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Rétrospective Georges Braque, derniers jours…

Publié le 02 janvier 2014 par Savatier

Il ne reste plus que quelques jours pour visiter la remarquable exposition Georges Braque (1882-1963) qui se tient au Grand Palais jusqu’au 6 janvier prochain.

Remarquable, cette exposition l’est à plus d’un titre. D’une part, parce qu’on n’avait pas connu aussi ambitieuse rétrospective depuis celle organisée à L’Orangerie en 1973, alors que le peintre s’inscrit parmi les artistes majeurs du XXe siècle. D’autre part, parce que la qualité des 238 tableaux, dessins, gravures et objets ici rassemblés relève de l’exception, comme le prouve, notamment, la réunion de l’ensemble des neuf Ateliers (1949-1956). Enfin, parce qu’il faut saluer le parti pris thématique autour duquel s’articule la visite, qui évite l’écueil d’une opposition Picasso / Braque, devenu un véritable cliché de l’art moderne (implicitement initié par Apollinaire dans son essai Les Peintres cubistes publié en 1913) qui, pratiquement toujours, tournait à l’avantage du premier, moins par hiérarchisation esthétique que par facilité.

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Le choix de Brigitte Leal, commissaire de l’exposition, de placer Braque en relation avec Cézanne situe le peintre dans une perspective nettement plus intéressante. Bien sûr, il présuppose - ce qui n’est guère gênant - de faire l’impasse sur les œuvres antérieures à l’été de 1906 pour débuter le parcours avec une série « fauve » du port et de l’arrière pays de L’Estaque, peinte d’une palette éblouissante qui aboutit, avec La Petite baie de La Ciotat de 1907, à une vision synthétique, puis, avec Le Viaduc de L’Estaque (1908) et la série des Arbres et des Maisons (même année), au seuil d’une esthétique cubiste qui consacre une nouvelle approche de la perspective.

Celle-ci se développe dès 1909 avec la série du Château de La Roche-Guyon, puis des natures mortes où dominent les instruments à cordes. Les amateurs du Cubisme analytique (1911-1912), des Papiers collés (1912-1914), puis du Cubisme synthétique (1913-1918) se réjouiront de la belle réunion d’œuvres ici présentées, qui marquent les étapes d’un cheminement, en bistre et noir, vers les natures mortes cubistes des années 1920, puis celles de composition plus libre encore et plus colorées, de la décennie suivante. On ne peut, en regardant ces toiles sur lesquelles sont représentées les différentes faces d’un volume sur un même plan, que penser à ce mot étrange et provocateur de Baudelaire dans son Salon de 1846 qui, parlant de la sculpture, la trouvait « insaisissable » parce qu’elle montrait « trop de faces à la fois »...

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La période de la guerre, illustrée de toiles emblématiques et sombres, mais moins connues, réalisées à Varengeville près de Dieppe, où les poissons dominent, marque un contraste avec la célèbre série des Oiseaux (1954-1962), ensuite popularisée grâce à la lithographie.

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On trouvera encore les étonnants paysages des dernières années, auxquels Nicolas de Staël s’était montré si sensible et qu’admirait Alberto Giacometti, lequel les voyait « à la pointe même de l’art d’aujourd’hui, avec tous ses conflits. ». Ces paysages laissent au spectateur une étonnante impression : ils traduisent à la fois une note très personnelle et des réminiscences qui font appel à Van Gogh (Le Champ de colza, 1956-1957, La Sarcleuse, 1961-1963) ou à Courbet (Paysage, 1959). Une forme de synthèse, une passerelle finale entre deux siècles, réalisée par celui que Jean Paulhan appellera « Braque le patron. »

Illustrations : Georges Braque, Le Port, 1909, huile sur toile, 40,6 x 48,2 cm; Washington, National Gallery of Art, © National Gallery of Art, © Adagp - Georges Braque, Compotier et verre (premier papier collé), 1912, fusain, papier faux bois collé sur papier, 62,8 x 45,7 cm, The Ieonard A. Lauder Cubist Trust, © The Ieonard A. Lauder Cubist Trust, © Adagp - Georges Braque, L'Oiseau noir et l'oiseau blanc, 1960, huile sur toile, 134 x 167,5 cm, collection particulière, © Leiris SAS Paris, © Adagp.


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