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Ali Rebeihi, passeur d’idées

Publié le 08 décembre 2013 par Oz

Ne pas chercher son profil sur Facebook. Ne pas vouloir consulter sa fiche Wikipédia. Ne pas aspirer non plus à devenir son follower sur Twitter. Inutile. Contre toute attente, Ali Rebeihi n’est pas homme à fréquenter ces réseaux. C’est un choix. A la frénésie des agoras électroniques, tumultueuses et bruyantes, des grands carrefours numériques, des foules digitales, il préfère l’atmosphère tamisée des bibliothèques et la compagnie silencieuse des livres. On ne lui connaît qu’un seul réseau : Babelio.com, le rendez-vous des lecteurs et des bibliophiles….


LE MONDE TELEVISION | 29.11.2013 à 16h50 • Mis à jour le 03.12.2013 à 15h22 |Par Olivier Zilbertin


… A le voir mener les débats de « Viens dîner dans ma cité » sur France 4 – qui diffusera jeudi 5 décembre un best of de l’émission –, à entendre le débit un peu rythmé de sa parole sur France Culture le dimanche soir dans « Du côté de chez soi », on aurait pourtant parié que ce quadra débutant (il a soufflé ses quarante bougies en juillet) était plutôt branché textos et messagerie instantanée. Profil enfant de la télé sur IP, zappeur patenté et jongleur multimédia. Raté.

A la table des Editeurs, le restau-bibliothèque d’Odéon, on apprend qu’Ali Rebeihi cultive avant tout le goût des livres et du temps long, nécessaire à la bonne circulation des idées, à la transmission intégrale du savoir. Qu’il s’est rêvé trop vite en grand reporter sur l’antenne de BFM TV en 2006, mais que l’aventure tourna court. « Pas assez rapide », selon lui. A la rédaction de France 2, en 2005, pour « Télé Matin », il n’en a pas moins appris à travailler vite et tôt. Avant de se lancer « tardivement » dans le journalisme, il a poursuivi des études de droit et passé une licence de sciences politiques.

PROFIL TAILLÉ SUR MESURE

Sur son curriculum vitae on peut lire, entre autres choses, qu’il fut chroniqueur dans « Vous aurez le dernier mot », présenté par Franz-Olivier Giesbert, sur France 2, et à « La Matinale » de Canal+ ; que sur France Inter il présenta « Micro Fictions » et fut le joker de Pascale Clark pour « Comme on nous parle ». Quand la production de « Viens dîner dans ma cité » a cherché un présentateur incarnant la diversité, son nom s’est rapidement imposé. Profil taillé sur mesure.

Avec ses parents originaires d’Algérie, Ali Rebeihi a grandi dans une cité de Toulouse. Vue imprenable sur les grandes cheminées de l’Office national industriel de l’azote, l’ONIA, que l’on n’appelait pas encore AZF. Une petite cité populaire, sans histoire selon lui, mais qui fait remonter à la surface de sa mémoire des relents d’odeurs azotées et des nuages ocre.

Ali est l’aîné d’une fratrie de cinq. Maman est dame de service dans une école, divorcée de papa chauffeur routier. Sans le savoir, la mère va pratiquer la version toulousaine du « bussing », qui consiste, outre-Atlantique, à véhiculer les enfants des quartiers populaires vers les bonnes écoles des quartiers plus huppés. L’aîné fréquente ainsi le collège et lycée Bellevue au centre-ville. Il lit beaucoup, écoute la radio, écrit aux chroniqueurs du « Masque et la Plume », Jérôme Garcin et Jacques Siclier, en particulier. Quelques années plus tard, c’est le même Jérôme Garcin qui le prend sous son aile et lui met le pied à l’étrier sur les ondes de France Inter. « C’est un peu mon père spirituel », confie Ali Rebeihi. « Sachant d’où il vient, c’est une vraie belle histoire que celle d’Ali », commente pour sa part Jérôme Garcin.

De sa banlieue, Ali Rebeihi n’a pas rapporté d’appétence particulière pour le rap ou les cultures urbaines. Il a fait sienne la phrase du metteur en scène Antoine Vitez, « l’élitisme pour tous », et n’aime rien tant que sentir « la vie qui circule dans un débat ». A la table des cités où sont venus dîner les hommes politiques durant l’année, il a occupé en quelque sorte un poste d’observation privilégié. Il admet que l’armure des invités s’est rarement brisée, que le verrou de la communication n’a pas souvent sauté. Il retient que Jean-Luc Mélenchon, coprésident du Parti de gauche, a vraiment baissé les armes face à un braqueur handicapé ; que la parole engoncée de Najat Vallaud-Belkacem, ministre des droits des femmes, s’est libérée peu à peu au fil du repas ; et qu’un vrai débat a pu se tenir avec le vice-président du Front national, Florian Philippot. Il se demande toutefois si la classe politique se rend compte de la « profonde dépression » dans laquelle est englué le pays : « Je n’ai pas toujours l’impression qu’ils mesurent réellement la souffrance morale et la décomposition de la France, regrette-t-il. Alors que tout s’effiloche devant nos yeux. » Pour la première fois de sa vie, Ali Rebeihi ne sait pas s’il ira voter la prochaine fois.

Désabusé ? Sans doute, car il envisage sérieusement de donner une autre tournure à sa carrière. A 40 ans, cette figure montante du paysage audiovisuel veut désormais devenir prof d’histoire-géo. Un projet longuement mûri, qu’il envisage de mener de front avec sa carrière de journaliste.

JOURNALISTE

22 JUILLET 1973 NAISSANCE À TOULOUSE

2001 JOURNALISTE SUR RTL

2007 ENTRE À FRANCE INTER

2012 « VIENS DÎNER DANS MA CITÉ » SUR FRANCE 4

2013 « DU CÔTÉ DE CHEZ SOI » SUR FRANCE CULTURE


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