Magazine Société

Raphaël Aubert, invité de Tulalu!?, au Lausanne-Moudon

Publié le 02 juin 2014 par Francisrichard @francisrichard
Raphaël Aubert, invité de Tulalu!?, au Lausanne-MoudonRaphaël Aubert, invité de Tulalu!?, au Lausanne-Moudon

Les soirées littéraires de l'association Tulalu!?, au Lausanne-Moudon, se suivent et ne se ressemblent pas.

Ce soir, Tulalu!? recevait son parrain, Raphaël Aubert, et l'assistance a connu un grand moment autour de deux des livres de cet écrivain et journaliste (il faut bien vivre) et d'autres de ses textes.

Le premier livre est un roman, La terrasse des éléphants, publié en 2009 aux éditions de L'Aire, réédité en 2011, dans la collection L'Aire bleue.

Le héros de ce roman est à moitié Raphaël Aubert, puisqu'il s'appelle bien Raphaël, mais que son patronyme est Santorin, ce qui n'est pas très éloigné du patronyme du héros du Roi lépreux, le roman de Pierre Benoit, un certain Raphaël Saint-Sornin...

Par le plus grand des hasards l'action du roman de ce dernier auteur, bien oublié aujourd'hui, se passe à Angkor, alors que s'y déroule une partie du roman de Raphaël Aubert, dont le titre provient du célèbre lieu d'Angkor Thom...

Raphaël Aubert se pose souvent la question du destin et du hasard et penche plutôt pour la réalité du destin, doutant que le hasard existe. Le fait est que son héros, Raphaël, correspondant de guerre, au moment de la guerre du Vietnam (qui a beaucoup marqué l'auteur), croise plusieurs fois, sans la rencontrer, une amie d'enfance, Laure, devenue archéologue...

Pierre Fankhauser qui interroge Raphaël Aubert cite ce passage où le protagoniste du roman dit ce que pense de la vie ce demi-lui-même qu'est l'auteur:

L'Asie a fini au moins par m'enseigner ceci: que le monde n'est qu'une illusion bavarde et ne connaît qu'une seule loi, celle de l'impermanence. N'est que souffrance. Et que l'unique chose que l'on peut espérer dans cette existence c'est un peu de repos.

Le vide; le néant.

A propos du lac Tonlé Sap, qui voisine Angkor au nord et dont la superficie est septante fois en hiver celle d'en été, Raphaël Aubert pose la question révélatrice de sa vision des choses: quel est le vrai lac? celui de l'hiver ou celui de l'été?

Le second livre est un essai, Malraux & Picasso - Une relation manquée. Dans cet essai, Raphaël Aubert montre pourquoi ces deux géants se sont manqués, bien que s'étant rencontrés plusieurs fois. Comme Raphaël Aubert a une réelle admiration pour l'écrivain amateur d'arts et pour le peintre, il aurait bien aimé qu'ils nouent une relation à toutes épreuves plutôt que de se tourner le dos, ostensiblement...

Pour illustrer leur malheureuse inconciliabilité d'humeurs, Raphaël Aubert rappelle l'anecdote de l'exposition consacrée en 1966, pour ses quatre-vingt cinq ans à Pablo Picasso, absent le jour du vernissage, sous le ministère de la culture d'André Malraux, qu'il raconte en ces termes dans son livre:

"Croyez-vous que je sois mort?" lui câbla le peintre. A quoi l'écrivain, par retour de télégramme, répliqua non moins vertement: "Croyez-vous que je sois ministre?"

Pendant cette soirée, Raphaël Aubert a lu d'une voix prenante trois textes de son cru, textes d'une grande musicalité: Le mercredi du Danube, qui figure dans la revue Ecriture 61, Sous les arbres et au bord du fleuve, qui figure dans l'ouvrage collectif Rencontre, publié à L'Aire, et des extraits de son journal de 2013, à paraître cet été sous le titre Cet envers du temps, titre inspiré du célèbre texte de Louis Aragon où il dit appeler ainsi la poésie:

J'appelle poésie cet envers du temps, ces ténèbres aux yeux grands ouverts, ce domaine passionnel où je me perds, ce soleil nocturne, ce chant maudit aussi bien qui se meurt dans ma gorge où sonne à la volée les cloches de provocation...

Ce qui pourrait tout aussi bien s'appliquer à la littérature, d'une manière générale...

Le texte de Rencontre est l'occasion pour Raphael Aubert de dire que la nature n'est ni bonne ni mauvaise, elle est. Et bien présomptueux sont, à ses yeux, ceux qui prétendent savoir ce qui est bon et ce qui est mauvais pour elle...

Cette soirée, d'une grande qualité, animée par Pierre Fankhauser avec beaucoup de sensibilité et, parfois, de malice, a été ponctuée par des intermèdes musicaux, qui ont souligné les textes avec bonheur et qui ont été magnifiquement interprétés par la flûtiste Delphine GrataloupBergère Captive, Jade et Toan-Yan (La Fête Du Double Cinq) de Pierre-Octave Ferroud et Syrinx de Claude Debussy.

Francis Richard

La terrasse des éléphants, 204 pages, L'aire bleue

Malraux & Picasso - Une relation manquée, 124 pages, Infolio


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Francisrichard 12008 partages Voir son profil
Voir son blog

Magazine