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Le journal d'une attente

Publié le 18 novembre 2013 par Arty

Gallay Claudie

ROMAN  

Mercredi 
20 novembre
2013

Rouen

La romancière Claudie Gallay revient à l’Armitière avec une belle histoire tutoyant les sommets enneigés.

Dans « Une part de ciel », Claudie Gallay renoue avec son goût pour les natures sauvages et les rudes saisons qui dictent leur rythme et leur loi aux hommes. L’auteur des Déferlantes offre un roman de l’attente et des possibles, porté par une plume intense, intime et incisive. Une subtile mise en scène des passions, des silences et des liens familiaux parfois chargés de secrets.

Une part de tciel

Début décembre, Carole revient au Val, le village de son enfance dans le massif de la Vanoise où elle retrouve son frère et sa soeur. La fratrie attend le retour d’un père fugace qui leur a donné rendez-vous, sans préciser la date de son arrivée.  Au fil des jours et de l'attente, la narratrice renoue avec ses proches, ses souvenirs... et tente de retourner à l'essentiel.

Le Val-des-Seuls, le nom du village renvoie à chacun des personnages, qui, s’ils cherchent leur part de ciel, ont tous leur part de solitude ?

Claudie Gallay : « Mes personnages sont en quête de bonheur, d'absolu, et chacun a en lui, sa pépite magnifique, ce cristal de poésie qui l'aide à survivre, à avoir envie de demain. Pour Diego, c'est son amour caché pour Gaby. Carole est seule, elle revient sur ses terres de naissance, ses deux filles ont quitté leur nid, leur père est parti, elle est disponible, dans un moment de pause, et c'est ce qui fait sa grande force d'écoute. Elle accepte de mettre à jour ses failles. Retrouve un flirt d'enfance. C'est parce qu'elle ne triche pas sur sa solitude qu'elle va pouvoir avancer et renouer les liens avec sa soeur.

C’est un roman de l’attente, des non-dits, de l’observation, de la quête intérieure ?

« Un roman de la résilience et de l'amour à nouveau possible, de l'entente et de l'apaisement du passé. Le père est absent, il a fait miroiter à ses enfants devenus adultes un retour possible, il leur demande de l'attendre. Comment raconter cela ? Quel rythme donner à l'écriture ? Le quotidien est essentiel, les lumières, les odeurs, le partage du thé, des repas, les regards qui remplacent des longs discours, les gestes qui révèlent de profondes tendresses. C'est le chemin que l'on fait qui est important pas le but atteint, dit Christo.[Pendant son séjour, Carole traduit une biographie de l'artiste]. J'ai eu envie d'écrire ce roman sans tricher, en suivant Carole dans les détails infimes de son quotidien, rester sur la lisière de l'intime pour la rendre proche, humaine, universelle. Au fil des pages, elle comprend son passé. On la voit s'apaiser dans l'observation du monde et des hommes. A la fin du roman, elle a perdu quelques illusions mais elle a repris sa vie en main ».

Est-ce intentionnel de proposer une écriture épurée, une façon de s’approcher au plus près de l’âme des personnages ?

« Il ne suffit pas de raconter une histoire, il faut aussi choisir une langue. Pour dire l'attente, il me fallait un vocabulaire qui colle à l'âme des personnages, qui l'imprègne et en extirpe la beauté. Mes personnages sont taiseux, Carole est obsessionnelle, mon écriture ne les juge pas, mais reste très attentive à eux, elle les creuse jusqu'aux plus proches détails. C'est la retranscription minutieuse de leur quotidien qui permet d'incarner cette fratrie, de rendre palpable ce questionnement qu'est l'amour maternel parfois inégal, de percevoir sous les apparences, les vrais sentiments, les détails encore qui permettent d'approcher la Môme et Marius, les deux enfants presque silencieux du roman et qui sont les ravaudeurs précieux des douleurs des adultes ».

Il y a beaucoup de thèmes dans le « décor » de cette histoire, d’abord la montagne, mais aussi Hannibal, Christo, la botanique, l’amour des animaux… comment vous viennent les éléments qui gravitent autour de l'histoire?

« Les éléments viennent avec l'écriture, ils montent des personnages. Philippe s'est imposé comme un amoureux du parc, un protecteur des chemins, un historien d'Hannibal, il en a le corps, la stature. La Baronne a tourné le dos aux hommes pour sauver les chiens, Sam restaure un herbier qui laisse la trace du temps qui passe... La montagne crée des gens comme cela, des sensibles, cabossés de la vie. La nature, dans ce roman, est très importante, sauvage, enneigée, elle a conditionné l'humeur de mes personnages ».

L’histoire de Vera, avec ce passage clandestin d’une frontière en passant sur un lac gelé, est-ce une invention de votre imaginaire ou tiré d’un fait divers réel ?

« Une invention littéraire, mais je vivais dans mon enfance près d'un lac qui gelait l'hiver et sur lequel j'aimais à me hasarder. Arrivée au milieu, je cherchais à voir ce qui était englacé. Un hiver, j'ai vu un ballon pris sous l'épaisseur et j'ai été profondément choquée. Ce n'était qu'un ballon pourtant... Cette scène du roman est sans doute une réminiscence ». 

Rencontre avec Claudie Gallay
Mercredi 20 novembre, 18 h

armitiere logo

Librairie l'Armitière 88 rue Jeanne-d'Arc, Rouen

« Une part de ciel »
Claudie Gallay
Editions Actes Sud, 446 p. 22 € 


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