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Les ombres de la transparence

Publié le 16 mai 2008 par Venividivinci
Une musique disco, des décors aux couleurs vives et des petits personnages aux faux airs de Playmobil animés, le tout entre une mine d’uranium, le cœur d’un réacteur et le duveteux parquet d’un appartement tous réduits à l’état de jouets. Ainsi va Areva, qui irradie depuis de nombreux mois les ondes de ses propres ondes pédagogiques et ludiques : une démarche somme tout légitime pour un acteur d’un secteur nucléaire – voire, plus largement, énergétique – nimbé de toxicité médiatique. De son côté, Intermarché décortique le temps d’une campagne aux accents cartoonesques le process de fabrication de ses produits de marque propre, via ses usines qui le sont autant, ou encore la fraîcheur de sa marchandise, incarnée par des pêcheurs enjoués au milieu de vagues crayonnées et animées.
Dans le mælström des informations commerciales, la pédagogie a du bon. Et la fraîcheur du ton est a priori peu nuisible. Elle interroge pourtant : faut-il verser dans l’infantilisation pour traduire une supposée transparence ? Le pédagogisme n’entraîne-t-il pas une simplification excessive ? Nous sommes dans le diktat de la clarté, le curseur est poussé toujours plus loin sur l'échelle de la transparence. On achète désormais avant tout une éthique, une confiance, une transparence. Une attitude qui contraste avec la période précédente : pendant des décennies, le marketing prospérait sur le concept de la boîte noire, via une croyance absolue et aveugle dans les process industriels. La marque était un totem et la promesse du produit relevait de la pensée magique. Désormais, face à la peur de la mystification, prévalent le sérieux de la marque, le rationnel de la démonstration et le primat de la confiance. Le marketing de la promesse puis celui de la preuve ont cédé le pas au marketing de la démonstration et de l’engagement. Les mentions et les labels ne suffisent plus, c’est tout le process qui passe au scanner du consommateur paradoxal.
Etrange mouvement, en effet, de la société de consommation qui subit concomitamment un désenchantement méthodique – les marques doivent rassurer – et un ré-enchantement forcené – les marques doivent faire rêver. Cela peut donner naissance à des communications décalées, où le ton – excessivement enjoué – tend à desservir un propos qui se veut crédible. Tout montrer, c’est ne rien montrer.

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