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Evêque : pasteur du Peuple de Dieu

Publié le 09 octobre 2013 par Vindex @BloggActualite

   La récente nomination de Mgr Jean-Christophe Lagleize au siège épiscopal de Metz (Moselle) nous permet de revenir quelque peu sur le ministère d’évêque, trop souvent méconnu par nos contemporains. Beaucoup d’hommes et de femmes de notre société portent un regard assez « négatif » sur l’organisation très hiérarchique de l’Eglise catholique, parce que justement, ils ne parviennent pas à entrer dans une compréhension claire de cette « hiérarchie ecclésiastique ». Or, cette organisation très structurée de l’Eglise est fondamentale, et il ne s’agit en rien d’une hiérarchie semblable à une hiérarchie civile et/ou militaire, dans la mesure où chaque membre y exerce non pas un « pouvoir », mais plutôt un « service » ou une « mission » pour le bien du Peuple de Dieu. Parmi les différentes missions que tout clerc peut remplir dans l’Eglise, celle d’évêque se révèle exigeante et lourde.    Qu’est-ce qu’un évêque dans l’Eglise catholique ? Quel rôle joue-t-il précisément ? En quoi la mission pastorale qu’il exerce est-elle nécessaire à la portion du Peuple de Dieu qui lui est confiée ? Les évêques… successeurs des apôtres   Dieu « veut que tous les hommes soient sauvés et parviennent à la connaissance de la vérité » (1 Tm 2,4) : c’est ainsi que nous pourrions résumer le rôle de l’Eglise dans le monde, c’est-à-dire, faire connaître aux hommes la vérité afin qu’en croyant, ils soient sauvés. Or, cette vérité, c’est Jésus-Christ, Fils de Dieu, deuxième personne de la Sainte Trinité. Il est donc nécessaire que le Christ soit annoncé à tous les peuples et à tous les hommes, dans tous les temps ainsi que dans tous les lieux géographiques, afin que le message de la Révélation divine parvienne jusqu’aux extrémités du monde.   Mais comment annoncer le Christ aux hommes ? Jésus lui-même, dans l’Evangile, a donné à ses disciples des « indications » afin que ces derniers puissent répondre à cette question. La finale de l’Evangile de saint Matthieu est très claire à ce sujet : « Allez donc : de toutes les nations faites des disciples, les baptisant au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit, leur apprenant à garder tout ce que je vous ai prescrit. » (Mt 28, 19-20). Ainsi, il est vraisemblablement établi que le Christ Jésus, qui a Lui-même proclamé la Bonne Nouvelle du Salut durant son ministère public, a ordonné à ses apôtres, à la suite de la Résurrection, de prêcher l’Evangile à tous « comme la source de toute vérité salutaire » (n°75 du CEC[1]). La transmission de l’Evangile s’est ainsi faite de deux manières : oralement (par la prédication orale des apôtres) ; par écrit (Nouveau Testament). Or, afin que le message de l’Evangile soit gardé intact et vivant dans l’Eglise de Dieu, les apôtres devaient se choisir des successeurs à même de poursuivre leur œuvre : ces successeurs, ce sont les évêques. Ainsi, comme le spécifie le n°77 du CEC, « la prédication apostolique, qui se trouve spécialement exprimée dans les livres inspirés, devait être conservée par une succession ininterrompue jusqu’à la consommation des temps ».    Les évêques sont donc les successeurs des apôtres, c’est-à-dire des quelques hommes qui ont côtoyé le Christ et reçu directement son enseignement, et surtout qui l’ont vu ressuscité : depuis le début du Christianisme jusqu’à nos jours, leur mission est bel et bien de transmettre aux hommes cette nouvelle admirable du Salut. Parmi tous les évêques, l’Eglise catholique apostolique et romaine reconnaît une place particulière à l’un d’eux : le Pape, qui est l’évêque de Rome. La justification de cette primauté papale se trouve encore une fois dans l’Evangile de saint Matthieu, lorsque Jésus affirme à l’apôtre Pierre « Tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Eglise (…). Je te donnerai les clés du Royaume des cieux ; tout ce que tu lieras sur la terre sera lié aux cieux, et tout ce que tu délieras sur la terre sera délié aux cieux. » (Mt 16, 18-19). Ainsi, au sein de l’Eglise du Christ, le Pape, en tant que successeur de saint Pierre, à qui Jésus a confié tous ceux qui croient en Lui, jouit, par institution divine, « du pouvoir suprême, plénier, immédiat et universel pour la charge des âmes. Vu donc que celui-ci a été envoyé, comme pasteur de tous les fidèles, pour pourvoir au bien commun de l’Eglise tout entière (…), il détient la primauté du pouvoir (…). »[2]. Quant aux autres évêques, eux ne succèdent pas à un apôtre en particulier, mais à l’ensemble du collège apostolique, voilà pourquoi on parle de « collège des évêques » : avec le Pape, ils sont également pasteurs des âmes et, sous l’autorité du Souverain pontife, ils sont envoyés pour continuer à diffuser la Bonne Nouvelle du Salut dans le monde, sous l’action de l’Esprit-Saint.  L’évêque, tête de l’organisation locale de l’Eglise…   L’Eglise catholique est en réalité organisée selon un double plan : un plan horizontal (dimension « associative » de l’Eglise) ; un plan vertical (la « hiérarchie » allant du Pape aux fidèles laïcs). La structure de base de l’Eglise est le diocèse : il s’agit d’une portion locale de l’ensemble de l’Eglise qui contient en elle l’Eglise universelle. En fait, chaque Eglise locale participe de l’Eglise universelle. On pourrait également définir le « diocèse » de la façon suivante : il s’agit d’une portion du Peuple de Dieu placée sous l’autorité d’un évêque. En effet, chaque diocèse, qu’il soit territorial ou non, est placé sous la juridiction d’un évêque. Le mot « évêque » est issu du Grec episcopos qui signifie « surveillant » : l’évêque doit donc surveiller les fidèles qui lui sont confiés afin que ces derniers ne s’égarent pas dans la foi. Nommé par le Pape, il exerce ce qu’on appelle communément les tria munera, c’est-à-dire les trois « tâches » qui lui permettent de guider au mieux la portion du Peuple de Dieu qui est confiée à sa garde : la charge d’enseignement (il enseigne la foi catholique) ; la charge de sanctification (il doit sanctifier ses fidèles) ; la charge de gouvernance (il doit gouverner au service de la communion des chrétiens). Or, étant donné qu’il ne peut guère exercer cette triple charge seul, il se donne des collaborateurs qui doivent l’aider dans son ministère, et ces collaborateurs, ce sont les prêtres. L’évêque est lui-même un prêtre qui a reçu l’ordination diaconale et sacerdotale, mais il reçoit également la consécration épiscopale qui lui assure la plénitude du sacrement de l’ordre. Il devient véritablement l’évêque de son diocèse au moment où il s’assoit la première fois sur sa cathèdre[3], c’est-à-dire sur le siège épiscopal qui symbolise sa fonction d’enseignant. Plusieurs insignes permettent de reconnaître un évêque et, il est important de souligner que ce dernier ne revêt pas ces insignes pour faire beau, mais bel et bien parce qu’ils signifient tous quelque chose : la mitre (elle symbolise la fonction d’enseignant de l’évêque) : la crosse (elle manifeste bien que l’évêque est avant tout pasteur de son peuple) ; l’anneau épiscopal (il symbolise le mariage entre l’évêque et l’Eglise de son diocèse, et bien évidemment, la fidélité qui doit en découler) ; la croix pectorale (elle rappelle que l’évêque a mis sa foi en Christ, vers qui il doit mener ses fidèles).

