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Emouvances (7) shah mat

Publié le 04 janvier 2014 par Parent @LEGOBALADIN

SHÂH MAT

Shâh mat !... Le roi est mort !... Sur le théâtre d’une mère des batailles qui se concentre en un damier de 64 cases arpentées par deux armées de 16 pièces se faisant face. Quand les Arabes envahissent la Perse, ils y découvrent un jeu mystérieux qui y a transité, en provenance de l’Inde où il est né, semble-t-il, au 6esiècle de notre ère. Le chaturangasanskrit désigne les quatre corps de l’armée indienne d’alors : éléphants, cavaliers, chars et fantassins. Représentation de la guerre sans effusion de sang ? Façon de créer un climat de mystère en miniature ? Pièces rouges contre pièces noires, le jeu se fait parabole de la vie réelle.
   Une drôle de légende court sur les Echecs. Elle raconte l’histoire, trois mille ans avant notre ère, du roi indien Belkib qui cherchait à tout prix à tromper son ennui. Il promit récompense exceptionnelle à qui le distrairait. Le sage Sissalui présenta le jeu d’échecs, déposant un grain de blé sur la première case, 2 sur la 2e, 4 sur la 3e… et ainsi de suite, pour finir par remplir l’échiquier, en doublant la quantité de graines à chaque nouvelle case… jusqu’à atteindre 2 puissance 63 grains sur la dernière, soit plus de neuf milliards de milliards de grains !... C’était signer la mort du royaume : les récoltes de l’année n’y suffiraient pas. La distraction du roi était plus qu’assurée, le tracas et l’obsession venant s’y ajouter ! Les échecs, jeu de la dévoration.
   Parvenu en Europe au Moyen Age, l’échiquier s’occidentalise. Blancs contre noirs… qui sont les « gentils » ?... Le mouvement des figurines s’aère et s’accélère, suivant le gain de puissance de l’artillerie alimentée par la poudre à canon sur les champs de bataille. Métaphore des joutes moyenâgeuses fort prisées par les chevaliers, le jeu de guerre devient bientôt jeu de cour : conversion intellectuelle des humeurs guerrières. Gain de civilisation. L’échiquier se fait le raccourci symbolique de la ville médiévale nouvelle où prennent place les diverses catégories sociales du temps. Roi, reine, tours, fous, pions soldats, cavaliers signent la forte connotation allégorique du jeu qui devient un passe-temps pour… amoureux. On imagine aussi quelques croisés apprenant à jouer tout au long de leur conquête de la Terre Sainte. Pour meubler les temps morts, tromper le présent. Avant de retourner occire les Sarrasins d’en face ! Mat à mort.
   Au XVIIIe siècle naissent les clubs d’échecs dans ces lieux de rencontre et d’échanges intellectuels que sont cafés et tavernes, pendants publics des salons aristocratiques. La fièvre populaire du jeu gagne l’Amérique. Benjamin Franklin, en génial inventeur, publie un essai vantant l’enseignement de la prévoyance qui oblige à anticiper ; de la vigilance qui exige que l’on observe tout l’échiquier ; de la prudence qui appelle la réflexion. Et d’une importante leçon sur la vie : quand tout semble aller mal, nous ne devons jamais nous décourager, mais toujours rechercher la solution active de nos problèmes. Les échecs, épreuve de vérité.
   La fin du XXe siècle voit l’arrivée de l’ordinateur sur le champ de bataille des échecs. L’homme affronte Deep Blue, capable d’analyser 50 milliards de données en trois minutes. Combat perdu d’avance, mais consolation : la machine mettra désormais ses formidables capacités au service des joueurs et de leur entraînement. L’ordinateur coach et sparring-partner. Mis au programme des écoles, le jeu s’organise en championnats et Olympiades… A quand son inscription aux Jeux Olympiques ? Les échecs jeu sportif, sport mental.
