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La nausée

Publié le 12 mai 2014 par Pralinerie @Pralinerie
Voilà un roman de Jean-Paul Sartre qui traîne dans ma PAL depuis le lycée (non, je ne vous dirai pas combien ça fait en années). Figurez-vous que j'avais dévoré son théâtre mais que ce premier roman, au titre peu engageant, et que nos professeurs nous décrivaient comme le manifeste de l'existentialisme, me tentait peu.

Ce roman prend la forme du journal intime d'Antoine Roquentin, individu qui a baroudé à travers le monde avant de se fixer à Bouville où il entreprend une biographie du marquis de Rollebon. La vie d'Antoine Roquentin n'est pas palpitante. Entre ses séances à la bibliothèque, ses rares aventures et la morne vie d'une ville de province, il mène une existence de rentier et de célibataire sans attache. Pourtant il note un changement progressif dans son rapport au monde. Il examine ainsi la notion d'aventure, qu'il a cherché dans ses voyages, sans jamais la trouver semblable à ce que les livres lui avaient montré. "Ce sentiment d'aventure ne vient décidément pas des événements : la preuve en est faite. C'est plutôt la façon dont les événements s’enchaînent. Voilà, je pense, ce qui se passe : brusquement on sent que le temps s'écoule, que chaque instant conduit à un autre instant, celui-ci à un autre et ainsi de suite ; que chaque instant s'anéantit, que ce n'est pas la peine d'essayer de le retenir, etc. Et alors on attribue cette propriété aux événements qui vous apparaissent dans les instants ; ce qui appartient à la forme, on le reporte sur le contenu [...] Le sentiment d'aventure serait, tout simplement, celui de l'irréversibilité du temps. Mais pourquoi est-ce qu'on ne l'a pas toujours ? Est-ce que le temps ne serait pas toujours irréversible ?" Il note ses pensées. Répétitives. Angoissantes. Jusqu'à la mélancolie. Il attend qu'il se passe quelque chose. Il panique de peur de manquer ce qui va arriver. Il lui vient comme une nausée. Une conscience aiguë, exacerbée de ce qui l'entoure et de sa qualité d'être humain : "C'est donc ça la Nausée : cette aveuglante évidence ? Me suis-je creusé la tête ! En ai-je écrit ! Maintenant je sais : J'existe - le monde existe - et je sais que le monde existe. C'est tout. Mais ça m'est égal". Avec la conscience de l'existence, cette révélation cartésienne, vient la question de comment l'utiliser. Faut-il poursuivre ces recherches sur le marquis de Rollebon ? Faut-il se laisser vivre ? Que faire de cette liberté de l'existence ? Si Roquentin se propose un but dans l'écriture (ou l'art), c'est peut-être à chacun de trouver son propre chemin... Ce roman, à la fois banal par sa forme et son style, a des côtés ennuyeux et répétitifs. Néanmoins, il constitue une belle introduction à l'existentialisme (Qui n'a pas étudié le fameux L'Existentialisme est un humanisme ?) et à la lecture de L'être et le néant (qui n'est pas pour tout de suite). Il pose des questions universelles sur l'existence, la temporalité de l'homme et sa liberté. Car au-delà de la nausée, Roquentin nous invite à exercer notre liberté.

eglise

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