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Quelle place pour le secteur informel dans les politiques d’emploi ?

Publié le 24 décembre 2013 par Wilntonga

Disons le d’emblée, une très faible place. Le secteur informel en Afrique est un raccourci que les citoyens se sont données las d’attendre que l’Etat mette en place les choses. Il n’est pas une solution, il est une option malheureuse qui perfuse les vies et qui devrait céder la place aux véritables aspirations.

C’est toujours avec colère que j’aborde la question du secteur informel. Parce qu’il est une confusion dont la responsabilité incombe UNIQUEMENT aux politiques. J’ai travaillé sur ce secteur pendant plusieurs années, lu de nombreux ouvrages et participé à des études là dessus et la seule vraie conclusion est que c’est une grossièreté dont les politiques devraient avoir honte. Clarifions quelques points.

Le secteur informel, comment le connaissons, au delà des mots ?
Nous le connaissons au travers de tous ces petits métiers sans règle, nés de l’imagination de milliers de personnes en quête d’emplois ou plein d’idées et n’ayant pas de cadres pour les exprimer. Le secteur informel, c’est ce chauffeur de taxi sans aucune autorisation, c’est ce vendeur à la sauvette qui vend des produits jamais contrôlé, parfois dans des endroits interdits, c’est cette diplômée qui fait du mobile phone au bord de la rue, c’est ce vendeur de chaussures en plein carrefour.
Bref, nous connaissons le secteur informel au travers de personnes qui ont décidé de s’accrocher à une solution, n’importe laquelle qui les permette enfin de subvenir à leur besoin, sans considération d’aucune réglementation, ou sans même qu’il existe une réglementation qui s’applique à eux.
Le secteur informel, ce ne sont pas des personnes hors la loi…c’est un vide de loi soit sur les personnes qui trouvent ainsi leurs solutions, soit un vide de loi sur leurs solutions…soit enfin, un écart entre ce que des débrouillards proposent et une réglementation donnée.

Le secteur informel, qu’apporte t-il ?
Là aussi, la réponse est sans biais. Le secteur informel est une solution immédiate aux acteurs qui s’y trouvent. Il rapporte, et parfois ce n’est pas vrai tous les jours, au moins de quoi manger à la maison. Sinon, il permet de vivre au quotidien et de gérer divers besoins, y compris parfois des besoins de luxe pour les plus chanceux. Il arrive même souvent que certains finissent par se frayer un chemin au travers de ce chemin au point soit de devenir riche, soit de passer à autre chose.
Mais le secteur informel n’apporte pas véritablement un emploi.
Il n’apporte aucune garantie…même parfois sur le quotidien lui-même. On n’est jamais certain que la journée sera bonne…Et que dire des fins de mois qui sont des véritables chances pour la plupart des prisonniers de ce secteur.
Il n’apporte aucune sécurité, ni financière, ni psychologique. En général, pas d’assurance, pas de prise en charge sociale ou médicale. Bref, au moindre palu qui dure plus que trois jours, l’emploi ou l’activité est sous de sérieuses menaces de mort. Par ailleurs, on n’est confronté à n’importe quoi sans abri sécuritaire.
Il n’apporte aucune couverture légale. Et tout le monde va venir entrer dans ce vide. Les fonctionnaires des impôts, la police, les services sanitaires, les services municipaux, tout le monde trouve dans cette absence de couverture légale un moyen d’extorquer et de torturer psychologiquement des milliers de personnes sans aucune considération. C’est en effet blessant, étonnant, extraordinairement méchant même de voir que ceux qui ont un emploi stable utilisent leur emploi pour persécuter ceux qui n’en n’ont pas eu et qui ont dû inventer des solutions de fortune pour survivre…

Le secteur informel est un trompe l’oeil

Il laisse l’impression qu’on a une occupation quand celle-ci pour un rien du tout peut s’évanouir sans qu’on ait rien à revendiquer; il laisse l’impression qu’on va vers quelque part quand il fait tourner en rond pendant des années. il créee des exceptions de succès qui deviennent les modèles que la majorité n’atteindra jamais. il crée autour de lui des avocats qui ne sont pas concernés du tout par la misère qu’il engendre en introduisant un discours condescendant sur ces "pauvres personnes dont on doit sauvegarder absolument le gagne-pain". il expose les plus faibles aux plus forts sans que ceux-ci n’aient aucune option…même la petite vendeuse d’arachide peut se faire violer par le client en voiture sans que cela ne puisse jamais être jugé…et que dire de ces vies volées dont il est un ferment favorable; toutes ces années d’études brûlées derrière la solution qu’il apporte.

Non, le secteur informel ne mérite aucune éloge. Et s’il fait vivre des millions de famille à travers l’Afrique, il faut bien se dire qu’il s’agit d’un problème à régler. Il nous dépanne tous, mais il n’est absolument pas normal que la « vie à peu près » devienne un modèle acceptable. Et si des politiques en mal de gouvernance et d’inspiration ont décidé d’en faire une solution, il faudra bien qu’une génération de politiques accepte de redonner de la dignité à tous ces débrouillards violés psychologiquement, financièrement par des situations de travail qu’ils ont dû choisir parce que n’ayant pas vraiment d’autre choix.
Comment cela doit-il se faire…c’est une autre question. Mais permettez moi de me contenter de poser le problème pour le moment…Et surtout ne me dites pas que tout le monde connaît ce problème….Parce que c’est justement parce qu’on refuse de prendre vraiment conscience des problèmes dans ce qu’ils sont que nous passons notre temps à construire des solutions boiteuses.


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