Magazine Culture

"Patagonie intérieure" & "La Clôture des merveilles" de Lorette Nobécourt

Par Zone Littéraire De Vanessa Curton


Certaines lectures nous emportent et nous ramènent. Des écritures qui sont des souffles gorgés de tout ce qui fait matière. Les combats, les doutes, les douleurs, les désirs, l’espérance et l’amour de vivre. Cette quête de clarté, d’espaces libres, d’un infini vertical…

J’ai ouvert Patagonie intérieure comme aspirée par ce voyage vers le Chili, et pressentant que j’allais y trouver une manifestation de ce qui fait l’intensité d’un cheminement vers l’Être. 

En plongeant dans La Clôture des merveilles, cette même aspiration m’a happée dés les premières phrases. Ce roman me semble être moins un roman biographique d’Hildegarde de Bingen, moniale du 12ème siècle, que l’expression de luttes et d'une quête, d’une ferveur dont l’écriture est le support, et le personnage : le témoin & le symbole…

En voici quelques extraits :

« Oui, la vie porte l’absolu et il revient à l’homme de l’incarner ici, qui ne l’atteindra jamais.

Oui, la beauté, la poésie, l’amour, l’éros, la joie, la subversion, l’autonomie, l’indépendance sont des valeurs contemporaines qu’il reste à défendre.

Oui, le but de l’homme est l’amour, toujours plus d’amour.

Oui, n’en déplaise aux marchands, aux esthètes, aux cyniques, aux épargnants, aux religieux et aux athées, la vie se conjugue dans la dépense, le don, l’ouverture, l’acceptation, la perte.

Oui, la conscience est notre bien le plus précieux, et l’énergie notre source vitale.

(…) » p. 12 /13

« Il est une terre inconnue, loin à l’intérieur des hommes, où dans la matrice du silence le verbe met bas. Quête organique que celle de cette langue accouchée des origines, qu’ils sont si peu nombreux à s’en aller chercher. Ceux qui l’osent ont appris que l’écriture est habitée de sexualité comme le ventre, et qu’il faut s’y enfoncer avec la même ardeur que les consonnes masculines fouaillent la béance des voyelles dans la phrase. C’est au prix de cette conscience-là, et de l’enjeu qu’elle représente, que l’esprit circule entre les lettres et porte le souffle.

Les poètes le savent, les prophètes et les saints : que les mots sont aussi sexuels que le corps des femmes, et que le souffle les féconde s’ils se laissent épouser. Car c’est par eux que Dieu cherche l’homme. Et parfois le trouve. »
p. 105

..................

La Clôture des merveilles
Et
Patagonie intérieure
A écouter en podcast sur France Culture, les Carnets de Patagonie : http://www.franceculture.fr/tags/patagonie)

De Lorette Nobécourt
Editions Grasset, 2013


Retour à La Une de Logo Paperblog

Magazines