Magazine Culture

Réparer les vivants, Maylis de Kerangal

Par Laurielit @bloglaurielit

reparer-les-vivants,M137228Réparer les vivants…que le titre est beau, vrai.

Simon Limbres, 19 ans, est victime d’un accident de la route au retour d’une escapade de surf avec ses amis au petit matin. Quand il arrive à l’hôpital, son cerveau est déjà touché, et il n’y a plus rien à faire. L’activité cérébrale, inactive, atteste de la mort de Simon. S’enclenche alors une intervention de multiples personnes pour qui le temps est compté, pour qui la pression monte et qui ont pour objectif final de réparer, voire de sauver les vivants.

 Plusieurs sujets sont traités dans ce livre. Tout d’abord la mort bien entendu, et bien plus dur encore, la mort d’un enfant de 19 ans. Il y a le personnel hospitalier qui doit annoncer à une mère qu’il n’y a plus rien à faire, que certes elle voit que son enfant respire, que son corps s’élève et se rabaisse mais cela n’est qu’artificiel et l’activité cérébrale, elle, est inexistante et atteste du décès. La violence des mots, des images, de l’image du corps de Simon qui ne correspond pas à l’image d’un corps mort que la plupart des gens se font, voilà ce à quoi fait face la mère de Simon. Etre celle à qui on l’annonce puis l’annoncer aux autres, aux proches, à Juliette et à la petite Lou ; faire face, comme au creux de la vague, amortir les coups, tenir en équilibre parce que ce n’est pas fini. Il faut maintenant se positionner : Simon est-il donneur ? Prendre une décision, vite, car le temps est compté pour les organes, pour les receveurs.

Avec beaucoup de délicatesse, de précision, d’analyse, Maylis de Kerangal nous emmène au cœur de ces interrogations, du point de vue des parents mais aussi du personnel hospitalier car une fois que l’on accepte de donner, il y a une réaction en chaîne, du stress, du grand professionnalisme et peut-être au bout, la vie qui va continuer pour un être vivant que l’on a réparé. J’ai aimé aussi le point de vue du receveur, s’imaginer qu’il y a des gens qui doivent être disponibles à toute heure « c’est maintenant » pour venir se faire greffer un organe, que cette attente rythme leur vie, qu’ils ne peuvent rien imaginer faire (ou qu’ils ne peuvent pas selon l’organe touché).

Une profonde analyse, la sensibilité de l’auteure et aussi beaucoup de réalisme nous aident à mieux comprendre ce monde. J’ai personnellement été toujours attirée par le milieu hospitalier donc j’ai beaucoup aimé le thème, l’engagement du personnel hospitalier, c’est comme un hommage aussi que Maylis de Kerangal leur rend.  Il faut donc être prêt à rentrer dans ce roman, dans ce milieu, dans la ligne de séparation entre la mort et ce que nous, vivants, nous pouvons réparer pour d’autres. Il faut être prêt au style particulier, parfois rigide, parfois tendre, parfois incisif et court, parfois lent de Maylis de Kerangal …pour moi c’est un énorme coup de cœur. J’ai terminé ce roman le corps en tension, le cœur serré mais avec une jolie leçon de vie sur les transplantations…et comme une envie de crier à tous d'être donneur, car au moins c'est peut-être à cela que peut servir notre mort inévitable.

L’avis de Leiloona, Le monde de mirontaine, Clara et les mots entre autres.

A noter que Maylis de Kerangal a reçu récemment le prix Relay!


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Laurielit 3519 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Dossiers Paperblog

Magazines