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Balbutiements chroniques, par Sophie Torris….

Publié le 29 janvier 2014 par Chatquilouche @chatquilouche

Cher Chat,

Permettez que je m’attèle à un sujet que vous pourriez juger léger à première vue, mais qui n’est

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pourtant pas dépourvu de fondement : mon cul.  Si je vous invite à me mettre la main au panier de manière aussi cavalière, c’est que mon postérieur me désarçonne.  En effet, depuis quelque temps, mon cul se cabre contre ma culotte de cheval.

Comme je ne m’occupe pas que de mes fesses, j’ai pu constater combien les femmes en général faisaient de leur croupe un cheval de bataille.  On peut alors se demander si c’est dans la seule optique que les hommes en fassent leur cheval à bascule.  Sinon, pour quelles raisons ruerions-nous ainsi contre le moindre capiton ?  Afin de comprendre pourquoi nous plaçons notre orgueil aussi bas, nous explorerons donc aujourd’hui la face cachée de la lune.  Car on a beau l’entendre s’exprimer, on ne voit jamais son bavard que dans un miroir.  Et encore faut-il se contorsionner !

Malgré tout, les femmes ont conscience de leur arrière-train, et ce, depuis la nuit des temps.  C’est que sans ces rondeurs féminines, l’humanité s’en allait droit dans un cul-de-sac.  Il était donc indispensable pour l’homo sapiens que la fesse appelle l’ivresse afin de perpétuer l’espèce.  Ainsi, le troussequin qui n’en est encore qu’à sa préhistoire est déjà proéminent.  Repérable à la ronde, il invite sans fausse modestie le primate qui rapplique instinctivement au galop et qui, par cette voie de fait, apprend petit à petit à domestiquer le feu… aux fesses.

Certes, ce sourire vertical a pu paraître énigmatique dans un premier temps, le secret des fesses étant logé en leur creux, mais l’homme des cavernes a bien fini par comprendre que la rondelle ne faisait pas le printemps puisque nous voici, aujourd’hui, plus de sept milliards d’humains sur terre.

Si de nos jours, la survie de l’espèce n’est plus en danger, la courbe de la chute des reins semble toujours calculée pour que les yeux des hommes, en proie à l’attraction lunestre, ne puissent que glisser inexorablement jusqu’aux fesses.  Mais là où le bât blesse, c’est que selon l’époque ou la culture, certains culs retiennent plus l’attention que d’autres.  La beauté callipyge d’hier n’est pas forcément celle d’aujourd’hui et le prose lui aussi se doit de suivre la mode s’il ne veut pas être exclu du manège.  Il ne suffit donc plus de tortiller du croupion pour que l’étalon s’emballe.  Ainsi, pour espérer être montée à cru, la femme doit entrer en guerre contre son propre pétard et c’est ainsi que sur ces entre-fesses, l’objet de convoitise devient objet de complexe.

Je ne serai pas faux-cul et je vous le confesse, le Chat, j’ai très souvent torturé cette partie problématique de mon anatomie à vouloir l’emprisonner dans un jean déjà conçu pour la mouler et dont la taille me faisait rêver.  Et nous sommes nombreuses à nous sangler le popotin de la sorte pour espérer le tiercé gagnant : petit cul rebondi.  Mais comment un cul privé de sa respiration peut-il inspirer confiance ?

Permettez, le Chat, que je monte sur mes grands chevaux !  Parce que mon Rubens est d’une autre époque, mon cul, c’est du poulet ?  Mais chaque cul a sa personnalité !  Sous prétexte que l’hémisphère nord est adepte du petit cul hautain, ferme et volontaire, mon postérieur doit épouser ce tempérament qui n’est pas le sien et se mettre le mors aux fesses ?

Il y a heureusement de temps en temps de rondes offensives venant de l’hémisphère sud.  Le cinéma a porté, dans les années 60, le derrière des Italiennes à l’écran et, plus récemment, la sensualité mammaire des actrices sud-américaines a su élargir nos perspectives des codes de beauté ; on s’est mis alors à parier sur un autre type de cheval, mais toujours, le culte de la minceur, dressée sur ses étriers, finit par éperonner tout ce charnu.  C’est qu’il y a, derrière cette esthétique du filiforme, une idée de maîtrise de soi qui caractérise nos sociétés tristement perfectionnistes.

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Alors si mon cul se cabre contre sa culotte de cheval, est-ce par souci de perfectionnisme ?  Je crains que cela ne soit par conformisme.  Or, l’art ne se trouve pas dans la répétition, et je veux être une artiste.  Je revendique donc dès aujourd’hui un cul d’artiste et je vous encourage, le Chat, à avoir vous aussi la fesse unique et rebelle.  Militons, tous, pour son indépendance et que ma culotte de cheval caracole dorénavant à brides rabattues.  Voilà sans aucun doute le remède de cheval pour lutter envers et contre le poids de l’abstinence.

Sophie

Notice biographique

Balbutiements chroniques, par Sophie Torris….
Sophie Torris est d’origine française, Québécoise d’adoption depuis dix-sept  ans. Elle vit à Chicoutimi, y enseigne le théâtre dans les écoles et l’enseignement des arts à l’université. Elle écrit essentiellement du théâtre scolaire et mène actuellement des recherches doctorales sur l’impact de la voix de l’enfant acteur dans des productions visant à conscientiser l’adulte. Elle partage également une correspondance épistolaire avec l’écrivain Jean-François Caron sur le blogue In absentia. (http://lescorrespondants.wordpress.com)

(Une invitation à visiter le jumeau du Chat Qui Louche :https://maykan2.wordpress.com/)


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