   Comme nous l’avons précisé plus haut, un évêque ne gère pas seul les affaires de son diocèse : il s’entoure d’un certain nombre de collaborateurs qui peuvent être clercs ou laïcs. Dans le gouvernement d’un diocèse, la règle qui prime est bien évidemment celle du bien spirituel et humain des fidèles. Pour que ce bien soit dûment procuré, il n’est pas rare qu’un ou plusieurs évêques auxiliaires soient nommés par le Saint-Siège afin d’aider l’évêque titulaire. La trop grande étendue géographique d’un diocèse, son nombre élevé d’habitants ou encore certains circonstances pastorales l’exigeant sont autant de raisons justifiant la nomination d’évêques auxiliaires. Parfois, un besoin spécifique exige qu’un évêque coadjuteur[4]soit nommé afin de seconder l’évêque titulaire. Comme le précise le Décret sur la charge pastorale des évêques, « ces évêques coadjuteurs et auxiliaires doivent être pourvus de pouvoirs appropriés de façon que, étant toujours sauves l’unité du gouvernement du diocèse et l’autorité de l’évêque diocésain, leur action soit rendue plus efficace et que la dignité propre aux évêques soit mieux assurée ». Bien évidemment, les décisions concernant le bien des âmes doivent être prises d’un commun accord entre l’évêque titulaire et ses coopérateurs. L’évêque diocésain est également entouré d’une curie dont la fonction la plus éminente est celle de vicaire général. Souvent, il y a deux vicaires généraux et, lorsque dans un diocèse, il n’y a ni évêque coadjuteur ni évêque auxiliaire, les vicaires généraux sont véritablement les bras droits de l’évêque titulaire. De plus, « chaque fois que le bon gouvernement du diocèse l’exige, l’évêque peut établir un ou plusieurs vicaires épiscopaux qui, de plein droit, jouissent, dans une partie (géographique) déterminée du diocèse ou dans un secteur déterminé d’activité (…) du pouvoir que le droit commun accorde au vicaire général »[5]. Enfin, parmi les collaborateurs de l’évêque dans le gouvernement de son diocèse, on compte également ses prêtres qui ont chacun une mission particulière : les chanoines du chapitre cathédral[6] ; les prêtres membres de différents conseils ; l’ensemble du presbyterium[7]comme indiqué précédemment. Des laïcs engagés en Eglise peuvent aussi participer à la gouvernance d’un diocèse. Tous doivent comprendre que par leur travail, ils concourent au ministère pastoral de l’évêque, dans la perspective de l’évangélisation.


