Ils se croisent une fois, deux fois… La troisième fois, ils pensent se reconnaître, cherchent en vain et le plus grand tend sa carte de visite au plus petit. Celui-ci, naturellement, tend la main pour la prendre, mais le premier ne la lâche pas. Les premiers rires jaillissent de ce geste : tendre sa carte de visite (précisant son identité) n’implique pas la donner. Pourtant le geste est simple. Mais que faire d’une carte de visite reçue, sinon la jeter avant qu’elle s’ajoute à celles qui s’accumulent inutiles… Le peu de mots qu’ils disent (« allo », « non », et quelque latin de cuisine) ne sont, au fond, que des gestes de la bouche, exactement comme ceux des mains, de la tête, des jambes. Cependant, ces deux-là ne font pas la critique de nos usages, ils essaient de s’y conformer : tristesse du deuil, amabilité de l’ange, etc. Ils n’y parviennent pas sans vraiment en avoir honte : leur démonstration de hip hop est hilarante et leur naïveté est touchante. Nous rions avec eux de ce qui pourrait nous émouvoir, nous effrayer dans la vie courante. Et que dire alors de la dernière scène, celle de la séduction ? Sans blesser personne, elle est irrésistible.
J'ai vu ce spectacle à l'International Visual Theâtre (IVT) à Paris.