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Conte de Noël

Publié le 08 mars 2014 par Dubruel

CONTE DE NOËL (d'après Maupassant)

J’ai vu un miracle ! Je l’ai vu.

Oui, vu.

De mes propres yeux, vu.

Ce qui s’appelle vu.

J’ai la foi,

Moi !

Je sais qu’elle transporte les montagnes.

J’étais alors médecin de campagne.

L’hiver fut terrible cette année-là.

La chute des flocons blancs commença

Une semaine avant Noël.

En une nuit

Toute la plaine fut ensevelie.

Un matin, le père Tubœuf

Trouva sur la neige un œuf.

Médusé,

Il le porta à sa femme.

-« Tiens, v’là c’que j’ai ramassé ! »

Méfiante, elle l’examina.

-« Un œuf ? Par ces temps ? Dame ! »

Elle le fit cuire et le mangea.

-« Eh bien ! Qué goût il a ? »

Elle ne répondit pas.

Tout alla bien pendant deux heures.

Mais vers trois heures,

Elle poussa d’horribles cris.

Son cou se tordit.

Elle fut secouée de tremblements.

Convulsée de la tête aux pieds,

Elle se débattait en spasmes effrayants.

Le père Tubœuf fut obligé de la lier.

Elle était folle. Il me fit venir.

J’ordonnai un remède sans obtenir

La moindre guérison.

Avec une incroyable rapidité,

La nouvelle s’était propagée

De maison en maison :

-‘’ V’là qu’la mère Tubœuf est possédée ! ‘’

Le curé du village fut appelé.

Il accourut, tenta d’exorciser

Mais il eut beau étendre les mains,

Il n’arriva pas à chasser l’esprit.

Le prêtre se signa et me dit :

-« Comme Noël, c’est demain,

Je vais la faire venir

À l’office de nuit.

Espérons que le Seigneur

Fasse un miracle en sa faveur. »

Le lendemain soir,

On vêtit la folle de sa plus belle mise.

Elle se débattait avec vigueur.

On lui donna à manger et à boire.

Puis on la conduisit à l’église.

Elle poussait d’aigües clameurs.

On la fit taire et s’asseoir.

Après le gloria,

Le prêtre prit l’ostensoir,

S’avança de quelques pas,

Éleva vers la démoniaque le saint objet

Et le présenta à son regard effaré.

Elle le contempla avec étonnement,

Toujours secouée de tremblements.

Puis soudain elle cessa de gémir.

Son corps raidi finit par s’amollir.

Les yeux de la possédée se sont fermés.

Hypnotisée, elle dormait.

Oh, non ! Pardon !

Il faut dire : -‘’ grâce à sa contemplation,

Le mal disparût.

Satan était vaincu

Par le Christ victorieux. ’’

Nous étions bouleversés mais heureux.

Le curé remonta à l’autel

Et on ramena Mme Tuboeuf chez elle.

Elle dormit quarante-huit heures d’affilée.

Elle ne sut jamais qu’elle avait été possédée !


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