   10 puissance 80 possibilités : la plus grande richesse ludique se développe à l’infini dans seulement… 64 cases ! Le travail du joueur consiste à augmenter sa puissance d’agir pour se maintenir en vie. C’est le héros du Septième Sceau de Bergman affrontant la mort en duel : façon de dire que tout est déjà joué - déjoué - … avant que tout se joue. Car les échecs désignent à la fois le jeu et son issue : tout est joué… et perdu d’avance. Le jeu suppose-t-il l’absence d’espoir ? Et quelle plus belle preuve d’attachement à la vie que de se livrer à une valse imperturbable de ses neurones face à l’ombre glacée de la mort qui s’avance ?!... A « qui perd gagne », le joueur perd mais trouve un sens à son existence : le temps de la partie, il a su transformer l’inévitable en sacrifice. Et toute partie, choisie, mémorisée et codée, peut être ensuite rejouée à l’infini, devenant ainsi une sorte de modèle, de « standard » de raisonnement daté et signé. Un problème traité et résolu qui servira de support et de réflexion à de futurs amateurs : le jeu mis en abyme.
   Concentration extrême, pénétration au cœur de notre monde mental, vertige d’une solitude contrainte : jusqu’où peut mener ce qui n’est au départ qu’un simple jeu ? Avec ou contre qui le joueur se bat-il ? Son adversaire ? Une stratégie à mettre en place ? Des modèles de parties anciennes patiemment mémorisées ? Le temps qui passe et le pousse en avant ?... Ou lui-même, son sang-froid, sa capacité à garder confiance, à conserver la tête sur les épaules ? La monomanie qui entoure les échecs porte en elle les ingrédients propres à toute obsession menée trop loin. Pensons au Joueur d’échecs de Stefan Zweig ressassant en solitaire, dans sa prison, des modèles de parties, jouant avec - contre - lui-même, indéfiniment. Dangereux vertige du double. Le génie et la maladie ont parfois destin lié. Les exemples existent de basculement dans la folie, la schizophrénie. A l’image du champion Bobby Fischer, dans les années 1970, l’air hagard, se disant persécuté par le monde entier, comme dévoré de l’intérieur. Le jeu au risque de la paranoïa.
   Un arbre à multiples ramifications envahissant progressivement l’espace peut symboliser notre monde mental. La tête envahie, colonisée par ses propres facultés, au-delà de l’imaginable. On pense au cyborg d’une science qui n’est plus fiction mais recherche, robotique. Les 1500 centimètres cubes occupés par notre cerveau - soit 900 de trop si l’on considère son rapport avec le reste du corps ! - en font un outil à part, aux prolongements encore insoupçonnables. A l’image de l’histoire de l’univers dont nous continuons d’approfondir, de génération en génération, les vertigineux secrets. Inquiétants et enivrants trous noirs.
   Le jeu d’échecs nous plonge dans la révélation d’une ascendance partiellement vierge de nos potentialités, autant que celle d’une enfance de l’humanité. Les Echecs, cauchemar fascinant du labyrinthe et jeu des origines.    SIDERATION   Gens au soleil. Quatre formes humaines statufiées allongent leurs ombres, comme dévorées par un paysage immobile, en fusion sous un soleil d’après-midi. Pauses nonchalantes, languissantes, affalées dans des transats dont l’ordonnancement géométrique savamment décalé évoque celui d’une salle de spectacle, mais en plein air, celle-ci. Nous voici plongés dans le cinéma aveuglant de cet espace clair, dont le film défilerait sur un écran en trois dimensions. L’écran réel de la vie. L’assise en forme de terrasse brute, blanche, enfonce son coin de pierre dans une ruralité profonde. Terrasse-navire prête à fendre l’océan inquiétant d’une nature perdue entre champs, ciel et montagne.    Rien n’a lieu là, dans l’attente lourde de silence et de vide. Tout reste possible donc, tout est à inventer. Survenue d’un OVNI à l’horizon proche ? Atterrissage inopiné d’inconnus en goguette ? Catastrophe naturelle ? Ou suspension du temps sur une absence de récit… Le monde peut-il être plus plat, plus inexpressif, plus inutile ? Tout l’espace vibre d’une sidération banale tant elle semble appelée à se prolonger, mais à laquelle l’œil s’habitue pourtant.    