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Yeruldelgger de Ian MANOOK

Par Lecturissime


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♥ ♥ ♥ ♥

Un premier roman remarquable !

L’auteur :

Ian Manook a sûrement été le seul beatnick à traverser d'Est en Ouest tous les États-Unis en trois jours pour assister au festival de Woodstock et s'apercevoir en arrivant en Californie qu'il s'ouvrait le même jour sur la côte Est, à quelques kilomètres à peine de son point de départ. C'est dire s'il a la tête ailleurs. Et l'esprit voyageur !
Journaliste, éditeur, publicitaire et désormais romancier, Yeruldelgger est son premier roman, et le premier opus d'une série autour du personnage éponyme qui nous conduit des steppes oubliées de Mongolie aux bas-fonds inquiétants d'Oulan-Bator.
Il vit à Paris.

 Interview ici : http://www.unwalkers.com/entretien-entretien-qui-me-tiens-ian-manook-du-pur-delire/

L’histoire :

Le corps enfoui d’une enfant, découvert dans la steppe par des nomades mongols, réveille chez le commissaire Yeruldelgger le cauchemar de l’assassinat jamais élucidé de sa propre fille. Peu à peu, ce qui pourrait lier ces deux crimes avec d’autres plus atroces encore, va le forcer à affronter la terrible vérité. Il n’y a pas que les tombes qui soient sauvages en Mongolie. Pour certains hommes, le trafic des précieuses « terres rares » vaut largement le prix de plusieurs vies. Innocentes ou pas.

Dans ce thriller d’une maîtrise époustouflante, Ian Manook nous entraine sur un rythme effréné des déserts balayés par les vents de l’Asie Centrale jusqu’à l’enfer des bas-fonds d’Oulan-Bator. Il y avait la Suède de Mankell, l’Islande d’Indridason, l’Ecosse de Rankin, il y a désormais la Mongolie de Ian Manook !

Ce que j’ai aimé :

L’inspecteur Yeruldelgger est un homme brisé par la mort de sa petite fille Kushi, un homme rongé par la culpabilité, haï par son autre fille Sara qui l’accuse d’être à l’origine de la mort de sa sœur et de la folie de leur mère. Quand un vieil homme lui confie l’âme d’une petite fille dont le corps vient d’être retrouvé enfoui avec son tricycle, il se jette corps et âme dans l’enquête, comme pour expier. Mais ses fantômes le rattrapent rapidement, tenaces. Il lui faudra alors puiser dans l’enseignement des moines du monastère de Yelintey, qu'il a fréquenté enfant sur les conseils de son père qui souhaitait préserver les traditions après la destruction des monastères par le régime.

« Les anciens affirmaient encore à voix basse, se méfiant des délateurs et des espions, qu’un seul moine avait réchappé à la razzia des révolutionnaires et continuait à enseigner, dans les ruines du temple, une pensée plus pure et plus limpide encore que le bouddhisme le plus intransigeant. Il se disait aussi que par deux fois les révolutionnaires étaient revenus en force pour revendiquer définitivement le superstitieux et que par deux fois ils avaient été défaits par ce que le seul survivant avait qualifié de force invisible et mystérieuse. » (p. 194)

Ian Manook nous montre ici une Mongolie partagée entre traditions et modernité, gangrénée par un nationalisme violent. Les traditions se perdent à Oulan Bator :

« Nous avions des espaces immenses, des coutumes et des légendes séculaires, et regarde ce que nous sommes devenus !

- C’est ce que la vie a fait de nous ! soupira la femme.

- Non, c’est faux, la vie ne fait rien de nous. A vie, c’est nous uqi la faison, à coups de renoncements, peurs, abandons, tricheries, colères ! C’est nous qui nous  empêchons d’en faire autre chose que ce qu’elle est. » (p. 480)

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© Pichugin Dmitry - Shutterstock

Dans les steppes néanmoins, les vieillards enseignent les traditions aux plus jeunes pour que ne meure pas l'esprit séculaire de la Mongolie. Yeruldelgger est un personnage qui tente de faire la jonction entre ces deux mondes, entre la violence qu'il cotoie au quotidien et l'âme de la Mongolie, faite de rites et animée par un souffle puissant et salvateur.

L’enquête que  mène Yeruldelgger, aidé par Solongo, médecin légiste et par Oyun son adjointe, le confronte à des groupuscules nazis, à des chinois en colère, à des hommes avides de pouvoir et d’argent, pour qui une vie humaine a bien peu de prix.

De rebondissements en secrets enfouis, le rythme se fait haletant pour ce thriller passionnant, époustouflant, pour un premier roman ! A lire absolument. 

Ce que j’ai moins aimé :

- Rien.

Premières phrases :

« Yeruldelgger observait l’objet sans comprendre. D’abord il avait regardé, incrédule, toute l’immensité des steppes de Delgerkhaan. Elles les entouraient comme des océans d’herbe folle sous la houle irisée du vent. Un long moment, silencieux, il avait cherché à se convaincre qu’il était bien là où il se trouvait, et il y était bien. »

Vous aimerez aussi :

 Du même auteur : sous le pseudo de Patrick Manoukian "Le temps du voyage, petite causerie sur la nonchalance et les vertus de l'étape" chez Transboréal ; sous le pseudo de Paul Eyghar "Les Bertignac" chez Hugo et cie.

Pour la suite des aventures de Yeruldelgger ce sera peut-être début 2014. On croise les doigts...

AutreLe dernier lapon d’Olivier TRUC ; Les roman de Galsan Tschinag :  Ciel bleu : une enfance dans le Haut Altaï de Galsan TSCHINAG

D’autres avis :

 Yves tout aussi enthousiaste... 

Yeruldelgger, Ian Manook, Albin Michel, octobre 2013, 542 p., 22 euros


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