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382ème semaine politique: le jour où Hollande a perdu 2017

Publié le 30 août 2014 par Juan
382ème semaine politique: le jour où Hollande a perdu 2017

On se souviendra plus tard, longtemps, de cette semaine. Elle fut inattendue, mais peut-être inespérée, certainement décisive. Hollande a tenté un putsch au sein de son camp, un coup de force assez courageux et très détestable. C'était une escalade de plus, comme un long divorce qui aurait pu se dérouler à l'amiable mais s'aggrave finalement jusqu'à briser de la vaisselle et provoquer quelques formules irrémédiables.


Implosion
Cécile Duflot avait provoqué la première déflagration de rentrée, la semaine précédente, en racontant, livre à l'appui, combien son expérience de ministre avait été douloureuse. L'équipe Valls est d'ailleurs en passe de détricoter sa loi sur le Logement. Qui rappellera que l'encadrement des loyers, voté mais déjà remis en cause, était l'une des promesses du candidat Hollande ?
Samedi puis dimanche, Arnaud Montebourg et Benoit Hamon valident l'autre politique.
Puisque deux ministres d'un gouvernement prétendument efficace avaient choisi de dire combien la politique économique du gouvernement auquel ils appartenaient leur semblait contreproductive, ils sont débarqués le lendemain. Quelques heures durant, les deux futurs ex-ministres pensent encore pouvoir "lutter de l'intérieur". Mais le taurillon de Matignon dépose le lundi, dès potron-minet, la démission de son gouvernement tout entier. Aurélie Filippetti, à la Culture, jette l'éponge. Hollande file à l'île de Sein célébrer sous la pluie battante la Libération de 1944. Les images sont effroyables.
On ne plaisante plus. Hollande et Valls sont "sur la même ligne" nous assure-t-on à l'Elysée. "Enfin seuls !" titre avec justesse Politis.
La composition de la nouvelle équipe est sans surprise. C'est le gouvernement des derniers 1000 jours de ce quinquennat, une équipe politiquement rétrécie.
On peutt applaudir la jeunesse enfin reconnue à des ministères clés - l'Education, la Culture, l'Economie. Le ministère du droit des femmes disparaît. Les écologistes refusent de participer. Et il faut se résoudre à l'évidence. La ligne politique accélérée depuis janvier sera amplifiée. Il y a encore quelques éditorialistes errant pour qualifier la chose de tournant libéral.
A force de tourner, on se perd.
Coup de force
La presse, et quelques autres s'amusent au procès facile d'Emmanuel Macron, le successeur de Montebourg à l'Economie. L'homme fut conseiller économique de Hollande, avant de rejoindre son ancien employeur, une banque, de surcroît dénommée Rotschild. Un ministre issu de la Banque ? Quelle horreur ! Le plus drôle est que la critique est également portée par d'anciens supporteurs de la Présidence des riches, les sous-ténors furibards de l'UMP, Nadine Morano et Christian Estrosi. Ce procès était inutile puisque les intentions du jeune homme sont connues. Il avait même livré une édifiante interview avant sa nomination que Matignon a du "recadrer" dès jeudi. Macron réclamait des "dérogations" aux 35 heures.
Macron ouvre son compte Twitter, embrasse Arnaud Montebourg à la passation de pouvoir, et le Monde le qualifie de "Joker de Hollande". Le spectacle était rôdé. Mais Macron n'est pas la question.
Le soir, Valls est sur France 2. "Nous ne menons pas une politique d'austérité !" Il maintient la ligne, malgré des impôts record, une dette à 94% du PIB, une croissance en panne et la déflation qui menace: 50 milliards d'euros d'économies pour financer 41 milliards d'euros de réductions de cotisations employeurs, sans contre-parties ni garanties. Sur l'implosion du gouvernement, c'est la faute à la gauche ! "le problème est venu de la gauche elle-même". Quand il rend les clés de son ministère, Montebourg lui rappelle l'évidence :"Il faut savoir quitter la scène quand on ne sait pas jouer plus longtemps la comédie."

Hollande a donc viré deux contestataires, et il laisse Valls creuser une tranchée irrémédiable sur sa gauche. 


Mercredi, le premier ministre intervient à l'université d'été du Medef. Ce fut une ovation. Valls enfonce le clou à coup de belles formules sur l'entreprise. Il quémande des embauches puisqu'il ne lui reste que cela. Un grand patron d'assurances réclame des "actes" à François Hollande, c'est-à-dire de nouvelles baisses de charges et d'impôts sur le capital.
Pour "accélérer les réformes", Valls poursuit le coup de force du président Hollande: un projet de "loi d'habilitation à procéder par ordonnances" va être présenté au Parlement. En gros, il s'agit de permettre au taurillon de Matignon d'avancer sans vote ni débat parlementaire sur des sujets tels que l'assouplissement du travail le dimanche, ou la libéralisation des professions dites réglementées.
Trouille à droite
Nicolas Sarkozy était trouillard. François Fillon l'a compris. C'est pour cela qu'il tape, et fort. Mardi soir, il fait sa rentrée, dans la Sarthe. Il rappelle son programme neo-thatchérien, de la fin de la durée légale du travail à la refonte du code du travail et un gigantesque plan social dans la fonction publique. Mais la hache frappe encore plus fort sur son ancien patron. Fillon désaggrège l'hypothèse d'un retour quand on a autant de casseroles judiciaires aux fesses: "quand on est à droite, il faut être droit", résume-t-il.
Le grand combat des primaires UMP s'annonce sanglant. Jeudi, l'un des fusibles de Jean-François Copé dans l'affaire Bygmalion se rappelle au bon souvenir de ses anciens patrons. Jérôme Lavrilleux, député européen, qui a confessé devant les caméras le système de surfacturations qui a permis au candidat Sarkozy de tricher une nouvelle fois sur ses dépenses de campagne présidentielle en 2012, prévient: "si on m'exclut de ce parti auquel j'appartiens depuis vingt-cinq ans, alors je reprendrai ma liberté de parole et je parlerai."
Le teasing est formidable !
Christine Lagarde, actuelle directrice générale du FMI, est mise en examen pour négligence dans l'affaire Tapie.
Sarkozy se terre.
Désespoir à gauche
Deux cents députés socialistes signent une tribune de soutien à François Hollande. Il en manque soixante-dix pour faire une majorité. Valls a promis de demander un vote de confiance à l'Assemblée. Mais il a peur. Pour preuve, il veut légiférer sans vote sur quelques sujets essentiels. Lui qui n'avait recueilli que 5% des suffrages aux primaires pourtant ouverte du PS en 2011 estime avoir "le champs libre pour imposer ses idées aux parti". Le PS agonise, la gauche souffre.
Samedi, le Parti socialiste tient sa traditionnelle université d'été à la Rochelle. Après les évènements de la semaine, on en attendait du sang et des larmes. Christiane Taubira, qui est restée  fut l'invitée surprise des frondeurs, assises dans les premiers rangs d'une salle comble. Elle "assume".
Finalement, la gauche est en vrac, écartelée en quatre camps.
Il y a les opposants, irréductibles ou récents; les frondeurs socialistes ou écologistes; les silencieux - dont quelques ministres et leurs soutiens; et les fidèles qui s'accrochent à Hollande ou défendent par conviction le social-libéralisme imposé par le duo Valls/Hollande.
Les chiffres du chômage sont encore mauvais.
Qui est surpris ?
Crédit illustration: DoZone Parody&alt;=rss

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