Regards braqués sur l’azur vide selon un même angle mécanique tiré au cordeau, quatre figures de cire nous renvoient leur hallucinante inexistence. La leur devient vite la nôtre, tant ils nous fascinent et tant cette scène focalise peu à peu en nous une sensation en miroir. L’envie nous prend alors d’élargir le cadre du tableau vers la droite, là où s’avance le navire-terrasse, dans le sens d’une marche supposée. A tort ou à raison, il nous semble que déplacer notre regard peut amorcer, initier un mouvement apte à éveiller ces figures vagues, lunaires, figées dans une cire émolliente. Voir ailleurs, voir plus avant… faire se mouvoir l’espace. Ne serait-ce que de la pause d’un soupir. Mais le subtil déplacement de l’air tombe dans le néant d’une expectative navrante. Sidération du vide.   Pourtant, notre regard fasciné questionne et témoigne : ces figures aux allures de pantins, ne regardant rien, n’attendant rien, sont-elles encore vivantes ? Ou ne sont-elles plutôt que le fruit de nos imaginaires abusés ? Existent-ils ailleurs que dans notre rêve éveillé, ces automates cireux pourtant habillés, cravatés et chapeautés selon les codes d’une civilisation rassurante, identifiée ? Ou sont-ils embarqués dans un ailleurs inaccessible, plongés dans une méditation dont les enjeux nous dépassent ? Question sans réponse.   Mais, les distances extérieures abolies, c’est dans l’espace intérieur à la scène qu’il nous faut prolonger l’exploration. Un cinquième personnage, assis en retrait de la rangée statique, ploie son corps attentif pour l’absorber dans un livre ouvert, son seul regard semblant échapper à l’absence générale. Ultime rempart à l’apathie ambiante, lui seul témoigne encore d’un vestige de civilisation et de culture. S’il n’en reste qu’un, sentinelle attentive, avant que le monde entier ne sombre dans le non-lieu… Présence puissante du lecteur en éveil dont l’unique acte de déchiffrer sait donner un cap à ce navire en perdition muette. Ce lecteur a nos traits. L’espoir renaît.   Il s’avère ténu. Tout n’a-t-il pas déjà été vu et dit de ce monde-ci ? Une tension, palpable, traduit ses vibrations dans la chaleur intense de l’air. Rien à attendre d’un horizon quelconque découpant trois zones classiques, cent fois vues : un ciel d’azur flouté de blanc, une barre montagneuse lisse et noire, un champ jaunissant de céréales. Insignifiance et banalité, classicisme et ennui. Notre expérience ordinaire du réel n’en finit pas de se muer en image indécryptable, objet de pure illusion. L’absence s’incruste au creux de la scène. Jusqu’à l’hypnose.   Serions-nous inconnus au monde ? Camus nous livre son Etranger - Socrate contemporain - pour illustrer sa philosophie de l’absurde. La vie n’a pas de sens. Pas davantage le jugement de la société… Comment l’homme ne se sentirait-il pas étranger à ce monde, lui qui n’a le choix qu’entre résignation et révolte ?... Meurseault, ce monsieur Tout le monde, ne ressent que détachement, lui qui vit de manière passive, sans projet, sans chercher à donner de cohérence à ses actes. Jusqu’à tuer, sur une plage, un Arabe par lequel il se sent vaguement menacé. Le héros de Camus est jugé et condamné à mort. Il ressent tout au long du procès la même indifférence face à la société qui l’accuse. Il se sent innocent. Son acte meurtrier, il l’a commis sans intention, presque sans conscience, geste absurde parmi tant d’autres. Son crime n’a pas eu pour lui plus de sens que le reste de sa vie. L’étranger renonce à se défendre et refuse un pourvoi en grâce qui lui aurait sauvé la vie. Mourir maintenant ou plus tard, quelle importance pour lui ? Puisque tous nous sommes condamnés à mort un jour ou l’autre… Acceptation lucide du trépas et refus de demander pardon à un Dieu décidément absent, se transforment en révolte contre le non sens du monde.    