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Lee Ufan, en quête d’universel

Publié le 26 novembre 2013 par Pantalaskas @chapeau_noir

Ce n'est pas d'une exposition qu'il sera question ici. Pourtant l'artiste Coréen Lee Ufan occupe à lui seul les deux espaces de la  galerie Kamel Mennour  à Paris, celui de la rue Saint-André-des-Arts et celui de la rue du Pont de Lodi récemment pris en charge par le galeriste. Au sous-sol de la rue du Pont de Lodi quelque chose se passe. Exposition ? Impossible d'abandonner cet espace à l'envahissement d'un vernissage, avec le bruit, l'agitation coutumière  propres à ce genre d' événements.

Ufan Mennour2

Lee Ufan, galerie Kamel Mennour 2013

Recueillement

Non c'est autre chose qu'il faut aborder avec précaution, discrétion  voire recueillement. Une fois immergé dans ce lieu, le ton de la voix baisse, le discours s' estompe.  Car c'est bien dans un lieu de méditation que l'on pénètre avec retenue, alors que crisse sous nos pas le gravier blanc qui tapisse le sol de ce temple étrange. Deux sons provenant de cloches, l’un naturel, l’autre électronique se propagent sans vacarme dans  le volume de la salle, ajoutant  une couleur particulière à ce lieu propre à la sérénité. Une mise en lumière douce et modulée achève la mise en condition du visiteur.
"Ce que nous voyons ici est une question posée à l'idée de civilisation" affirmait déjà au Guggenheim de New-York l'artiste Lee Ufan en 2011. Lee Ufan, écrivain et philosophe, trouva le chemin de la création artistique à travers un mouvement, le Mono-Ha (l’école des choses) dont il est d’abord le théoricien.
Au milieu de cette scène, le visiteur  ne se meut pas avec une liberté insouciante. Il devient soudain partie intégrante d'un univers qui s'impose à lui.  Trois monolithes induisent par l'interaction de leurs masses respectives, un mystère. Nous ne sommes ni à Stonehenge ni à Carnac. Pourtant  la question se pose : temple, monument funéraire, symbolique astronomique ? Ce geste minimaliste suffit à nous interpeller sur l' énigme de son apparition. Privilégié ce moment ?  Peut-être faudrait-il  prendre ce terme de "moment"  dans son acception en sciences physiques davantage qu'en valeur temporelle.
Trois autres éléments sont placés comme en réponse à la configuration des monolithes. Dans deux rectangles apparaît une trace de pinceau de peinture grise. Sur ces toiles, que l’artiste a travaillé à plat, selon sa pratique rituelle,  il a ensuite disposé une couche de sable ocre. Le troisième rectangle reste uniformément ocre.

"Less is more"

A l'opposé d'un Niele Toroni dont les Empreintes de pinceau n°50 répétées à intervalles réguliers de trente centimètres assenaient au spectateur la volonté de l'artiste de désigner infatigablement la peinture comme un travail, Lee Ufan avec cette trace unique, minimale, inscrit son geste dans un rituel  tendu vers l' élémentaire.
A la croisée des chemins entre Arte Povera, Land art, Art concret et Art minimal, Lee Ufan propose une nouvelle approche du "Less is more" avec sa façon de «  poser et disposer plutôt que créer, privilégier le rare et le peu. ».

Ufan musée de la chasse

Lee Ufan "Relatum, Le Repos de la Transparence" 2013
Acier, verre, pierre
Musée de la chasse et de la nature, Paris

Ici et maintenant en France, à Paris, sommes-nous en mesure d'appréhender la démarche d'un artiste totalement imprégné de la culture et des valeurs d'un Orient qui  nous est étranger ?  C'est à travers cette recherche fondée sur la simplicité des éléments  que Lee Ufan  peut nous permettre d'accéder au mystère commun de notre existence, de notre présence sur terre, tout cela sans implication religieuse, sans discours dominateur mais avec quelque chose échappant aux mots, faisant appel à une relation au monde revisitée. Au sous-sol de la rue de Lodi, ce moment privilégié ne ressemble pas à une visite d'exposition. Il est un moment indicible en quête d'universel.

Lee Ufan sera le prochain invité du Château de Versailles en 2014

Photos: Galerie Kamel Mennour (Photo musée de la chasse :Fabrice Seixas)

Lee Ufan

Galerie Kamel Mennour
06 novembre-21 décembre  2013
Paris 6e.
6 rue de

Pont de Lodi
75006 Paris


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