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Les sentiers de la gloire

Publié le 04 avril 2014 par Dukefleed
Les sentiers de la gloireQuand la Grande Muette perd la tête...
La Grande Guerre, 1916, un général français ordonne d’effectuer une percée dans les lignes ennemies réputées pourtant imprenables. L’attaque a bien lieu, malgré la vaine résistance du Colonel Dax, et se révèle être une boucherie. Les hommes épuisés rebroussent chemin. L’objectif n’est pas atteint pour l’Etat Major, il faut donc trouver des coupables. Quelques soldats sans défense devront donc servir d’exemples. Le colonel Dax va essayer de protéger ces hommes contre cette injustice qui leur est faite.Kubrick démontre, avec ce film, tout ce qui va faire la force, l’efficacité et la singularité de son œuvre, aussi bien dans la mise en scène que dans le propos. Tout d’abord le thème, Kubrick n’a pu présenter son film en France avant 1975. Réputé trop partial, anti français et anti militariste ; le Quai d’Orsay fera pression, en pleine guerre d’Algérie, pour que les autorités américaines fassent le nécessaire pour que ce film ne passe pas la frontière. Anti militariste Kubrick, bien sûr, au regard de sa filmographie (« Les sentiers de la gloire », « Full metal jacket », « Docteur Folamour ») ; cependant sa réflexion va bien plus loin qu’un positionnement que l’on pourrait croire manichéen. Avec ce film butoir, il pose les bases d’une réflexion plus large sur les mécanismes de déshumanisation. Ici, le tableau est éloquent ; chacun participe sans jamais se sentir responsable ; une responsabilité supérieure écrasante dédouane chacun de son propre libre arbitre. La seule exception, bien que modeste car au début du film il se plie tout de même à un ordre criminel, est le colonel Dax ; mais il n’est pas militaire de carrière (avocat dans ce civil). Quelle ironie. Donc chacun se réfugie derrière un supérieur ou derrière le code militaire pour couvrir une erreur voire un meurtre indirect.Les sentiers de la gloire, un film de guerre ? En fait, pas que ; mais surtout pas vraiment. Au bout de 35’, plus de scènes de guerre ; et elles ne sont qu’au nombre de deux dans le film. Ces dernières se gardent bien déjà de montrer l’ennemi, les lignes adverses ; mais surtout montrent le caractère antihéroïque et dérisoire de ces attaques. L’armée est habilement et finement ridiculisée. Les véritables scènes fortes du front se situent dans les tranchées, il en dresse une peinture très juste rarement reproduite. Kubrick, avec de longs travellings dignes d’une Steadycam actuelle, nous plonge au cœur de la tranchée. Il démontre donc dès 1957 son intérêt pour la technique et l’utilisation des procédés de capture d’image les plus modernes ; avec « 2001… » il utilisera même des caméras de la NASA. Cette modernité technique est relayée aussi par une écriture très actuelle et un rythme vif particulièrement précurseur. Il n’a que 29 ans et affiche déjà un sacré potentiel.Ce n’est pas un film de guerre donc. Kubrick se place ici comme un observateur distant et ironique de la nature humaine. Il plante le décor d’une tragicomédie ; hypocrisies, lâchetés déguisées ou non sont le fil rouge de la narration. Son réquisitoire vise moins la boucherie que l’ambition aveugle d’officiers cyniques, avides de gloire qui vont jusqu’à ordonner de tirer dans leur propre camp et font fusiller quelques gars non obéissant pris plus ou moins au hasard pour l’exemple. JJ Annaud dans « Stalingrad » offrira la même scène, comme quoi en tout temps et dans toutes les armées, on observe des comportements similaires. Ensuite, il dresse un portrait au vitriol d’une justice militaire de pacotille. L’injustice touche donc toujours les faibles que ce soit dans les tranchées ou dans un tribunal.Kubrick exalte ici des valeurs intemporelles et universelles comme la paix, la justice et l’équité.A voir absolument.
Sorti en 1957

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