De la solitude désespérée à une prise de conscience philosophique, comment ne pas partager avec cet homme un sentiment d’étrangeté et de sidération ? La révolte peut-elle tirer l’homme de sa solitude ?... L’Homme révolté du même Camus (« Je me révolte, donc nous sommes ») rejoint le Sartre de La Nausée dans une même célébration de la connivence fraternelle. Littérature et philosophie sont là pour figurer et nous aider à saisir un certain ordre du monde et la finalité de l’existence qui peut en découler. Et puis ne sommes-nous pas toujours l’étrange étranger d’un autre ?...   Une barrière invisible a été installée entre ces Gens assis et nous, impuissants voyeurs. Coquille vide peuplée par des fantômes. Muette configuration. Vide sidéral asséné. Métaphore du silence. Le renvoi initial à du déjà vu, du familier connu, repérable, s’est mué en une image mystérieuse qui, n’en finissant pas de nous regarder, ne va pas tarder à nous échapper. La grâce puissante de la mémoire et de l’imagination réunies achoppent au non-lieu, à cet endroit où certaines configurations esthétiques se montrent parfois impuissantes à ouvrir notre accès à la parole. Nous savons mal, ici, traduire en langage nos perceptions de l’instant. Notre inquiétude, impossible à apaiser par des mots ou autres métaphores, vire à la frustration pure. Etonnement, confusion, silence, fugitivité du regard… mais absence de dénouement !... Le metteur en scène - un certain Hopper - se refuse catégoriquement à conclure, tout à son souci de captiver notre regard dans ce qui ressemble à un puits sans fond. La lumière qui s’y reflète pourtant vient de si loin qu’elle figure étrangement ces étoiles perdues où nous devinons enfin, livides, hébétés, la forme hilare de notre propre visage.
  BABIOLES (interlude)  Bibelot, breloque, brimborion, colifichet. Bagatelle, bêtise, broutille, niaiserie… rien. Les mots nous prennent par le col, nous font voir du pays, celui des répertoires, des lexiques et des glossaires. Brimborion : prière marmottée. Colifichet : ornement fiché dans lacoiffe. Bagatelle : tour de bateleur. Fanfreluche : bulle d’air. Le rien se décline, s’organise, nous en met plein les mirettes. L’air de rien, comme si de rien n’était…   Babiole : bricole, frivolité, fadaise, enfantillage, futilité. Babiole : niaiserie, baliverne, néant, platitude, plaisanterie. Babiole : blague, boutade, calembredaine, facétie, galéjade   Rien, vous avez dit « rien » ! Il ne s’agit de rien de moins, en effet, que de délivrer les mots d’un sommeil lexical en les laissant souffler sur nos langues bien vivantes un air de pharmacopée essentielle. Embarqués dans le va-et-vient du monde, les voici qui entament leurs petits chuchotements discrets ou bruyants, gentils ou féroces. Mais toujours précis, justes, pleins d’une histoire qui les veut singuliers, uniques.   Babiole : badinage, quolibet, canular, attrape, taquinerie. Babiole : faribole, billevesée, sornette, néant, nullité. Babiole : banalité, bobard, hâblerie, saillie, sarcasme.   Voyez ces petits riens déclinés nous ouvrir à la parole, à l’écriture : rien de tel comme exercice mental ! Voici que les mots nous soufflent l’immensité de la pensée, inventant devant nous un art plastique de la langue. Volubile faconde qui nous laisse pantois, sans voix… mais pas sans texte !... Nous entrons dans la ronde des mots.   Babiole : bourde, bouffonnerie, farce, badinerie, poncifs. Babiole : boniment, bateau, fanfaronnade, forfanterie, gasconnade. Babiole : raillerie, trait, facétie, niche, tour.   Les lexiques nous chuchotent cent, mille mots apparentés. Impatients de nous livrer leurs indices, ils se renvoient la politesse sans jamais se la griller : chacun a un petit mot pour ses voisins : ils sont si proches ! Mais aucun ne renonce à sa propre musique, celle qui l’a vu naître avant de traverser une histoire parfois séculaire. Le convoquer - lui plutôt que tel autre, si proche cousin pourtant ! - c’est lui rendre hommage, le laisser c’est le condamner peut-être à une mort prochaine, dans l’extinction silencieuse de l’oubli. Les mots ne s’usent bien que si l’on s’en sert !   