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Rencontre avec Alexis Mabille

Publié le 03 décembre 2013 par Littlestylebox

alexis mabille


C'est au détour d'un petit déjeuner au célèbre salon de thé Angelina que nous avons eu le plaisir d'interviewer Alexis Mabille. C'est dans ce lieu historique qu'il organisa son premier défilé en 2008 et, comme pour illustrer ce retour aux sources, le créateur nous a fait part de sa vision de la mode, de ses préférences et aussi du chemin qu'il a parcouru jusque là.
Quel est votre parcours en quelques dates clés?
Après 10 ans au sein de la Maison Dior, j’ai voulu créer quelque chose de personnel car je trouvais qu’il n’y avait pas grand-chose en mode masculine. Au départ j’achetais des vêtements de femmes que je customisais parce que je ne trouvais pas forcément mes mensurations ailleurs.
J’ai donc fondé ma maison en 2005 et axé mes collections sur des pantalons à la coupe masculine. Je souhaitais avant tout ouvrir les possibilités du vestiaire de l’homme à la femme. Ce concept a cartonné en Asie. Ensuite je me suis mis a créer des nœuds papillon, et même si tout le monde trouvait ça ringard avant, le concept a également très bien pris.
En 2008, j’ai donc fait mon premier défilé chez Angelina et grâce à cet énorme succès le développement de ma marque a été assez rapide. Les clients ont avant tout apprécié la mixité présente dans les collections, les chemises femme taillées sur un homme par exemple.

alexis mabille


Après cette collection, les clients m’ont demandé des vêtements de prêt-à-porter façon haute couture. Du coup, mon premier défilé haute couture a vu le jour en 2011 et j’ai eu affaire à une clientèle complètement différente. Le prêt-à-porter concerne plutôt les vêtements de vie, alors que la haute couture est plus complexe au niveau de la coupe, c'est plus méticuleux. Aujourd’hui je travaille de plus en plus pour les hommes en créant des costumes sur mesure. C’est de la haute couture comme dans le temps, je travaille directement avec les clients, redessine les vêtements si besoin selon les exigences, passe des heures et des heures sur une pièce et travaille avec une équipe de 13/14 personnes. Mes clients principaux viennent de l’Arabie saoudite, d’une partie de l’Asie et de la Russie.
Qu’est-ce qui vous a donné envie de devenir un créateur ?
Je dessine depuis tout petit. Au départ je voulais devenir costumier de théâtre mais j’ai changé d’avis après un stage a l’opéra de Lyon pendant lequel je me suis terriblement ennuyé. Par la suite j’ai fait de la restauration de costumes puis j’ai commencé à faire des vêtements moi-même. J’ai toujours voulu avoir ma boîte et c’est à Lyon qu’une clientèle provinciale a commencé à se constituer. Après avoir été longtemps chez LVMH j’ai tout plaqué sur un coup de tête et ai commencé à passer des journées entières à faire mes pièces. J’étais omnubilé par cette idée puriste de fitting. C’est un peu moins le cas aujourd’hui même si je travaille encore les bases de pantalon sur mes premiers modèles. J'ai eu beaucoup de chance en faisant la chambre syndicale de la couture à Paris et j’ai surtout bossé comme un fou. Chaque saison est un nouveau challenge et les clients sont de plus en plus exigeants. Le plus difficile est lorsqu’une maison commence à bien vendre car comme elle n’est plus vraiment jeune on ne lui pardonne plus rien. Le mieux à faire est de vendre petit à petit et pas trop au début. Quand on a sa boîte il est important d’avoir les pieds sur terre, il faut se tenir au courant de tout ce qu’il se passe. C’est très satisfaisant de voir que ce que l’on fait est une réussite. Mon métier est passionnant, je suis indépendant et je sais ce que j’ai à faire.

