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362ème semaine politique: Valls va-t-il sauver la France ?

Publié le 12 avril 2014 par Juan
362ème semaine politique: Valls va-t-il sauver la France ?

En une dizaine de jours à la tête du gouvernement, on l'a finalement peu vu. Un discours de politique générale devant les députés, répété devant le Sénat le lendemain. Quelques consignes, trop de commentaires. Manuel Valls s'est échappé de la caricature sarkozyenne.

Pour combien de temps ?


Son discours n'a pas surpris. Il a déçu.

Il a plu à "sa majorité", aux éditocrates, au centre-droit et même plus loin à droite. 
Valls a fait du Valls.
Ou du Hollande. Faut-il chercher une paternité ? Son discours promet du sang et des larmes. On s'y attendait. Il y a des comptes à redresser, une décennie de gabegie à droite assez stupéfiante, une crise séculaire, 50 milliards d'euros qu'on nous promet de trouver presque sans douleur ni impôts impies supplémentaires. François Rebsamen, nouveau ministre du Travail, confiera quand même plus tard qu'il y a 11 milliards à trouver sur la Sécu.
Mais mardi à l'Assemblée, Valls a de jolies formules, ça sent bon la déclaration de campagne. Valls se prépare pour 2017, il bosse à fond. Dans quelques jours, les premiers sondages diront qu'il est encore plus populaire.
Valls bouffe Pépère. Je répète "Valls bouffe Pépère" https://t.co/AiFkPWkiy6
— Juan (@Sarkofrance) April 11, 2014
Mais Valls n'est pas Renzi, son homologue italien.
Nulle trace d'une promesse de 10 milliards d'euros de relance. En France, Valls est "pro-entreprise". Le catalogue de mesures est sans surprise. Il s'entête sur le Pacte de Responsabilité auquel on a accoler "solidarité" pour faire genre. Ce Pacte, un donnant-donnant - embauches contre baisse de cotisations - est une imposture. Si les embauches ne sont pas au rendez-vous, nous remboursera-t-on les cotisations non versées ? Bien sûr que non.
Valls ajoute 10 milliards au CICE, supprime ou réduit pour 6 milliards d'impôts et taxes diverses qui frappent les entreprises (C3S, IS, surtaxe sur l'IS) ... et promet zéro charge pour l’employeur d’un salarié payé au SMIC.  La trappe à bas salaires se referme.
L'effort de "solidarité" est simple, court et curieux: 4,5 milliards d’euros d’allègement de cotisations salariales, un autre milliard pour les artisans et travailleurs indépendants. Valls trouve la formule qui claque: "dès le 1er janvier 2015, elles seront diminuées pour les salaires au niveau du SMIC pour procurer 500 euros par an de salaire net supplémentaire."
Valls donne-t-il des gages à la Commission européenne ? A Berlin, la veille du discours, le duo Montebourg/Sapin ravit les éditocrates. Les deux locataires de Bercy rencontrent chacun leurs homologues, chacun dans leur coin. L'un dit que la priorité, c'est la croissance. L'autre répète qu'il préfère d'abord le "respect des engagements budgétaires". Le verbiage politique n'amuse plus.
L'Europe démocratique va vivre quelques élections dans six semaines. Un parlement puis une commission à renouveler. La grande négociation du Traité transatlantique continue dans le plus grand secret. L'Europe délaisse sa défense au profit du redressement de ses comptes publics. Les peuples boudent les urnes ou préfèrent quelques nouvelles variantes néo-fascistes comme en Hongrie. On cherche les alternatives.
Une énième fois, la France cherche un sursis à Bruxelles et à Berlin

Le pire n'était pas là. 