Babiole : baratin, battage, bobard, parade, rodomontade. Babiole : vanterie, gouaillerie, malice, moquerie, persiflage. Babiole : brocart, flèche, lazzi, trait, pique.    Inépuisables ce dictionnaire-Thesaurus, ces répertoires à concordances, ces lexiques d’étymologie ?... Il arrive que les mots qui dansent tournent sur eux-mêmes en un drôle de boléro, revenant finalement à leur point de départ. Beaucoup de bruit pour rien ?...   Babiole : esbroufe, épate, libelle, pamphlet, satire. Babiole : bagou, caquet, parlote, jacasserie, racontar. Babiole : gadget, bidule, fourbi, machin, trucmuche.    A quoi pensez-vous ? A rien !... Jurez-vous de dire toute la vérité, rien que la vérité ? Impossible de rester sans rien dire ! Et puis rien n’est impossible…   Babiole : badinage, espièglerie, jobardise, raillerie, diatribe. Babiole : manigance, duperie, enjolivure, faux-fuyant, échappatoire. Babiole : poncif, redite, verbiage, superfluité, luxe… LUXE !... Babiole luxe, babiole de luxe ? Retour de mot, pirouette et ouverture. Babiole et luxe ? Cela n’a rien à voir ! Cent mots pour en arriver là. Cela n’a rien d’impossible. Avec les mots, il y a toujours plus que rien. C’est tout ou rien. Nous les avons pour rien. Un rien nous parle puisqu’un rien les habille. Un rien nous engage car un rien les amuse. « Pour cent fois rien, on a déjà quelque chose », plaisante l’humoriste. Cent babioles pour un seul rien. Quel luxe !    Rien à dire ! C’est un tantinet parfait. A cent contre un, la babiole atteint des millions comme rien ! Elle cultive ce luxe de nous contenter de rien. Sa devise : c’est donné, c’est pour rien. Elle ressemble à ce rien qui fait la liberté de la langue. Un rien qui sait s’absenter, se suspendre, et pourtant toujours déjà là, à portée en un rien de temps.   Feuilleter le dictionnaire, c’est comme ouvrir une porte au souffle des sens possibles. On met le nez à la fenêtre et on se laisse goûter l’air du temps qui passe, décidant une fois pour toutes que rien n’est trop beau pour nous. Aquilons, zéphyrs, bourrasques, tramontanes… Babioles éoliennes. Les mots possèdent la puissance et les nuances infinies des vents.    La babbola italienne du XVIe siècle - à l’origine de notre babiole -  a beau n’être qu’un petit objet de peu de valeur, voilà qu’elle se découvre des myriades de cousins. Comme une averse de printemps fertilisante. Féconde pluie de menues piécettes dorées subitement surgies des trésors dormants de la langue. Jusqu’à flirter avec la « langue verte », ce langage propre à la corporation des gueux (1690) heureux de « rouscailler bigorne » comme disent les habitués. Argot parisien, boulevardier, militaire, scolaire, sportif etc… A chaque corps son dialecte fleuri. L’argot, langue sociale.   La babiole se mue alors en « broquille »mal famée : non décidément, ça ne vaut pas une broquille ! Broquilleurs et broquilleuses pratiquent sans scrupule le vol à l’étiquette, faisant passer pour diamant pur le bijou le plus toc, et ne laissant que peu de temps pour s’en remettre : « Wah ! Faut qu’je speede un max, j’ai rencart dans trois broquilles !... » Quant au lexique magique de la zone, il ne se prive pas de multiplier le « rien » avec gourmandise : peanuts, queude… que dalle, que tchi, walou…   Dernier (?) mot laissé à l’humoriste Devos, orfèvre dans l’art de parler pour ne rien dire : « Car rien… ce n’est pas rien ! … Pour trois fois rien, on peut déjà acheter quelque chose, et pour pas cher !... Maintenant si vous multipliez trois fois rien par trois fois rien : rien multiplié par rien = rien, trois multiplié par trois = neuf. Cela fait : rien de neuf !... »    
 
  
  

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