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Caroline Lee, pour mémoire

Publié le 05 mars 2014 par Pantalaskas @chapeau_noir

Le décès il y a quelques semaines à Paris de l'artiste d'origine américaine Caroline Lee (1932-2014) permet d'évoquer à la fois la mémoire d'un sculpteur et le sort réservé à une certaine sculpture publique. La génération à laquelle appartenait Caroline Lee a participé à un art monumental pourtant bien oublié aujourd'hui. L'artiste revendiquait une posture définie :
"Je travaille pour recréer le rôle social du sculpteur, intégration personnelle ultime, sur une base d'enracinement plus organique."

Venue à Paris pour un an  avec une Bourse Fulbright , elle se trouva "chez elle" en France, renouvela sa bourse et finalement s'installa dans un atelier Parisien. Et si elle fut un temps professeur de sculpture au  Hyde Park Art Center, de Chicago, son attachement à la France ne se démentit pas. Récemment encore, en 2006, l'Institut de France lui décerna le prix de la Fondation Simone et Cino Del Duca,

"Hommage à la Résistance" Carolie Lee
1982 Acier inoxydable, granit noir, granit blanc; Hauteur : 12,50 mètres.
Place Jacques Duclos, Croix de Chavaux, Montreuil s/s Bois, Seine Saint Denis.

" Hommage à la Résistance"

Caroline Lee fut donc essentiellement sculpteur et répondit à des commandes publiques. L'une d'elles, l'Hommage à la Résistance, réalisée en 1982, se dresse sur une place animée de Montreuil sous Bois. Cette pièce en acier inoxydable de douze mètres de hauteur  ne peut pas passer inaperçue dans ce centre ville. Si l'Hommage a la Résistance a une vocation mémorielle, il n'est pas certain que la mémoire de l'artiste soit préservée dans le même temps. Ce sort ressemble à celui d'autres sculpteurs des années soixante, soixante dix, quatre-vingt dont les œuvres, dans le champ du "Un pour cent" réservé aux constructions publiques furent érigées dans les cour des Lycées, les jardins publics  par la volonté de quelques architectes, de quelques conseillers artistiques municipaux. Cette génération d'artistes fréquentait les salons de la Jeune Sculpture,  les Réalités Nouvelles, le Salon de Mai. Ces récentes années, ce type de manifestation a eu tendance à s'essouffler.

Salon de mai

Preuve en est aujourd'hui avec la disparition du Salon de Mai qui tire sa révérence après une ultime séance cette année. Fondé à Paris en 1943 pendant l' occupation par le critique d' art Gaston Diehl, le Salon de Mai n’a cessé pendant plus d’un demi siècle de représenter ces artistes. Tout a commencé dans un restaurant de la place du Palais Royal. Conçu comme un acte de résistance au nazisme qui condamnait tout art libre et indépendant assimilé à un art dégénéré, les artistes se réunissent pour la défense de l’art moderne, et répondent par une action fédératrice, soutenus par Michel Florissone, directeur de l' Action Artistique et de Gaston Diehl, l’instigateur de cette croisade  pour la défense de l’art. A partir de 1950 le Salon de Mai intègre le Musée municipal d’art moderne, baptisé musée d’art moderne de la Ville de Paris qu’il occupera jusqu’en 1968. A cette date il s’installe dans les salles côté Seine, sur le quai de New York (actuel Palais de Tokyo) qu’il occupera jusqu’en 1974.

Expansion Potentielle 1978 Caroline LeeAcier inoxydable; Hauteur : 11 mètres.

"Expansion Potentielle"
1978 Caroline Lee Acier inoxydable; Hauteur : 11 mètres. Champs Roman, St. Martin d’Hères

Dès les années cinquante, le Salon de Mai est une manifestation vivante, incontournable.
Aujourd'hui, le comité du salon veut partir la tête haute :
"Il (Le salon de Mai) ne meurt pas. Il se retire simplement d'un champ artistique qui ne laisse guère d'espace, dans tous les sens du terme, à la mission que les artistes rassemblés par Gaston Diehl il y a 67 ans s'étaient donnée: mélanger toutes les générations et les expressions dans ce qu'ils considéraient comme le meilleur à exposer."
Le Salon de Mai, ces dernières années, était devenu le lieu de retrouvailles pour les artistes qui exposaient, réunion chaleureuse certes mais apparaissant en retrait de l'actualité artistique. Caroline Lee participait à cette fête entre amis, poursuivant son œuvre. Ses nombreuses œuvres dans l'espace publique témoignent de sa créativité et restent comme les ultimes gestes signalétiques pour sauvegarder sa mémoire.


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