser et de s’exprimer n’est pas menacée par les « rouges » mais par ceux qu’ils ont adulé et par les normes qu’ils ont encouragées. Vous verrez : il ne se passera rien. Rien. La sphère médiatique est la deuxième peau du système, pas son antidote.


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