A Paris, Valls avait une belle nouvelle, un hochet pour divertir l'assistance, la réforme territoriale. Supprimer la moitié des régions, et quelques grosses poignées de départements, voilà de quoi agiter la classe politique et nos médias professionnels pendant quelques heures, quelques jours. La manoeuvre amuse, Valls promet du temps, 2021 pour ce résultat économe.
Le pire avait dépassé le ridicule. 
Le weekend durant, une fraction croissante des députés socialistes menaçaient de ne pas voter la confiance au plus à droite des leurs devenu premier ministre. On allait voir ce qu'on allait voir si la feuille de route n'incluait pas une sacrée inflexion sociale, ou une renégociation de ce Pacte "irresponsable". Deux jours avant le méfait, le JDD publiait la liste des 88 parlementaires ainsi énervés.
Finalement, de ces 88 députés socialistes et leurs 17 collègues écologistes, seuls 11 des premiers et 6 des seconds osèrent l'abstention le jour du vote. Par 306 voix contre 239 contre, et 26 abstentions, Manuel Valls a obtenu cette confiance après un faux suspense qui ne servait que nos éditocrates.
Le ridicule devenait le pire.
Le lendemain, Valls invente le "conseil de gouvernement". La com' insiste sur la "méthode". Valls serait le gars efficace. Il choisit ses secrétaires d'Etat, ils seront 14. On compose avec toutes les tendances du PS, petite cuisine habituelle qui indiffère. Hollande a juste attendu 8 jours pour ces désignations et mettre la pression sur les fortes têtes. Quelques nominations peuvent faire plaisir. Mais voici le plus drôle.
On croirait une fausse dépêche du Gorafi mais ce n'est que la réalité: Harlem Désir est viré de la direction du PS pour devenir secrétaire d'Etat aux affaires européennes.
Le pompon, c'est maintenant: c'est un chassé-croisé. "Lui président" envoie son secrétaire général à la tête d'une Caisse des Dépôts qui n'avait rien demandé. Pour mieux récupérer Jean-Pierre Jouyet, l'ami de la famille, l'ancien ministre des affaires européennes de Sarkozy entre 2007 et 2009. Il parait qu'il vaut mieux travailler avec ses potes. Vendredi, le PS se fend d'un communiqué pour féliciter Alain Finkelkraut pour son élection à l'Académie Française...
Hollande file au Mexique, une visite de trois jours. Son ancienne compagne se rappelle à son bon souvenir. Un tweet, encore un, en faveur d'une mère privée de visite auprès de ses enfants depuis près de 900 jours.
Ségolène Royal enterre un peu plus l'eco-taxe. Le Conseil d'Etat impose une hausse rétroactive d'une quarantaine d'euros par ménage pour le starifs EDF.
Le 12 avril, le Front de gauche et quelques syndicats appellent à manifester.

Le pire est aussi à droite.

Manuel Valls fait le spectacle, mais observons la droite. Henri Guaino est renvoyé en correctionnelle pour outrage à magistrat. L'ancienne plume de Sarkozy avait insulté le juge Gentil en mars 2013, quand ce dernier avait osé inculpé son mentor pour abus de faiblesse. Christine Boutin, ex-ministre de la République, plonge encore: "l'homosexualité est une abomination". Plus drôle, le bal des ambitieux agite à l'UMP. Fillon demande des comptes à Copé. Wauquiez s'autorise un énième publi-reportage pour soigner sa cote. La droite recycle ses recalés du suffrage universel sur les listes européennes. Alain Juppé, brillamment réélu à Bordeaux pense à 2017  - "Je n’ai pas dit que je n’y pensais pas."
Mediapart a récupéré quelques-uns des enregistrements clandestins de Patrick Buisson. On y apprend comment Nicolas Sarkozy avait réalisé un sondage ... sur Dominique Strauss-Kahn en 2011, au frais des contribuables.
Jeudi, Marine Le Pen déploie sa haine tranquille sur le plateau de France 2.  
Le FN caracole en tête des sondages pour les européennes. Elle fustige une "interdiction du porc dans les cantines scolaires" publiques qui n'existe pas autrement que dans ses fantasmes . Ses maires frontistes ont pris leur fonction. A Hénin-Beaumont, Steeve Briois a viré la Ligue des Droits de l'Homme d'une local payé par l'ancienne municipalité. A Fréjus, on retrouve une video du nouveau maire David Rachline qui plaisante sur Hitler. Le 5 avril, la seconde édition de Jour de Colère est un immense fiasco.
Vendredi, Valls apparaît presque contrit. Il a passé quelques heures avec les partenaires sociaux, pour "accélérer" la mise en oeuvre du Pacte. Il déboule, presque gauche, sur le perron de Matignon. Le dialogue social, c'est ma "marque", assène-t-il devant les caméras.
On devrait sourire devant cet effort de com'.
Ami socialiste, où es-tu ?
Crédit illustration: DoZone Parody


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