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En finir avec Eddy Bellegueule – Edouard Louis

Par Theoma

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« De mon enfance je n'ai aucun souvenir heureux. »

Entrée en matière fracassante. Le ton est donné. Le roman, bien plus proche du récit que de la fiction, est un uppercut qui vous laisse ko sur le côté.

C'est l'histoire d'un changement de nom, d'une métamorphose. Eddy Bellegueule devient Edouard Louis. Parce qu'il le faut. Parce qu'il n'existe aucune autre solution pour survivre. C'est une histoire de ruptures. Quitter sa famille, rompre avec les attentes des autres, tout perdre pour se gagner soi-même. C'est l'histoire des différentes couches de la misère. Le manque d'argent, la misère des relations, la pauvreté d'affection, le bas seuil des mots et de ce qui peut nourrir l'âme. C'est une histoire de violences. Celle qui définit les rôles, les femmes, les hommes, chacun à sa place et les moutons seront bien gardés. La blessure des coups et de l'indifférence. Le poids des injures et des non-dits.

C'est une histoire que l'on ne souhaite à personne. Pas même au lecteur qui se la prend en pleine gueule. Les fêlures exposées, le sel sur les blessures mal cicatrisées, le choc de la distance avec laquelle elle est racontée.

Touchée, heurtée, jusque dans les tripes. Sans revanche, ni désir de vengeance, Edouard Louis analyse et décortique avec pudeur et justesse. Les pages ne sont pas dénuées d’ambiguïtés et de contradictions, l'auteur est un homme. Elles sont d'une grande force et d'une grande exigence.

Déjà, une polémique s'insère, s'enroule, envenime. À l'ère du politiquement correct, Edouard Louis ose décrire la misère sans sucre, sans miel, sans fiel. En finir avec Eddy Bellegueule est un roman nécessaire et inoubliable. Un premier qui plus est.

Seuil, 219 pages, 2014

Extraits

« Le crime n'est pas de faire, mais d'être. Et surtout d'avoir l'air. »

« Je ne sais pas si les garçons du couloir auraient qualifié leur comportement de violent. Au village les hommes ne disaient jamais ce mot, il n'existait pas dans leur bouche. Pour un homme la violence était quelque chose de naturel, d'évident.

Comme tous les hommes du village, mon père était violent. Comme toutes les femmes, ma mère se plaignait de la violence de son mari. »

Lu également par Aifelle, Cathulu, Mirontaine, Sandrine...


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