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Faut-il encore enlever l'utérus?

Publié le 11 septembre 2014 par Podcastjournal @Podcast_Journal
L’avènement de nouveaux traitements médicamenteux, le développement de techniques chirurgicales mini-invasives ou de radiologie interventionnelle permettent d'en diminuer la fréquence.

En dehors du cancer, l'hystérectomie se discute dans trois situations: les saignements utérins anormaux (ils sont dus aux variations hormonales, fibromes, polypes, infections du col de l’utérus, ...); les douleurs pelviennes (leurs causes sont nombreuses: endométriose, fibromes, adhérences, infections, ...); les descentes d'organes ou prolapsus (où l’utérus mais aussi la vessie et/ou le rectum descend dans le vagin parce que les tissus qui le suspendent ou le soutiennent deviennent faibles). Le prolapsus peut entraîner une sensation de lourdeur dans le vagin, une difficulté à retenir ses urines, des difficultés à aller à la selle, gêner les relations sexuelles. Bien que parfois très inconfortable, le prolapsus ne présente pas un risque vital.

On peut envisager diverses techniques visant à réaliser une ablation de l'endomètre ou à le détruire, si les traitements médicaux (voir ci-dessous) ne donnent pas satisfaction.
La résection par hystéroscopie opératoire est la technique de référence. Une caméra est introduite dans l'utérus par les voies naturelles (hystéroscopie). Sous contrôle de la vue, l'endomètre est réséqué, c'est l'endomètrectomie.
Lors de la thermocoagulation un petit ballonnet est introduit dans l'utérus. Il est rempli de sérum qui va être progressivement chauffé. La chaleur diffuse au travers du film plastique et détruit l'endomètre.
D'autres techniques (ultrasons, radiofréquence) sont en cours d'évaluation. Ces interventions, quasiment indolores, se réalisent en ambulatoire.

L’endomètrectomie génère 90% de satisfaction.
L’adénomyose est une pathologie plus difficile à prendre en charge mais l’endomètrectomie diminue tout de même les douleurs de 68% et les saignements de 50%.

Le traitement cœlioscopique de l’adénomyose peut constituer une alternative de choix car il diminue les douleurs et les saignements de 82% mais il s'agit d'une opération très délicate.
Une embolisation de l’artère utérine peut aussi être proposée, on obtient une amélioration de la symptomatologie permettant d’éviter une hystérectomie dans 97% des cas. Les symptômes varient selon la taille, l'emplacement et le nombre de fibromes. L'absence de recours à l'hystérectomie est la règle dans la majorité de cas.

Les traitements médicamenteux peuvent être utiles dans la prise en charge des fibromes, des ménométrorragies fonctionnelles, de l’adénomyose et de l'endométriose.

Stérilet au levonorgestrel -L’administration d'hormone à base de progestérone (et +/- d'œstrogènes) par voie orale ou par l'intermédiaire d'un stérilet (DIU au levonorgestrel) permet le contrôle du flux menstruel mais ne diminue pas le volume des myomes.
Le traitement induisant une ménopause artificielle (injection d’analogues de la GN-Rh) diminue le volume du fibrome mais celui-ci ré-augmente lorsqu'on l'arrête. Il ne convient donc qu'aux femmes approchant de la ménopause ou en attente d'une chirurgie.
Les modulateurs sélectifs du récepteur de la progestérone (SPRM) constituent une nouvelle famille de médicaments présentant des propriétés identiques ou opposées à celle de la progestérone. Dans cette famille, l'acétate d’ulipristal a un avenir prometteur dans le traitement des fibromes avec un taux élevé d’absence de règles et une assez bonne efficacité sur la réduction prolongée du volume.
Un certain nombre de traitements potentiels du fibrome sont en cours d'évaluation.

En cas d'échec, on aura recours à l’embolisation sélective qui obstrue les vaisseaux sanguins irriguant le fibrome; à la chirurgie, résection sous hystéroscopie pour les myomes situés à l'intérieur de la cavité ou ablation du fibrome (myomectomie) par cœlioscopie pour les fibromes situés dans l'épaisseur de la paroi; aux ultrasons focalisés sous IRM et la cryochirurgie sont de nouvelles techniques très prometteuses en cours d'évaluation. Les causes sont nombreuses et doivent être soigneusement recherchées pour proposer un traitement adapté.
Deux d'entre elles ne sont pas toujours facilement diagnostiquées: le syndrome de congestion pelvienne et l'endométriose qui peut être améliorée par une pilule en continu ou un stérilet libérant des hormones. Lorsque cela ne suffit pas, on peut induire une ménopause artificielle pour un temps plus ou moins long. On y ajoute souvent une petite dose d’œstrogène pour pallier les effets secondaires (bouffées de chaleur, sécheresse de la peau ou du vagin…).
Enfin, le traitement peut être chirurgical. Cela sera décidé en concertation avec l’équipe médicale, au regard de ce que vit la patiente au quotidien, de ses antécédents et au vu de son désir de grossesse. La rééducation périnéale- qu'il faut commencer dès les premiers signes - est utile en cas de problème urinaire mais son efficacité sur le prolapsus lui-même reste douteuse.

Le traitement chirurgical a pour but de remplacer les moyens de suspension ou de soutien devenus défaillants. Il fait appel le plus souvent à des "prothèses" synthétiques qui ressemblent à un filet.

La place de l’hystérectomie demeure très controversée et le fait d'y avoir recours semble augmenter les complications. La vaste majorité des chirurgies permet de garder une fonction sexuelle normale.

A l’exception du contexte des cancers où les indications d’hystérectomie sont incontournables, de nombreuses alternatives conservatrices sont actuellement à notre disposition. Elles permettent souvent d’éviter l’hystérectomie ou de temporiser le temps de l’obtention d’une grossesse ou de l’apparition de la ménopause.


Dr Anne-Sophie Azuar
Gynécologue-Obstétricienne
Cannes

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