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Le syndrome de matriochka

Publié le 11 mars 2014 par Polinacide @polinacide

"Plus tu vieillis, plus tu ressembles à ta mère" : rares sont celles qui échappent encore à cette remarque. L’angoisse. Surtout si la génitrice en question cumule les psychoses à la vitesse de ses rides : on s’en passerait volontiers. Alors qu’une récente étude anglaise affirme que l’âge du basculement se situerait à 31 ans (comptez, mesdemoiselles, le temps qu’il vous reste !), l’appréhension de cet éternel recommencement n’en reste pas moins terrifiante pour les principales concernées. Moi la première, d’ailleurs. Combien de fois me suis-je faite la réflexion, en regardant ma propre mère, que jamais – Grand Dieu, jamais – je ne souhaiterais reprendre certains de ses traits ? Angoissée chronique, pseudo-matérialiste et éternelle insatisfaite, j’en viendrais presque à l’accuser de bovarysme. Et pourtant.

© Emmanuelle (Histoires de voir)

© Emmanuelle (Histoires de voir)

Aussi nuancées que paraissent nos personnalités respectives, personne ne me connait mieux que cette grande gamine, avec laquelle il a d’abord fallut « couper le cordon » pour apprécier la noblesse des vulnérabilités. Jusqu’à en faire un modèle, simplement différent du mien. Inutile de traverser une crise d’adolescence aigüe pour adopter un regard critique sur ses parents : personne ne les juge plus sévèrement que leurs propres enfants. À tort, car c’est bien souvent vers cette valeur refuge que l’on se tourne quand nos vies se retrouvent perturbées. L’ironie du sort : après tant d’années passées à décortiquer les erreurs des aînés, quoi de plus insoutenable a priori que d’en hériter à son tour ? Miroir de nos propres travers, inhérent à tout arbre généalogique. Faisons fi des rancœurs propices aux règlements de comptes toxiques, car c’est peut-être en cette tension que se loge toute la richesse de la transmission. Devenir soi, par identification puis distanciation. En piochant, comme dans une corbeille pleine de fruits, les traits de caractère arrivés à maturité qui nous ressemblent le plus. Un beau compromis quand on sait que la pomme ne tombe jamais loin du pommier.


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