Devenir évêque… n’est pas un plan de carrière !   Trop souvent, quantité de personnes pensent que les ecclésiastiques de haut rang sont parvenus à occuper la place qui est la leur en usant d’habiles manœuvres (restons polis !). Certes, la simonie était monnaie courante au Moyen Age ou encore à l’époque moderne, mais ce n’est plus le cas aujourd’hui. En effet, devenir évêque n’est pas un plan de carrière, même si le « carriérisme » n’a pas tout-à-fait disparu au sein même de l’Eglise, comme le Pape François le dénonce souvent… Il n’en demeure pas moins que la plupart des évêques nommés aujourd’hui ne désirent en rien la charge qui leur est confiée, notamment du fait du poids de la fonction épiscopale. Etre évêque n’est pas une partie de plaisir, c’est une tâche rude, grave, et qui engage le prêtre qui l’accepte. Elle implique beaucoup de sérieux ainsi que des capacités multiples : l’évêque doit à la fois être un pasteur, un docteur, un gestionnaire, un diplomate, etc. De ce fait, le processus de nomination d’un évêque est long et compliqué, car il est nécessaire de trouver le candidat « idéal » compte tenu de la situation de tel ou tel diocèse.   Comment les évêques sont-ils nommés ? Dans l’Eglise catholique, les évêques sont nommés par le Pape, à partir des listes transmises au Saint-Siège par le nonce apostolique[8], qui reçoit lui-même de ses frères évêques des noms de prêtres jugés « capables » de devenir évêques. Si au cours de l’Histoire, le processus de nomination des évêques a entraîné de nombreux conflits entre le pouvoir spirituel et le pouvoir temporel[9], ce n’est plus guère le cas dans nos sociétés sécularisées à outrance. Lorsqu’il faut nommer un évêque, le nonce apostolique ouvre une « enquête canonique » destinée à trouver le meilleur candidat possible au regard de la situation du diocèse concerné. Après avoir recueillit diverses informations, le nonce établit une terna[10]qu’il soumet au Pape qui, sans doute en collaboration avec ses conseillers, choisit un nom parmi les trois proposés. A partir de là, le nonce apostolique entre en communication avec l’élu pour lui soumettre la proposition. Ce dernier peut accepter ou refuser. S’il accepte, le nonce en informe le Vatican qui prend alors ses dispositions afin de rendre la nomination publique (rédaction de la bulle[11]de nomination, publication de la nomination sur le site du Saint-Siège et dans l’Osservatore romano[12]). Si l’élu refuse, le processus de nomination recommence. En France, le gouvernement intervient encore dans la nomination des évêques de Metz (Moselle) et de Strasbourg (Alsace), en vertu du régime concordataire auquel sont encore soumis ces deux diocèses[13]. Une fois que le nonce apostolique et le Vatican se sont entendus sur un nom, le nonce soumet la terna au Président de la République via le ministre de l’Intérieur et des cultes. Traditionnellement, le premier nom de la terna est celui que le Pape souhaite nommer. Le gouvernement peut alors émettre des objections, mais celles-ci ne peuvent avoir qu’un caractère politique et non religieux concernant la personnalité de l’ecclésiastique. Lorsque Paris et Rome se sont entendus sur un nom, une date commune est choisie pour rendre la nomination officielle : celle-ci paraît alors à la fois au Journal Officiel et dans l’Osservatore romano. Le Président de la République française est ainsi le dernier chef d’Etat au monde qui nomme des évêques : plutôt ironique compte tenu du caractère très « prononcé » de la laïcité à la française…