alexis mabille


Quel est votre processus de création ?
L’essentiel de mon travail vient de mes dessins. J’ai toujours des feuilles et des crayons sur moi, je dessine souvent en voyage quand je m’ennuie dans les avions ou les hôtels. Même si mon esprit divague et que mes dessins partent dans tous les sens, je réfléchis toujours en termes de garde-robe. Ensuite je trie et fais une pré sélection pour construire l’histoire de mes collections au fur et à mesure. J’adore ce côté instinctif et non réfléchi. Je reste néanmoins très technique, tous mes dessins sont réalisables. Je couds moins qu’avant mais j’essaye quand même de m’accorder du temps pour confectionner de A à Z au moins une robe par collection, histoire de garder la main et de conserver ce regard technique sur mes créations. J’ai une équipe de modélistes à qui j’explique ces dessins et c’est intéressant de voir comment ils interprètent le vêtement. C’est un travail de “comédien” puisque ça dépend de la sensibilité de chacun.
Où sont fabriqués vos produits ?
Énormément de produits sont fabriqués en France en fonction des artisans disponibles, mais beaucoup d’usines ont fermé, malheureusement le métier se perd. Tout ce qui est embellissement, travail raffiné sur la maille et le sportswear se fait en externe.

alexis mabille


Quels sont vos produits phares, vos best of ?
Je dirais que mon produit phare est la veste de smoking avec le col nœud. Ce col est présent depuis ma toute première collection en 2005, il représente bien la marque. J’aime avant tout la dégaine masculine qu’il apporte, et le fait de pouvoir le twister avec une chemise de soie souple, un soutien gorge noir ou rouge, le tout agrémenté d’un nœud papillon porté de manière décontractée. Ce qui me plaît c’est ce coté frivole et léger avec des codes classiques qui déraillent avec la sensualité. Mon amie Dita Von Teese m’a même dessiné un soutien gorge ! Le nœud est ce qui a vraiment lancé ma marque, c’est à partir de ça que j’ai commencé à faire du business. Après ma première collection j’ai eu plus de 3500 nœuds en commande et je ne savais même pas où les faire, j’ai dû passer des nuits à en faire moi-même. Le changement de look entre générations est une raison pour laquelle aujourd’hui les hommes reportent des nœuds papillon. C’est aussi une envie de raffinement en toute simplicité si on associe par exemple le noeud avec un jean.
Comment définissez-vous votre style ?
Je fais ce qui me plaît, je fabrique ce que j’ai envie et ce que je me vois porter. Mes clients recherchent avant tout le coté couture, avec beaucoup de dentelles et un travail minutieux, ce qui fait que j’ai beaucoup de clients en Asie. Je dirige davantage l’homme sur du sur-mesure que sur du prêt-à-porter, avec l’idée à long terme d’arrêter certains types de produits et d’avoir des clients sur rendez-vous, ce qui se rapprocherait même de l’idée du tailleur. J’ai la structure pour le faire, beaucoup de clients me demandent des requêtes très spécifiques et je bascule peu à peu dans ce monde.

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Qui incarne à vos yeux l’élégance masculine/féminine?
Si je devais choisir une femme qui représente l’élégance c’est Catherine Hepburn car elle a cette allure hyper féminine qui contraste avec une attitude de mec. J’aime également Dita Von Teese qui est avant tout une pin-up, ça revient à sublimer la féminité à son paroxysme la plus totale. En homme, la question est beaucoup plus difficile, je ne trouve pas forcement qu’il y ait quelqu’un qui incarne l’élégance masculine sauf peut être Louis-Marie Castelbaljac. C’est un homme qui a une belle sensibilité, une belle allure et des manières parisiennes et il incarne très bien ce mix d’époques.
Paris a-t-elle de l’importance dans votre travail ?
Oui, j’adore Paris, je suis très chauvin! Je n’aime pas la campagne et préfère la ville. Je passe beaucoup de temps à arpenter les rues, à découvrir cet incroyable patrimoine. Il y a énormément de choses à faire ici, beaucoup de rassemblement de gens, il faut participer à l’action de la ville. Je ne saurais pas vraiment dire pourquoi mais apparemment ma marque a un style très français. C’est peut être une question de look, le mélange de choses très féminines portées d’une certaine manière, le coté sale gosse avec une allure chic, les couleurs, les proportions.... Peut-être que ça vient de la caricature que les gens font de la mode française.

alexis mabille


Encore une fois un grand merci à Alexis Mabille pour le temps qu'il nous a accordé !

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