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Suicide Club

Publié le 29 juillet 2014 par Olivier Walmacq

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genre: thriller, inclassable, expérimentale (interdit aux - 16 ans)
année: 2002
durée: 1h40

l'histoire: 54 lycéennes se jetant sous les roues du métro de Tokyo, un site internet prophétisant des suicides collectifs, un ruban constitué de plusieurs centaines de carrés de peau humaine retrouvé par la police, un girls band de jeunes adolescentes chantant une pop aux paroles très ambiguës… Quel vent de folie souffle sur la capitale japonaise ? L’inspecteur Kuroda et son équipe vont tenter de trouver une réponse à cette vague insensée de suicides et de mystères

la critique d'Alice In Oliver:

Le Japon, et plus largement l'Asie toute entière, sont en pleine déprime. Voilà ce qu'affirme Sono Sion avec Suicide Club, réalisé en 2002. Autant le dire tout de suite: il s'agit d'un film choc, désespéré et profondément torturé. Suicide Club ne s'adresse pas vraiment au grand public, tout du moins, à ceux qui attendent un gros blockbuster formaté, ou encore à un film d'horreur avec plein de tortures gores et "craspecs". Expatrié à San Francisco, Sono Sion s'ennuie loin de son pays.
En pleine déprime, il se met à écrire 
Jisatsu Sâkuru, roman dont la vision poétique et ésotérique n’est pas à la portée de tous les lecteurs.

"Je ne veux pas que le lecteur comprenne... d'ailleurs, il n’est pas important de comprendre. Une fois le livre terminé, il ne se retrouve pas avec un script, mais deux ; je ne sais pas si j'ai d’abord écrit le livre ou le scénario... et je ne sais pas quelle part de moi-même a écrit l'un ou l'autre....
De retour au Japon, il demande au mangaka Furuya Usamaru
 d'adapter son histoire. Ce dernier refusera, sous prétexte que le roman et le scénario sont auto-suffisants. Lui laissant le champ libre pour reprendre l'histoire comme il le désire, il finira par accepter.
Parallèlement, le romancier Sadamu Yamashita
 écrira un autre Jisatsu Sâkuru (c'est le titre original de Suicide Club) à la fin plus explicite.

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Suicide Club peut s'appuyer sur un scénario original et pour le moins déroutant, qui n'obéit à aucune structure narrative, tout du moins à un schéma de facture conventionnelle. Attention, SPOILERS ! 54 lycéennes se jetant sous les roues du métro de Tokyo, un site internet prophétisant des suicides collectifs, un ruban constitué de plusieurs centaines de carrés de peau humaine retrouvé par la police, un girls band de jeunes adolescentes chantant une pop aux paroles très ambiguës…
Quel vent de folie souffle sur la capitale japonaise ? L’inspecteur Kuroda et son équipe vont tenter de trouver une réponse à cette vague insensée de suicides et de mystères

La première partie de Suicide Club ressemble à une sorte de thriller fantastique sur fond d'enquête policière. Pourtant, difficile de ranger Suicide Club dans une catégorie particulière. Sono Sion brouille en permanence les pistes pour réaliser une oeuvre totalement inclassable, effrayante (tant sur le fond que sur la forme), ésotérique et expérimentale.
C'est très simple: on tient là le ou l'un des meilleurs films asiatiques de ces quinze dernières années. Suicide Club est une oeuvre complexe, certes difficile d'accès, mais pas totalement inaccessible pour autant.

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Comme l'indique le titre (français) du film, il est donc question de suicide. Dans un premier temps, les suicides ne concernent que des lycéens. En gros, on se tue et on se jette du haut des immeubles (ou encore sur les rails d'un train) parce que c'est la mode.
Certes, présenté comme cela, le propos peut paraître profondément idiot. Pourtant, Sion Sono brosse avant tout le portrait d'un Japon replié sur lui-même, d'une population glacée par les couloirs noirs des métros, un microcosme urbain miné par la peur de l'avenir et une jeunesse qui ne croit plus du tout en son pays.

De ce fait, ce n'est pas seulement la nouvelle génération qui est menacée mais aussi leurs propres parents. Les adultes suivent donc eux aussi le même schéma morbide. Visiblement, pour Sono Sion, Suicide Club fait presque figure de psychanalyse personnelle, mais pas seulement.
Le film est finalement la psychanalyse d'une société toute entière, engluée dans l'individualisme, l'incapacité à communiquer et minée par une profonde déprime. Désormais, la seule issue possible, c'est le suicide ! Mais avant tout, Suicide Club est aussi le résultat d'une profonde colère, non seulement contre les médias qui s'emparent de cette vague de suicides, mais également de l'Etat, finalement peu concerné (voire même presque amusé) par la situation.
Dans Suicide Club, il n'y a donc pas de héros ni de scénario cohérent, tout du moins une histoire respectant une ligne conductrice. En ce sens, la première partie du film, en tout cas ses 45 premières minutes, sont trompeuses. Clairement, cette oeuvre particulière, sombre et sans aucun espoir pourra décontenancer les plus avertis. Pourtant, nous sommes bel et bien devant un petit chef d'oeuvre !

note: 17.5/20


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