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Hollande re-présidentialise pour son An 3

Publié le 07 mai 2014 par Juan
Hollande re-présidentialise pour son An 3

Pour marquer le passage à son An Trois, François Hollande a beaucoup donné. Une longue confidence  à quelques heures de sa seconde bougie élyséenne au Journal du Dimanche ce 4 mai, puis une interview décidée le dimanche soir pour le mardi matin sur RMC-BFM devant Jean-Jacques Bourdin, et un déplacement en banlieue.

La forme était réussie, le fond inchangé. Attaqué de toutes parts, Hollande joue sa carte personnelle jusqu'à la caricature du régime présidentiel.

Au JDD, il promet le passage prochain à une seconde étape du quinquennat, davantage tournée vers le pouvoir d'achat, rendu possible par un "redressement économique" bientôt réussi.
L'hypothèse d'un quinquennat en deux temps n'est pas nouvelle. A l'automne 2012, certains, tel le sociologue Emmanuel Todd, applaudissaient à l'idée d'un "mitterrandisme à l'envers": une politique d'abord conventionnelle en début de quinquennat - rendue nécessaire par les circonstances et possible par l'absence de promesses démesurées - avant un tournant radical - contraint ou volontaire en faveur du pouvoir d'achat et de la justice sociale. Ces optimistes ont été épuisés ou découragés par le systématisme hollandais dans la politique de l'offre
Car la politique économique et sociale du gouvernement Hollande n'a cessé de se déséquilibrer, aux détriments d'un interventionnisme même modeste (personne n'a cru Hollande révolutionnaire) et (2) d'une inflexion politique sociale réelle rendue nécessaire par les désastres de la décennie précédente. Il n'en fut rien. En lieu et place de tout cela, Hollande argumente qu'il "protège" l'essentiel en essayant de "réformer", c'est-à-dire libéraliser plus fortement qu'une droite colbertiste, outrancière et apeurée. Le socialisme de l'offre réduit la contribution sociale des employeurs avec les mêmes arguments d'une droite néo-libérale au pouvoir.
Mardi matin, pour répondre aux attaques, Hollande face à Bourdin a martelé trois arguments.
Primo, seule compte la lutte contre le chômage au point qu'il a répété qu'il ne se représentera pas s'il échoue ("Ce n'est pas mon élection ou ma réélection qui me préoccupe, c'est l'avenir de la France."). On notera le courage et l'habileté. Le courage, car le prétendu bravache Nicolas Sarkozy n'avait jamais osé sortir ce chantage aussi clairement. L'habileté car c'est une façon de rassembler son camp auprès de lui. Le Parti socialiste, qui n'existe que pour grâce à son efficacité institutionnelle a horreur du vide de candidatures.
Secundo, il défend qu'il a découvert mal communiqué en mai 2012 sur l'ampleur de la dégradation de la compétitivité du pays. Ce qui a posteriori justifie son tropisme en faveur de la baisse du coût du travail qui a "heurté" ses "amis politiques." Cette course à la baisse des salaires avec, au choix, le tiers monde, les pays émergents ou les plus "compétitifs" du Grand Marché à 28 a quelque chose de politiquement désespérant, de psychologiquement dégradant.
"Je n’ai pas suffisamment souligné la dégradation de compétitivité française. Le rapport Gallois a très bien situé le mal français. Je n’ai alors pas tergiversé." François Hollande, 6 mai 2014

Tertio, il plaide le droit à l'action au long cours. Il a raison, un quinquennat se juge sur 5 ans. L'argument a été répété sous toutes ses formes et toutes les ondes pendant cette journée anniversaire du 6 mai. Pourtant, il a oublié l'essentiel, et ce n'est pas qu'une question de perception: cette politique obsessionnelle de l'offre à l'oeuvre au sommet de l'Etat et à Matignon n'a rien lancé de structurel pour réduire les inégalités du pays, lutter contre la précarité grandissante. Qu'attendre donc en fin de quinquennat ? Les défenseurs du plan pauvreté lancé il y a un peine un an ont du quémander une exemption à "l'effort" austéritaire pour sauver la revalorisation du RSA annoncée en 2013 par Ayrault. Nous parlons du RSA, 460 euros par mois pour une personne seule. Nous pourrions multiplier les exemples.
Hollande a poursuivi sa journée de communication par un tour en banlieue, Villiers-le-Bel, celle d'où les émeutes de 2007 sont parties après la mort de Moushin et Laramy.
C'était un signe, un pied de nez, un clin d'oeil à l'ancien Monarque dont certains réclament à droite le retour comme un sauveur présidentiel. Jamais Nicolas Sarkozy n'avait eu les couilles de se rendre dans une telle banlieue pendant son quinquennat.
Pour le reste, il fallait se limiter à faire le bilan provisoire, détaillé et évolutif de ce quinquennat.
c’est fou le nombre de commentaires sur Twitter sur les propos de Hollande dans le JDD sans les avoir lu. #ModernNoeuds
— Juan (@Sarkofrance) May 4, 2014

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