Magazine Beaux Arts

1925, quand l'Art Deco séduit le monde

Par Mpbernet

29 octobre 2013

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Il est une époque à la fois lointaine et proche de moi, qui me fascine autant pour les événements historiques qu’elle a engendré que le style qu’elle a suscité : cette période pendant laquelle mes parents vécurent leur jeunesse – les folles années Arts Déco, de 1920 à 1939.

Et voici que le Palais de Chaillot – ce vaisseau fantôme de l’art français d’avant la grande dégringolade – organise une exposition qui fera date : 1925, quand l’Art Déco séduit le monde … Je ne pouvais la manquer.

En réalité, j’y ai emmené Claude samedi après-midi et il y avait beaucoup de monde, beaucoup d’objets, beaucoup de panneaux très intéressants, mais pas assez d’air autour.

  

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Je me suis vengée en achetant le catalogue, et me voilà complètement plongée dans dette période si courte et si fructueuse de l’excellence française, un moment de grâce coincé entre la reconstruction d'après la Grande guerre et la plongée dans la Grande dépression.

C'est cette grande toile évoquant la vigne et le vin (par Jean Dupas) qui ouvre le grand hall, avec la superbe Bugatti noire vernie : charmant contraste.

La transition entre l’Art Nouveau et l’Art Déco fut assez rapide. Elle passa par les artistes autrichiens hostiles à l’ornement, comme Adolf Loos ou Josef Hoffmann. Elle proclame une nature stylisée influencée par le cubisme, la fureur de vivre à nouveau après les horreurs des tranchées, le jazz, découvre et diffuse l’Art Nègre, l’émancipation de la Femme, les créations des grands couturiers parisiens, la révolution technologique des transports individuels et collectifs, de nouvelles techniques de construction audacieuses et l'utilisation massive de matériaux novateurs (le béton armé), les distractions de masse comme le cinéma et le tango.

ferronnerie Brandt
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C’est l’Exposition internationale des arts décoratifs et industriels modernes ouvrant ses portes le 28 avril 1925 à Paris qui donne le ton. Elle avait été initialement programmée pour 1916. Elle se tient dans les jardins qui bordent la Seine, de la place de la Concorde au Pont de l’Alma, du rond-point des Champs-Elysées aux Invalides, son portail d’honneur joignant le Grand et le Petit Palais, vestiges de l’Exposition Universelle de 1900. Cette exposition thématique aura elle aussi un très grand succès et un immense rayonnement dans le monde entier.

La France y réunit tout ce qui se fabrique de plus original et de plus novateur dans le monde. Mais surtout dans le bon goût français ... Les grands magasins parisiens – la Samaritaine, le Printemps, les Galeries Lafayette, les magasins du Louvre et le Bon Marché - y tiennent salon, les plus grands architectes présentent leurs réalisations tandis que tous les arts décoratifs donnent leur meilleur : porcelaine, cristaux, bijoux, ameublement, orfèvrerie, luminaires, tapisseries, sculptures, peintures, décoration … 150 pavillons présentent le travail de 20 000 personnes.

pavillon du PrintempsSauvage
ruekussExpert
rueLaFontaineSauvage

Aujourd’hui, l’Art Déco en France n’a plus trop la cote. A part chez quelques vieilles toupies comme moi. Le Grand Rex, l’hôtel Splendid de Dax, les merveilleux immeubles d’habitation de Michel Roux-Spitz, l’architecture altière et fonctionnelle de Jean Walter, Tony Garnier, Robert Mallet-Stevens, Roger-Henri Expert, Pierre Patout, Sauvagé, les meubles de Jacques-Emile Ruhlmann, les ferronneries d’Edgar Brandt, les couverts de Puyforcat …

Sans parler de la diffusion internationale de l’art français : dans les colonies, évidemment, mais aussi à New York (Chrysler Building, Rockefeller Center …), Shangaï, Toronto, Tokyo, Rio de Janeiro avec l’immense Christ rédempteur qui domine le Corcovado, sculpté par Paul Landowski. Une sacré époque, dont la mode disparut avec la seconde guerre mondiale, terrassée après les hostilités par la vogue nouvelle pour le minimalisme austère, cher à Le Corbusier et Oscar Niemeyer, qui donnera bientôt naissance aux « grands ensembles ».

L’exposition nous transporte dans cet autre temps, celui des romans de Somerset Maugham, de Patricia Wentworth, dans les coursives des transatlantiques, à bord de torpédos pétaradantes ou enfouis dans un immense fauteuil club au fumoir des Premières classes du paquebot Normandie … En fait, ce décor, je le connais, c’était celui du mobilier de mes parents qui se marièrent en 1932 et connurent la forte présence française au Maroc avant la guerre, mais qui n’eurent de cesse, dans les années 60, d’en changer …

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En revanche, ces meubles redeviennent furieusement à la mode aujourd'hui ...

1925, quand l’Art Déco séduit le monde, exposition à la Cité de l’Architecture et du Patrimoine (Palais de Chaillot) jusqu’au 17 février, tous les jours sauf le mardi, 9€


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