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Polémique Valls-Taubira : Hollande récolte ce qu’il a semé !

Publié le 15 août 2013 par Copeau @Contrepoints

Au-delà des divergences politiques (laxisme vs. politique sécuritaire), ce nouveau couac du gouvernement traduit l’incapacité du président Hollande à prendre position.
Par Philippe Bouchat.

Polémique Valls-Taubira : Hollande récolte ce qu’il a semé !
Voici un couac gouvernemental supplémentaire, à propos de la réforme pénale, dans une série déjà fort longue et qui, assurément, n’est pas prête de se clore rapidement [1]. Il faut dire que ce couac-ci ne date pas d’aujourd’hui et qu’il a connu déjà les joies de la médiatisation et ce, d’autant plus que les personnalités fortes des protagonistes (l’hidalgo Valls qui rêve d’un destin à la Sarkozy d’un côté ; Taubira-la-rebelle-rentrée-dans-le-rang qui en veut à la terre entière d’être femme, de couleur et d’outre-mer de l’autre côté) accentuent l’opposition des thèses en présence.

Mais, au-delà des divergences politiques (laxisme vs. politique sécuritaire) et personnelles, le fond de l’histoire est que ce gouvernement est l’exact reflet de l’incapacité du président Hollande à décider, à prendre position, ce qui est une caractéristique majeure de sa carrière politique (il y a d’ailleurs un excellent article sur le sujet dans le Best Of de Contrepoints).

Lorsqu’il était premier secrétaire du PS, Hollande n’avait de cesse de chercher le plus petit commun dénominateur entre les différents courants sévissant à l’époque au sein de sa formation politique. Certes, c’est le rôle du premier secrétaire de fédérer les forces vives de son parti, mais en général fédérer signifie – étymologiquement du moins – unir, c’est-à-dire tirer la substantifique moelle de chaque courant et d’en faire un tout cohérent et lisible auquel on peut adhérer (comme p.ex. Mitterand su le faire sur la base de la SFIO pour ériger le PS). Tandis que l’(in)action du premier secrétaire Hollande a consisté à ne pas choisir, à ne pas élaborer de synthèse forte à proposer aux militants et aux électeurs (rappelez-vous : on s’est assez gaussé – à juste titre – sur l’absence de ligne programmatique durant la « présidence » hollandaise du PS), mais au contraire à vider les différents courants de leurs caractéristiques principales et à élaborer une coquille vide au titre de synthèse…

Rebelote en 2007 : après avoir anesthésié tous les courants, Hollande se prépare à se présenter comme candidat du PS à l’élection présidentielle.  Son opération a bien failli réussir si sa future ex-compagne de l’époque (Bécassine Royale) ne l’avait devancé en jouant les médias et sa popularité contre l’appareil du parti.  On sait ce qu’il en est advenu : Sarko a brillamment et largement remporté le scrutin, renvoyant la candidate dans son Poitou et le PS à son absence programmatique et de leadership.

Primaires de 2011 : Hollande nous refait le coup du fédérateur par défaut. DSK étant out pour les raisons que l’on sait, Hollande laisse les autres monter aux barricades – tout à leur honneur – et en particulier Montebourg, Aubry et – déjà – Manuel Valls.

Ce rappel historique explique comment, une fois élu, le président Hollande fonctionne. Ainsi en va-t-il d’abord avec les Verts : on les laisse franchir la ligne rouge (remember Duflot et la dépénalisation des stupéfiants ; Placé et le non soutien au budget), mais on n'intervient surtout pas ! Surtout pas prendre de coups : le président doit être normal et clean et – seule véritable ligne de conduite lisible – faire l’exact contraire de son prédécesseur qui n’aurait pas toléré le moindre soufflet… Ainsi en va-t-il ensuite avec son aile (extrême-)gauche : on ne compte plus les sorties intempestives (et stériles) de Montebourg, ni les rares (mais tout aussi stériles) déclarations d’Hamon. Sans compter Mélanchon qui vocifère à tout-va contre le président et son gouvernement ; pas sûr que Mitterand – dont Hollande se félicite d’être le fils (illégitime) spirituel – ait agi de la même sorte (il suffit pour s’en convaincre, la manière dont le Vieux a tué les communistes et Rocard).

Ainsi en va-t-il, enfin, de Valls et Taubira. Surtout ne pas choisir entre les deux lignes claires : laxisme-prévention contre sécurité-répression (je suis à peine caricatural). Pourtant, Hollande ferait bien pour une fois de se faire violence et de choisir et, si possible, de miser sur Valls. Il y aurait tout à gagner : clarté, autorité et … efficacité. Taubira a déjà eu son trophée avec l’adoption de la loi relative au mariage pour tous. Valls non. En s’appuyant sur son populaire ministre de l’Intérieur, il irait dans le sens des demandes citoyennes vers un renforcement de la sécurité et de la répression et pourrait au passage y gagner quelques points dans les sondages.

Mais, voilà : Hollande craint comme la peste que Valls lui fasse à terme de l’ombre. Résultat ? Les coups pleuvent sur l’Élysée qui va devoir agir… ou non.

Finalement, Hollande récolte ce qu’il a semé…

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Lire aussi : Polémique Valls-Taubira : l'État régalien vacille

Note :

  1. Voir p.ex. sur le sujet : Jean-Marc Ayrault, les 35h et la danse des canards.

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