Magazine Beaux Arts

D'après Wedekind

Publié le 24 avril 2008 par Ffievre
Frank Wedekind

Frank Wedekind (1864-1918) un des principaux auteurs de théâtre allemand au tournant du vingtième siècle, est peu représenté sur nos scènes, et c'est bien dommage. Personnellement, je connais son oeuvre surtout par l'opéra qu'Alban Berg a composé à partir des deux pièces que sont La Boîte de Pandore et L'esprit de la Terre. Cet opéra inachevé, Lulu, fait partie avec Wozzeck (du même auteur à partir du Woyzeck de Büchner, qui inspirera Wedekind), des opéras majeurs du début vingtième et du dodécaphonisme allemand.

Si Berg trouva dans Wedekind une forte source d'inpiration, faisant ainsi connaître au dramaturge une postérité au-delà du champ théâtral, il n'est pas le seul artiste à avoir senti les possibilités d'adaptation qu'offre l'oeuvre du maître. Récemment, une jeune cinéaste française s'est penché sur une nouvelle de 1903, Mine-Haha. Nul doute que si l'auteur eût été encore vivant, il n'aurait pas renié cette transposition de l'écrit à l'écran, car elle s'impose à nous comme une évidence. C'est Lucile Hadzihalilovic qui signe à partir de cette nouvelle son premier long métrage (à 45 ans il était temps), Innocence, avec une Marion Cotillard pas encore oscarisée, et Hélène de Fougerolles.

Le film nous plonge dans l'univers de l'enfance féminine, filant une métaphore poétique en trois volets, de la petite enfance jusqu'à la puberté, à travers trois personnalités, trois corps. Des petites filles sont enfermées dans un vaste domaine boisé avec l'interdiction d'en sortir, où elles sont logées, nourries, pratiquent la danse, et sont en partie livrées à elles-mêmes. Mais qu'y a-t-il à l'extérieur? Et pourquoi ne peut-on pas sortir? Et pourquoi sommes-nous là? Voilà le genre de questions autour desquelles vont de nouer trois destins, dans un parfum de mystère assez troublant, la cinéaste ayant décidé à l'évidence d'en révéler le moins possible.
Ce qui est beau dans ce film, c'est à quel point le génie de Wedekind transparaît. Wedekind est, à l'évidence, un des artistes dont l'oeuvre suscite moins des interprétations directes que des transpositions et des adaptations. Son oeuvre est en quelque sorte magnifiée par l'élan créateur qu'elle va susciter chez d'autres artistes. Berg, Hadzihalilovic en sont des illustrations parfaites : en s'inspirant de Wedekind, non seulement ils prouvent tout l'intérêt que contient sa dramaturgie propre, mais en plus la stimulation artistique ainsi provoquée donne naissance à de nouvelles oeuvres, dont Wedekind est pour ainsi dire le géniteur. Il faudrait faire un tour d'horizon des adaptations faites à partir d'oeuvres de Wedekind, mais gageons à travers les deux exemples cité ci-dessus, qu'il ne puisse guère y avoir de résultat médiocre.

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