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Le temps des (queues de) cerises

Publié le 03 mai 2008 par Collectifnrv
312604178.jpg   Le samedi premier mai 1886, à Chicago, un mouvement revendicatif est organisé par les syndicats américains. Une grève suivie par 300000 à 400000 salariés paralyse des milliers d’usines à travers le pays.

Le mouvement se poursuit. Le 3 mai, on dénombre 3 morts parmi les grévistes durant une manifestation violemment réprimée. Le lendemain, lors d’une marche de protestation, une bombe explose. Sept policiers sont alors tués, de nombreux manifestants sont blessés. Huit ouvriers anarchistes sont arrêtés : 4 seront pendus, un se suicidera en prison, les 3 derniers seront graciés au terme de six années de prison.

La revendication ayant motivé ce mouvement était la généralisation de la journée travaillée de 8 heures.

Le principe des 3 tiers ; un tiers consacré au travail, un tiers au sommeil, un tiers aux loisirs. 

On retrouve aujourd’hui une autre évocation du principe des 3 tiers.

N. Sarkozy : « Je voudrais une société où (...) sur 100 de bénéfice, il y ait un tiers qui aille aux actionnaires - c'est quand même eux qui prennent les risques -, un tiers qui aille aux investissements pour que l'entreprise reste compétitive, et puis un tiers qui aille aux salariés qui ont participé à la création de cette richesse. »

On voit bien le glissement opéré.

"Ça ne se passe pas comme ça", a répliqué la présidente du Medef, Laurence Parisot.

La preuve.

Ce premier mai 2008, les traditionnels défilés (comme on dit) se sont multipliés en France, en Europe, dans le monde.

A Zurich, 10000 personnes ont manifesté.

« Comme chaque année, quelques échauffourées ont eu lieu à Zurich en marge de la manifestation officielle, qui s'est déroulée, elle, dans le calme. La police a fait usage de balles en caoutchouc et de gaz lacrymogènes contre des autonomistes de gauche. La police a procédé à quelque 280 interpellations. On déplore une dizaine de blessés mais aucun parmi les forces de l'ordre. »

En Turquie :

« De premiers incidents ont éclaté jeudi matin à Istanbul, où la police a dispersé avec des gaz lacrymogènes et des canons à eau des manifestants rassemblés devant le siège d'un important syndicat, alors que la Turquie se préparait à un 1er mai sous tension. 
Plusieurs manifestants ont été blessés et "un nombre indéterminé arrêtés" lors de ces incidents que la confédération syndicale de gauche DISK a qualifiés "d'assaut de la police. »

Hambourg :

«Une manifestation anticapitaliste organisée pour célébrer le 1er Mai a dégénéré en actes de violence et de vandalisme dans la nuit de mercredi à jeudi à Hambourg, dans le nord de l'Allemagne, a annoncé la police. »

Macao :

« A Macao, ville chinoise, des heurts ont opposé ce matin du 1er mai des manifestants défilant dans le cadre de la Fête du travail à la police anti-émeutes qui a fait usage à plusieurs reprises de pistolets de starter. »

Et aussi :

« Des dizaines de milliers de manifestants ont défilé dans plusieurs capitales asiatiques, en Russie, au Sénégal et en République démocratique du Congo (RDC) à l’appel des syndicats. La hausse des denrées alimentaires et des salaires plus justes était au cœur des revendications. »

La question des salaires, du pouvoir d’achat, du prix des denrées, semble s’être substituée à celle du temps. Ce n’est pas nouveau. Le temps n’est rien sans les conditions matérielles de son bon déroulement. C’est à l’intérieur de la question du travail que s’expriment les revendications : les salaires, les conditions de travail ; comme s’il n’y avait plus d’extériorité à l’activité salariée. Ou plus précisément, c’est le travail qui détermine aussi ce qui lui est extérieur, mais non plus comme récit collectif, plutôt comme nécessaire condition au bon exercice des activités individuelles et consuméristes. Après le travail, le travail continue. Consommer (même mal, même insuffisamment), c’est du travail. La « valeur » travail ne connaît pas la crise.

Il est également un phénomène assez nouveau dans les défilés du premier mai, en France ; du moins dans sa visibilité revendiquée. Les sans-papiers ont « tenu la vedette », selon la pénible formule d’un journal de « gauche. » Il s’agit de la nécessaire revitalisation des revendications dans leur confrontation avec le réel et ses oubliés. On voit encore que c’est le travail qui détermine le reste, la légitimité à rester ou non sur le territoire, à vivre ici ou non.

"Mais l'exhibition n'est pas pour autant la résolution."

"Bien que certains se résolvent à s'exhiber."

Le premier mai n’est qu’une date, un moment qui revient. La fête du travail (et/ou des travailleurs) en un jour chômé (de moins en moins) ; cet oxymore doit en agacer plus d’un.

Jeremy Rifkin, dans son livre « la fin du travail » (préfacé par Rocard, c’est dire…), interrogeait la question de la disparition inéluctable du travail. Disparition induite par les progrès de productivité, les innovations technologiques. Comment une société peut-elle faire face à cette « révolution » ? Temps de crise ou temps du loisir ?

Ce temps-là est bien loin.

Et la question de la place du travail dans la vie d’un Homme plus vivace que jamais. 

« Une vendeuse de muguet a été braquée par deux personnes à moto, jeudi après-midi à Marseille, et a dû leur remettre sa recette de plusieurs centaines d'euros, a-t-on appris de source policière. »


Wonder Mai 68
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