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Giorgio Orsoni au château de Bourdeilles

Publié le 19 février 2014 par Oliaiklod @Olia_i_Klod

Giorgio Orsoni, la maire de Venise, était le 15 février dernier au château de Bourdeilles, en Périgord. Mais il n’était pas venus seul, car autour de lui, on pouvait croiser, entre autres, Alessandro Rubelli, le grand tapissier vénitien, le général italien à la retraite Georgio Paterno, l’architecte naval Giovanni Scarpa Dini.

Mais que sont donc venus faire toute cette délégation de vénitiens dans les forêts périgourdines ?

Orsoni à Bourdeilles

Le premier magistrat de la Sérénissime était en Périgord, à Bourdeilles puis à Tocane, pour une occasion forcément très spéciale : il venait, en quelque sorte, réceptionner les premières poutres de chêne qui doivent servir à la reconstruction du "Bucintoro" la prestigieuse galère d’apparat des Doges (voir notre article du 19 janvier).

Première étape du séjour, la forêt de la Double, au lieu dit les Grands-Bleytous, pour y voir un beau vieux chêne de plus de deux cents ans, que l’on allait abattre sous leurs yeux admiratifs. Sans doute, alors que vrombissaient les tronçonneuses des ouvriers de Patrick Delord, scieur à Tocane-Saint-Apre, toute la délégation vénitienne pensait au fabuleux projet qui murissait depuis des années et qui va enfin voir le jour.

Orsoni à Bourdeilles

Il y a des fonctions, des mandats qui offrent une certaine aura à leur titulaire et dans cette catégorie, le maire de Venise se pose là. Les élus périgourdins étaient impressionnés de recevoir ainsi, celui qu’ils considèrent comme le lointain successeur des Doges.  Et cela s’est vu, samedi après-midi, au château de Bourdeilles, où il était accueilli par le président du Conseil général de la Dordogne, Bernard Cazeau (PS). Venise, son histoire, son prestige, sa légende en font rêver plus d’un, même quand on est socialiste.

Le "Bucintoro", emblématique de Venise au point que, dit-on, tous les gâteaux de mariage sont coiffés de sa reproduction en miniature, était le bateau d’apparat des doges. Cette galère de 36 mètres de long sur 7 mètres de large, mue à l’énergie de 168 rameurs tirant 42 rames, était le clou des fêtes de l’Ascension, quand la Sérénissime célébrait ses noces avec la mer.

Un projet à la recherche de mécènes

L’idée de la Fondation pour le Bucintoro du IIIème millénaire est un peu la même que celle qu’ont eue, il y a une vingtaine d’années, ceux qui ont voulu reconstruire "L’Hermione", à Rochefort (17). L’objectif étant moins de ressusciter le glorieux passé de Venise que de mettre en valeur le savoir-faire des artisans vénitiens. Car le navire sera construit au même endroit que son illustre prédécesseur, à l’Arsenal.

En temps de crise, le projet ne compte que sur le mécénat. Les collectivités locales n’ont qu’un rôle limité, voire symbolique. Giorgio Orsoni est d’ailleurs le président de la Fondation de reconstruction. "Giorgio Paterno  est venu une journée entière pour tenter de me convaincre, explique le maire de Venise. Je lui ai demandé s’il avait l’argent, il m’a répondu : Non, mais il arrive !"

Le maire de Venise l’explique, "c’est un projet complexe, car nous devons à la fois réunir les finances et les savoir-faire". Et c’est sur ce dernier point que la Dordogne apporte son concours, en matière de bois. Bruno Lafon, le président de l’Union des syndicats de sylviculteurs d’Aquitaine, voit des symétries dans l’histoire des deux régions : "Vous êtes le peuple de l’eau, nous sommes le peuple du bois. Mais vous comme nous avons eu besoin du bois pour lutter contre l’eau. Nous en plantant des millions de pins maritimes dans les Landes pour fixer nos dunes, vous en plantant des millions de pieux pour construire votre ville."

Après la matinée à courir les bois, la délégation fut reçue à partir de 15:00 heures au château de Bourdeilles, avant d’assister, vers 17:00 au départ du premier chargement de bois depuis la scierie Delord, au lieu-dit Bourgogne, à Tocana-Saint-Apre.

Un parchemin sous la cheville

Les Italiens ont longtemps cherché le bois adéquat pour leur projet. Ils l’ont donc trouvé en Périgord, mais en Aquitaine en général puisque des livraisons de pins des Landes et des Pyrénées sont aussi prévues dans les mois à venir. Bernard Cazeau y voit une manière "d’associer les patrimoines des deux régions". Le maire de Venise ne dit pas autre chose : "Faire cette reconstruction entre Vénitiens, entre nous, n’aurait pas de sens. Il fallait élargir notre projet."

La Dordogne et Venise sont unies ; seront unies dans la pièce maîtresse du Bucintoro. Bernard Cazeau et Giorgio Orsoni ont tous deux signé un parchemin qui a été placé sous la première cheville de la future quille de la galère.

La région Aquitaine s’est proposée avec ses massifs forestiers :

  • la Dordogne pour ses chênes,
  • la forêt des Landes pour ses pins,
  • et les Pyrénées pour ses épicéas

Orsoni Bourdeilles

"Reconstruire le bateau, c’est récupérer une part de notre Histoire, de grande valeur culturelle, mais aussi aider la reprise économique, à travers du travail donné à notre artisanat actuellement en difficulté" a déclaré également le maire de Venise.

Roland de Lary a vu tout l’intérêt, en termes d’image, que le "Bucintoro" peut apporter à la forêt d’Aquitaine. Reste à susciter le mécénat à travers le massif pour mobiliser tout le volume nécessaire à la reconstruction de la galère des doges, qui implique aussi le pin des Landes et l’épicéa des Pyrénées. Suite à notre article du mois de janvier, monsieur Jacques Hazera, Vice-Président de Pro Silva France, nous avait contacté : "J’ai dans ma forêt de Louchats (en Gironde) quelques magnifiques pins maritimes centenaires. C’est volontiers que j’en mettrais quelques-uns à la disposition de ce beau projet."

Nous avons donc apporté notre petite part à cette grande chaîne qui, en France, va permettre à Venise, de retrouver son navire ducal.

Les bois vont être travaillés à l’arsenal de Venise, et la quille du "Bucintoro" » sera prête pour être montrée au public à la fête de l’Ascension. Enfin la concrétisation, s’est dit Alessandro Rubelli, justifiant pleinement le sentiment extraordinaire qui l’animait vendredi aux Grands-Bleytoux.

L’équivalent d’une trentaine de camions de bois au total partira d’Aquitaine, fournissant la matière première de la galère de 35 mètres de long, les deux premières cargaisons étant offertes à Venise. Au total la France contribuera à hauteur d’un demi-million d’euros, a-t-on précisé auprès du département.
Le chantier devrait démarrer dans les prochaines semaines à l’Arsenal de Venise, et s’étendre sur cinq ans au moins.

Patrick Brunie, lui, a commencé sur place le tournage d’un film qui retracera l’aventure jusqu’à son terme. Il est produit par Alain Depardieu (le frère de Gérard), qui était également présent. Atelier par atelier, hommage aux métiers et aux mains des hommes qui les animent…


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