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Union méditerranéenne: Le projet Sarkozy écorné

Publié le 20 mai 2008 par Danielriot - Www.relatio-Europe.com
Ajaccio - Corse
Crédit photo : Massimo Zunino/FlickR

Décryptage RELATIO par Jacques DEHAIRE

Loin, loin, très loin des espérances formulées par Sarkozy. Le projet d’Union pour la Méditerranée qui doit être lancé le 13 juillet prochain n’est pas conçu de la même manière à Paris et dans les bureaux de la Commission. Barroso et son collège ont pris à la lettre l’accord entre les gouvernements de l’Union qui coupait déjà les ailes aux idées généreuses mais vagues et dépourvues d’esprit communautaires du chef de l’Etat. En jouant sur plusieurs tableaux.

ORGANIQUE : Conformément au refus des 27 de voir se développer une coopération régionale hors des structures communautaires, le projet rassemblera 44 pays riverains de la Méditerranée et de l'Adriatique. A savoir : les 27 Etats membres de l'UE, plus les 13 membres et observateurs du "processus de Barcelone" lancé en 1995 par les Européens pour un partenariat avec les pays du sud de la Méditerranée (Mauritanie, Maroc, Algérie, Tunisie, Libye, Egypte, Jordanie, Territoires palestiniens, Israël, Liban, Syrie, Turquie et Albanie), ainsi que la Croatie, la Bosnie, le Monténégro et Monaco.

SYMBOLIQUE : Lors du sommet européen de mars, la France avait déjà dû accepter que ce projet se contente essentiellement de redynamiser un processus de Barcelone jugé(un peu sévèrement) amorphe. La Commission souhaite que le projet soit rebaptisé "Processus de Barcelone: Union pour la Méditerranée", pour refléter cette continuité  et cette philosophie d’action. Bruxelles ne veut pas jeter le bébé avec l’eau du bain. Des améliorations, oui. Des opérations « on efface tout et on recommence », non.

INSTITUTIONNEL : L’idée d’une co-présidence est maintenue, mais cité européen, c’est la Présidence du Conseil qui l’assumera. Pas de création d’un poste spécial (que Sarkozy aurait voulu assumer durant deux ans) Les pays du Sud pourront désigner un Président pour deux ans, mais coté de l’Union, c’est le pays qui préside le Conseil ou le Président qui sera nommé en vertu du traité de Lisbonne qui sera chargé de cette tâche.

FINANCIER : Côté financement, Bruxelles veut en effet privilégier le recours à des fonds privés, à des fonds d'Etats, membres ou non de l'Union, ou encore aux institutions financières internationales, plutôt que les fonds européens.

POLITIQUE : Conformément aux engagements de l’Union et aux pressions du Parlement européen, les aspects « droits de l’homme » ne seront pas oubliés dans la mise en place et le fonctionnement de cette organisation. Nombre de partenaires de la France et d’eurodéputés avaient été choqués par  la récente "tournée" de Nicolas Sarkozy en Egypte, en Tunisie et en Libye, où il a promis aux dirigeants "qu'ils ne seront pas embêtés sur les questions de droits de l'Homme et de démocratie ». Un rappel : les relations extérieures de l'UE sont fondées sur la promotion et le respect des droits de l’Homme…

Ces éléments (parmi d’autres) ne constituent que des propositions. Ce sont bien sûr les chefs d’Etat et de gouvernements qui feront les choix définitifs, mais la Commission est globalement approuvée par la plupart des pays membres (Allemagne en tête) dans sa volonté de serrer les boulons pour que cette coopération euro-méditerranéenne renforcée soit faite dans un esprit communautaire et ne vide pas de leurs pouvoirs les institutions de l’Union. Reste à savoir ce que Sarkozy pense de ce qui reste de son « initiative » lancée unilatéralement, avec des soucis plus médiatiques que réalistes.

Jacques DEHAIRE



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