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Le dernier choc de la République Hollande

Publié le 24 juillet 2013 par Juan
Oh mon dieu.
Les images étaient insoutenables, aussi insupportables que l'information elle-même. Elle était venue plus tôt dans la journée de lundi. Quand elle est parvenue aux agences, ces dernières ont tremblé devant le choc. On a rappelé des reporters du terrain, convoqué les plus grands spécialistes. Immédiatement, tout ce que le pays comptait d'experts et d'analystes s'est mobilisé.
La cause le méritait.
Des journalistes ont réajusté toutes leurs interviews des heures et jours à venir en conséquence. Il fallait des réponses, que l'on comprenne et donne à comprendre sur cette incroyable et insupportable nouvelle. On allait demander des comptes car la coupe des promesses non tenues était pleine. Et cette nouvelle-là avait provoqué une onde de choc jusque dans nos campagnes les plus reculées.
Le soir venu, l'évènement était scruté. Il était si secret, que l'on connu assez vite tous les détails, et jusqu'au menu. Car vous l'aurez compris, cette nouvelle insoutenable et insupportable, c'était ce dîner de François Hollande, président de la République, avec des responsables de sa majorité, un lundi chaud de juillet à l'Elysée: Harlem Désir (PS), Jean-Michel Baylet (PRG), Pascal Durand (EELV), Robert Hue (Mouvement unitaire progressiste) et Jean-Luc Laurent (MRC) sont arrivés peu avant 20H30 pour y rester environ 2 heures et trente minutes. Jean-Marc Ayrault était également présent. On compris qu'ils dégustèrent du pigeon et du ris de veau, car Hollande a de l'humour; qu'ils ont parlé politique et majorité, et finalement assez peu de leur projets de vacances.
On en avait presque oublié la naissance de l'héritier britannique, la guerre civile qui menace en Egypte, les élections au Mali, les résultats du Tour de France, la prétendue guérilla à Trappes, et les a-coups verbaux et scandaleux d'un maire d'obédience frontiste.
Hollande avait rompu sa promesse de ne pas inviter des responsables de son camp à l'Elysée. Harlem Désir, secrétaire général du Parti socialiste, ou Bruno Le Roux, président du groupe socialiste à l'Assemblée nationale, étaient quasiment persona non grata au Palais.
En cause, une déclaration de fin de campagne, lors du débat de l'entre-deux tours avec Nicolas Sarkozy, dont se régalaient des commentateurs en fin de parcours et à bout d'idées.
"Hollande prend lui-même en main sa majorité" (Le Figaro)

"Moi président, j'inviterai les responsables de la majorité à dîner" (Le Nouvel Obs)

"Promesse non tenue: Dîner de la gauche à l’Elysée, Hollande "câline" sa majorité" (Atlantico)

"Majorité présidentielle: un dîner à l'Elysée pour resserrer les rangs en vue des municipales" (L'Express)


"Dîner de la majorité à l'Elysée : la famille se rassemble... malgré les divergences" (France Info)

"le dîner du renoncement" (communiqué officiel de l'UMP)

"Hollande et les chefs de la majorité: un dîner stratégique" (BFM TV)


Oh certes, on n'avait pas oublié que Nicolas Sarkozy, l'ancien monarque, tenait chaque début de semaine, cinq années durant, son bureau politique à l'Elysée même, qu'il appelait ses "petits-déjeuners de la majorité"; ni qu'il invitait chaque mois des centaines de parlementaires UMP aux frais du contribuable à l'Elysée; ni qu'il se rendait dans des discrètes rencontres de militants UMP en marge de la plupart de ses déplacements provinciaux; ni encore qu'il avait sollicité des fonds auprès du Premier Cercle des donateurs de l'UMP à l'Hôtel Bristol. Personne n'avait oublié cette débauche d'énergie militante, cette confusion généralisée des intérêts que l'on appelait la Présidence des Riches. Mais il fallait surjouer la trahison : "l'invitation signe la fin d'une fiction, celle d'un président qui ne se mêlerait pas de la vie des partis. Elle signe, aussi, la mort d'une tradition et d'une promesse de campagne. 'Moi président de la République, je ne serai pas le chef de la majorité'" explique ainsi un éditorialiste du Nouvel Obs.
Il est temps d'un aveu, double et sincère.
1. Cela fait des lustres que certains attendent qu'Hollande sorte de sa présidence trop normale, sans pour autant tomber dans la débauche sarkozyste. A dire vrai, avec un repas tous les 16 mois, Hollande a quelque marge de ce point de vue-là. Il souffre au contraire d'un isolement de sa propre majorité, d'une absence de relais forts, d'un parti socialiste amorphe et divisé; de confrontation avec ses alliés ou son opposition de gauche suffisante: "Si l'anaphore valait pour conclure une campagne essentiellement construite autour de l'antisarkozysme, elle s'avère, à l'usage, peu adaptée à la réalité pratique du quinquennat" commente David Revault d'Allonnes pour Le Monde.
2. Il n'est même pas certain qu'Hollande devienne enfin le chef de sa majorité. C'est une curieuse réflexion que de considérer la gauche politique à l'aune du caporalisme de sa droite. La gauche est plurielle, et souvent divisée. C'est une tradition, qui, ces temps-ci, se porte avec une acuité voire une violence inédites. Les confidences d'après-repas sur la teneur des échanges n'indiquent d'ailleurs pas de grandes injonctions autoritaires. Les Ecologistes présenteront autant de listes autonomes aux prochaines élections municipales qu'ils le pourront. Cécile Duflot l'a rappelé pour Paris, la capital, mardi 23 juillet sur France Info.
Pour le reste, la caravane passe, ...


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