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Devoir de rentrée

Publié le 05 septembre 2014 par Lommedesweppes
La rentrée des classes 2014 a eu lieu cette semaine. Et de mon temps, et depuis longtemps, je ne sais cependant si c'est encore valable aujourd'hui, le premier exercice était l'incontournable rédaction intitulée "Je raconte mes vacances" ou "Je raconte un souvenir de mes vacances".
Plus simple à dire qu'à faire d'ailleurs. Que raconter de sensationnel quand on a passé tout l'été devant la télé ? Ou au centre aéré avec les copains, qui de ce fait savent déjà tout ? Ou, si l'on a eu la chance de partir, pourquoi dévoiler de tendres moments d'intimité familiale, exposer sur la place publique ce que l'on souhaiterait garder au plus profond de son coeur ? Ou alors pourquoi prêter au ridicule en racontant un fait, un endroit ou un événement trop fantastique aux yeux des uns pour être vrai, ou trop beau qui ne suscitât de jalousies.
Le maître du roman français, Gustave Flaubert, avait été confronté aux mêmes affres lors du retour d'un voyage qu'il fit dans les Pyrénées dans son adolescence. Voici comment il s'en tira au début de son texte :
" Il y a des gens qui la veille de leur départ ont tout préparé dans leur poche : encrier rempli, érudition placardée, émotions indiquées d'avance... Il en est d'autres, au contraire, qui se refusent à tout ce qui leur vient du dehors, se rembrunissent, tirent la visière de leur casquette et de leur esprit pour ne rien voir. Je crois qu'il est difficile de garder, ici comme ailleurs, le juste milieu exquis préconisé par la sagesse... Je vais tâcher néanmoins d'y atteindre et de me donner de l'esprit, du bon sens et du goût ; bien plus, je n'aurai aucune prétention littéraire et je ne tâcherai pas de faire du style... Je m'abstiendrai donc de toute déclamation et je ne me permettrai que six fois par page le mot "pittoresque" et une douzaine de fois celui "d'admirable". Les voyageurs disent le premier à tous les tas de cailloux et le second à toutes les bornes, il me sera bien permis de le stéréotyper à toutes mes phrases, qui, pour vous rassurer, sont d'ailleurs fort longues...
Je veux tout bonnement, avec ma plume, jeter sur le papier un peu de la poussière de mes habits ; je veux que mes phrases sentent le cuir de mes souliers de voyage et qu'elles n'aient ni dessus de pieds, ni bretelles, ni pommade qui ruisselle en grasses périodes, ni cosmétique qui les tienne raides en expressions ardues, mais que tout soit simple, franc et bon, libre et dégagé comme la tournure des femmes d'ici, avec les poings sur les hanches et l'oeil gaillard, le nez fin s'il est possible et avant tout point de corset, mais que la taille soit bien faite. Cet engagement pris, me voilà lié moi-même et je suis forcé d'avoir le style d'un honnête homme."
Que ces quelques phrases puissent éclairer le coeur et l'esprit de celles et ceux qui vont devoir se plier à l'exercice, et qu'elles viennent en aide à celles et ceux en mal d'inspiration !
Bon week-end
 
Devoir de rentrée

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