   Si le candidat retenu pour devenir évêque d’un diocèse est déjà évêque, il ne devient officiellement l’évêque de ce diocèse qu’au moment où, lors d’une célébration religieuse officielle, il prend possession de sa cathèdre : on parle de « réception du siège apostolique ». Par contre, si le candidat retenu n’est pas encore évêque, il doit alors recevoir la consécration épiscopale : celle-ci est toujours conférée par trois évêques, en communion avec l’évêque de Rome (le Pape), et elle confère à l’élu la « plénitude du sacerdoce » comme nous l’avons explicité plus haut. Il est important qu’une consécration épiscopale se fasse en communion avec Rome, c’est-à-dire avec l’approbation du Pape, sinon, elle peut-être considérée comme illicite et, les évêques consécrateurs comme le consacrés encourent l’excommunication, cela pouvant aboutir à des schismes.

 Depuis les premiers siècles du Christianisme, les évêques sont les successeurs des apôtres, chargés par ces derniers de transmettre à tous les peuples, dans tous les temps et dans tous les lieux, la Bonne Nouvelle du Salut, proclamée par la bouche même de Jésus-Christ. Même si dans la société actuelle, pour beaucoup de personnes, ils renvoient l’image d’une Eglise catholique fortement hiérarchisée, il est impossible de faire fi de leur fonction, tant cette dernière est primordiale dans les fondements mêmes de l’Eglise. En tant que successeurs des apôtres et représentants du Christ Lui-même, les évêques ont vocation à faire « paître » le troupeau du Seigneur, en dirigeant l’Eglise locale (diocésaine) en communion avec le Pape, évêque de Rome, ce qui manifeste bien l’universalité (la catholicité[14]) de l’Eglise, gardant ainsi leurs fidèles dans la foi véritable. Le rôle de l’évêque est triple : enseigner ; sanctifier ; gouverner. Les prêtres, collaborateurs de l’évêque, exercent les mêmes tâches que leur pasteur, par participation à son ministère. Entouré de son presbyterium et de différents conseils et conseillers, clercs ou laïcs, l’évêque ne doit avoir de cesse de permettre à ses fidèles d’emprunter les chemins du Sauveur afin que ces derniers accèdent au Salut et à la vie éternelle.
Emmanuel ECKER.
Sources :Catéchisme de l’Eglise CatholiqueDécret sur la charge pastorale des évêques dans l’Eglise in Le Concile Vatican II, Edition intégrale définitive, Cerf, Paris, 2010.BibleWikipédia


[1]  Catéchisme de l’Eglise Catholique [2]  Décret sur la charge pastorale des évêques dans l’Eglise : il s’agit d’un document officiel issu du Concile Vatican II, session VII, 28 octobre 1965. [3]  Cathèdre : c’est le nom donné au siège de l’évêque. De ce nom est issu le mot « cathédrale », qui est en fait l’église de l’évêque, dans laquelle se trouve sa cathèdre. [4]  Un évêque coadjuteur est un évêque destiné à prendre la succession de l’évêque diocésain lorsque celui-ci arrivera au terme de son mandat. [5]  Décret sur la charge pastorale des évêques dans l’Eglise [6] Les chanoines sont les prêtres directement attachés au service de la cathédrale et, qui ont une double mission : ils sont chargés d’aider l’évêque dans sa mission (cette mission n’est plus trop d’actualité étant donné la mise en place de différents « conseils » auprès de l’évêque diocésain) ; ils sont chargés de prier pour le diocèse. [7] Presbyterium : c’est l’ensemble des prêtres d’un diocèse. [8] Le nonce apostolique est le représentant/l’ambassadeur du Pape auprès du gouvernement d’un pays. [9] Exemple de la « Querelle des Investitures » ou « Lutte du Sacerdoce et de l’Empire » au XIème siècle. [10] Liste de trois ecclésiastiques pressentis pour devenir évêque de tel ou tel diocèse. [11]Une « bulle » est un document officiel du Pape émanant de la Chancellerie apostolique. [12] Journal du Saint-Siège. [13]Il s’agit du Concordat napoléonien de 1801, aboli en France par la Loi de séparation des Eglises et de l’Etat en 1905, années durant laquelle l’Alsace-Moselle étaient allemandes. A la fin de la Première Guerre Mondiale, les Alsaciens et les Mosellans ont souhaité maintenir le régime concordataire, auquel beaucoup d’entre eux sont encore aujourd’hui très attachés. [14] En Grec, katholikos signifie « universel ». Ainsi, Eglise catholique signifie Eglise universelle.

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