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17 mai, journée mondiale contre l’homophobie, retour à Bondy

Publié le 08 juin 2007 par Jean-Paul Chapon

Homophobie à l’école, injures, sale pédé, enculé, hou la gonzesse, homophobie dans l’entreprise, harcèlement, ricanements, mise à l’écart, barrage de carrière, homophobie dans la cité, injures, menaces, agressions, de nombreux témoignages de chacun des intervenants, chacun dans leur sphère d’intervention, et au fil des échanges avec le public clairsemé lundi 14 mai au soir à Bondy. Sans oublier le rappel des extrêmes, l’Espagne où on marie les gays, et l’Iran où on les tue, comme ces deux jeunes pendus pour homosexualité il y a deux ans.

La lutte contre l’homophobie fait des progrès, chez nous, pas en Iran. Pas en Pologne, malgré les avancées garanties par l’Union Européenne. En France, il faut rappeler par exemple la création de la HALDE (Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour l’Egalité). Des constats surprenants aussi : il est plus facile de porter plainte pour une agression homophobe au commissariat aujourd’hui que de dénoncer une attitude homophobe sur son lieu de travail. Au commissariat, cela n’a pas d’importance, on ne fait que passer, mais dans son entreprise, dénoncer une attitude homophobe, c’est « s’avouer » homosexuel. Et après, le risque que cela devienne pire. Résultat, il n’y a que très peu de plaintes aujourd’hui, comme le rappelait Catherine Tripon de l’Autre Cercle.

Un point de désaccord particulièrement intéressant entre les intervenants qui ramène à Paris est sa banlieue. L’homophobie est-elle plus forte en banlieue, entendez dans les cités, qu’ailleurs en ville ? Un sujet qui revient souvent dans la presse, comme récemment dans Libération : la banlieue homophobe. Et là deux attitudes des intervenants. Ceux qui reconnaissent que s’il y a peut-être un peu plus d’homophobie dans les quartiers difficiles, ce n’est pas significatif, et que plutôt que de faire une distinction banlieue ville « normale », il vaut mieux analyser le problème qui est celui de l’éducation. La lutte contre l’homophobie, ça démarre très tôt, à l’école. Effectivement, on constate que dans les classes homophobie et misogynie vont de pair. Et dans celles où il n’y pas d’attitude misogyne, il n’y a pas d’attitude homophobe. C’est la position qui était particulièrement représentée par deux des intervenants présents dans le milieu scolaire, Philippe Castel de la FSU et Hélène Frohard-Dourled de l’associations Le Mag’ - Jeunes gays et lesbiennes dont les interventions en milieu scolaire sont intéressantes et essentielles pour aider les jeunes à prendre conscience.

Et puis en face une autre voix, qui met en garde. Nasser Ramdane de SOS Racisme explique qu’il est plus facile aujourd’hui pour un maghrébin d’être gay en Afrique du Nord que dans une cité de banlieue, parle du poids de la famille et soudain s’élève contre l’aveuglement de ceux qui au nom du politiquement correct, ou d’un tiers-mondisme dévoyé sont prêts à défendre l’indéfendable, le risque du « fascisme vert », des prêcheurs islamistes qui inculquent dans les cités, homophobie et misogynie. Et de citer les Pays-Bas où les concessions faites aux islamistes débouchent sur un assassinat d’un Theo Van Gogh et renvoient des homosexuels vers l’extrême-droite. Musulman, il parle aussi des autres religions monothéistes, également homophobes, mais moins virulentes aujourd’hui. Harlem Désir de son côté élargit le débat en faisant remarquer que chez de jeunes antillais, non musulmans, la même homophobie se retrouve dans les quartiers. Pour moi, elle fait sans aucun doute d’une culture machiste, basée sur la force physique, sur l’apparence et l’affrontement qui se développe dans certaines bandes de quartier. Une homophobie non pensée, mais qui assimile homosexuel et fille dans la même homophobie-misogynie.

Ce qui était particulièrement intéressant dans cette opposition, c’est qu’à ne pas vouloir dénoncer ce qui doit l’être, ici l’homophobie chez certains dans les quartiers, de peur que la dénonciation juste ne se transforme en amalgame et stigmatisation de l’ensemble des quartiers. Paradoxalement, on en arrive à nier une réalité dont on se prive de combattre certaines causes qui se rencontrent pour se renforcer : une forme de culture de garçons des cités basée sur la force et la misogynie, un terreau favorable pour la manipulation des islamistes.

Mais quartiers ou entreprises, tous tombent d’accord sur un point, la solution passe par l’éducation. Education comme moyen de prévention, faire comprendre l’autre et sa différence, apprendre à vivre ensemble et à accepter l’autre, le plus tôt possible, un peu comme on le fait aujourd’hui pour la lutte contre la pollution ou contre la violence routière. Education aussi pour l’entreprise, à travers des séminaires, notamment envers les DRH que l’Autre Cercle en organise.

Un débat trop court, des oubliés comme les skins, bien blancs mais tout aussi violents et homophobes, la banlieue violente peut aussi être blanche, comme les chefs de bureaux qui peuvent transformer en enfer la vie d’êtres humains, pas meilleurs qu’eux, mais pas pires, simplement parce qu’ils sont gays, lesbiennes ou trans ! Gilbert Roger qui accueillait le débat dans sa mairie de Bondy souhaitait qu’un jour, il n’ait plus à le faire parce que l’homophobie comme les autres discriminations aurait disparu. Aujourd’hui, l’espace d’une journée on peut rêver comme Gilbert Roger.


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