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La stratégie des géants du numérique reposerait-elle sur l’absorption de masse ?

Publié le 19 septembre 2014 par Pnordey @latelier

Depuis la fin des années 90, la Silicon Valley affiche ses ambitions d’accaparer les business liés au numérique en effectuant des rachats d’entreprises pour des sommes de plus en plus astronomiques. De quoi remettre à jour les enjeux stratégiques du numérique.

Instagram, Whatsapp, Oculus Rift, Titan Aerospace … Autant d’entreprises (principalement encore au stade de start-up) ayant été rachetées pour des sommes astronomiques par les géants du web, notamment par la GAFAM, acronyme pour Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft. Whatsapp, start-up offrant un service de messagerie qui comporte 470 millions d’utilisateurs actifs dans le monde, a été acquise par Facebook pour 19 milliards de dollars en février 2014. A titre de comparaison, Facebook avait acheté Instagram pour 1 milliard de dollars en 2012 et Youtube était passé sous le giron de Google pour 1,6 milliards en 2006. La réactivité étant une des qualités essentielles pour prospérer dans l’économie du numérique, ces géants de l’Internet n’hésitent donc pas à racheter des entreprises disruptives à tour de bras, en misant sur des perspectives de croissance phénoménale dûes à des communautés d’utilisateurs gigantesques et fidèles. Selon un rapport publié par l’IFRI, les géants absorbent donc toutes les entreprises qui pourraient créer une rupture et sont alors prêts à s’éloigner de leur coeur de métier originel pour rester compétitifs et innovants.

Une double stratégie d’acquisitions

Selon le rapport, cette stratégie d’absorption repose sur deux piliers, dans le but de maitriser toute la chaine de valeur et de ne pas se laisser dépasser par la concurrence. Le premier est une intégration horizontale : les entreprises américaines font l’acquisition de start-up (souvent avec des business encore embryonnaires) qui les éloignent petit à petit de leur coeur de métier. En investissant 192 millions de dollars dans la société de VTC Uber, Google ambitionne de trouver un débouché pour sa Google Car, et structure donc un écosystème pour leurs services. Aussi, ces géants procèdent à une intégration verticale pour maitriser la totalité de la chaîne de valeur. A titre d’exemple, Titan Aerospace, entreprise fondée en 2012 et spécialisée dans la conception de drones solaires, a été acquise par Google en avril 2014, alors que les rumeurs prédisaient un rachat par Facebook. Originellement moteur de recherche, Google s’est donc offert cette entreprise du domaine aéronautique pour étendre son champ de puissance mais surtout pour maîtriser davantage l’Internet dans le monde et d’améliorer le domaine de la cartographie. Ces drones vont en effet permettre d’amener l’Internet, sans fil, dans les zones les plus reculées car les drones peuvent se maintenir pendant 5 ans à 20 km d’altitude.

Une nouvelle guerre du numérique ?

Et si les géants du web acquièrent à tour de bras des entreprises (pour la plupart sans business model établi) pour des sommes astronomiques (Google et Facebook ont cumulé 33 milliards d’acquisitions et d’investissements sur la période 2012-2013), les enjeux qui émanent de ces stratégies ne sont pas sans conséquences pour l'économie et la géopolitique mondiale. Déjà, certains soulignent la formation d’une nouvelle bulle spéculative technologique, qui serait bien plus importantes dans les sommes mises en jeu que celle des années 2000, connue sous le nom de "bulle internet". Le numérique est donc un des enjeux économiques et stratégiques les plus brulant du 21ème siècle et certains états peinent à relever ses défis, tant la domination américaine est écrasante. En effet, l’étude de l’IFRI rappelle que les géants du web deviennent les relais du soft power américain grâce à une relation privilégiée avec les internautes avec la conception de services spécialement conçus pour avoir un taux de rétention record et une image de marque appréciée, se voulant universelle. Et c’est un argument de poids face à l’Europe, qui peine à réguler cette insertion permanente, même si c’est un des marchés privilégiés par ces entreprises américaines. En effet, face à ce relais de puissance, certaines zones ont néanmoins su se créer des écosystèmes plutôt autonomes, d’où sont nés des rivaux de taille : le géant du commerce chinois Alibaba, ou encore le moteur de recherche russe Yandex. En définitive, le numérique, qui s’insère dans toutes les couches de la société, soulève des enjeux stratégiques, qui, tellement important aux yeux des états et des entreprises, conduisent à la volonté de vouloir directement maitriser le "backbone", colonne vertébrale de l’Internet.

 

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