Magazine Culture

Party Girl versus Les Combattants (ciné, cinéma)

Publié le 27 août 2014 par Philisine Cave
Hier soir, j'ai découvert deux premiers films français, plutôt situés côté art-et-essai et je suis épatée par la fraîcheur qu'il en ressort. 

Party Girl

image empruntée au site Allociné.com.

Normalement, aujourd'hui, jour de sortie en France de Party Girl (Caméra d'Or du dernier festival de Cannes), vous verrez débouler sur les plateaux télé l'actrice principale Angélique Litzenburger et son fiston et coréalisateur du film Samuel Theis et c'est peut-être ce qui va vous motiver à ne pas aller voir ce film et ce serait bien dommage.  Surexposer cette filiation qui a l'avantage d'attirer les caméras et des journalistes avides de potins, va démotiver peut-être certains spectateurs qui auraient pourtant envie de découvrir un scénario original, une BO fabuleuse, une direction exceptionnelle d'acteurs (la plupart amateurs, ce qui rend l'exercice d'autant plus bluffant), une gestion de la caméra remarquable de naturel et surtout une héroïne d'une complexité rarement vue au cinéma. Certains du public s’ennuieront peut-être, d'autres fuiront cette marginale- ex effeuilleuse et assurément entraîneuse d'un cabaret allemand- qui cherche un temps, l'âge venant (la soixantaine) à rentrer dans la norme sociétale (le fameux mariage avec Michel, un de ses clients) et pourtant. 
Tout est impressionnant dans ce film porté par Angélique Litzenburger et ses acolytes (les enfants, les copines, les habitués du bar, Michel et ses amis) parce que tous jouent avec une justesse et une simplicité, qu'on oublie un moment le film. Party Girl gêne parce qu'il confronte à notre société une femme libre, venimeuse, en constante survie, profondément égoïste, une mère totalement absente de l'éducation de ses enfants (certains la désigneront comme indigne), mais attachante, au profil superbe, intrigante, charmeuse, en marge de tout (et surtout d'elle-même), sincère et forte. Je n'ai pas réussi à l'aimer, je n'ai pas réussi à la détester, je n'ai surtout pas réussi à la juger et c'est peut-être cela, la grande force de ce film : poser un regard sur une personne à part, la faire évoluer, l'écouter et la respecter. 
Réduire Party Girl à Angélique devient réducteur : comment oublier l'amour (familial, le manque, la non-réciprocité), la tendresse de Michel, la délicatesse de Cynthia et de Mario, l'énergie folle des danseuses et des copains de Michel, le franc-parler de Samuel, l'ancrage de Séverine, ces gens de peu (d'amour, d'argent, de joie, de désir ...) symbolisés par la population locale, les confidences ou les déclarations ? Party Girl, très proche de l'univers des frères Dardenne, en plus vrai (ce qui est déjà une gageure). Marie Amachoukeli, Claire Burger et Samuel Theis ont réalisé cinématographiquement le même exploit que Delphine De Vigan dans l'écriture (avec Rien ne s'oppose à la nuit). La Caméra d'Or 2014 est largement méritée.

Les Combattants

image empruntée au site Allociné.com

Un autre premier film, Les Combattants, réalisé par Thomas Cailley (tout seul cette fois) et là encore, j'en suis ressortie estomaquée par l'excellence technique, un scénario en béton, des images magnifiques, deux acteurs qui portent le film en toute simplicité et avec beaucoup de maîtrise, des dialogues savoureux et drôles et encore une fois, une bande-son parfaite. 
Le père d'Arnaud vient de mourir. Charpentier, il laisse l'entreprise à ses deux fils. Le cadet, Arnaud donc, a le choix entre poursuivre l’œuvre paternelle ou s'investir ailleurs. À l'occasion d'un combat sur le sable puis d'un chantier dans un jardin bourgeois, il va infléchir sa décision, aidé en cela par une Madeleine moins calme que le gâteau décrit par Proust.
Les Combattants représente une quête juvénile vers un idéal : Madeleine surdiplômée et constamment en colère décide de s'engager dans l'Armée de Terre pour survivre, Arnaud par attirance et par défi va la suivre. Ces deux héros sont rafraîchissants de sincérité : leur couple évolue, chacun attire la lumière. On pourrait s'attendre à un couple d'amoureux, on découvre deux jeunes adultes en devenir, motivés à dépasser leurs limites. La réalisation de Thomas Cailley impressionne par son respect sur les visages, sa volonté de poser des scènes (en laissant filer la caméra). Adèle Haenel, vraie boule de nerfs, montre un jeu tout en subtilité ; Kévin Azaïs représente la classe absolue : la direction d'acteurs ne montre aucune fêlure. Portant son film sur des images réelles, Thomas Cailley le place ensuite sur le champ surnaturel et tout se tient dans une logique implacable. La fin est parfaite, le début est parfait, le milieu est parfait : bref, ce film est un bijou !

Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Philisine Cave 1568 partages Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Magazines