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On y était : Pierre Lapointe à La Cigale

Publié le 20 octobre 2014 par Swann

Il y a des moments dans chaque vie où tu a l’impression d’effleurer le Bonheur, le vrai, cette chose immatérielle qu’on désire tous, chacun, pouvoir glisser dans sa poche et garder pour soi égoïstement. Il y en a d’autres où tu as le sentiment de l’avoir possédé pendant quelques secondes, une minute, ou 1h30. Quatre-vingt dix minutes c’est la durée du concert extatique Paris Tristesse du Québécois Pierre Lapointe à la Cigale hier soir.

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Tout était réuni pour que ça nous plaise. Un mec tout seul avec son piano à queue, québécois de surcroît, interprétant pour la première fois le contenu de son album triste et déprimant « Paris Tristesse » (dans les bacs le 17 novembre) mêlé à son sublissississime album « Seul au Piano ». Mais au moins on est averti, dès le début du concert : non « ça ne va pas être gai« , on n’est pas là pour se fendre la poire, mais plus pour pleurer sur l’épaule de notre voisin. Heureusement, « l’avantage c’est que c’est des chansons tristes, mais courtes« , nous voilà prévenus, car lorsque retentissent les premières notes du « [Le] Lion imberbe », on a déjà les larmes aux yeux.

Ce boute-en-train qui débite ses histoires et anecdotes entre deux chansons, ce « chanteur populaire cute comme moi » c’est l’incroyable Pierre Lapointe, cet espèce de génie des mots et mélodies, le digne descendant des Brel, Barbara, Brassens, Aznavour, Ferré, sans oublier Félix Leclerc qu’il vénère. Ces grandes dames et grands messieurs qu’il écoutait non-stop étant petit. Mais bon, « c’est bien qu’ils meurent un jour sinon on n’aurait aucune place« . On se croirait presque à un one man show tellement on ne peut s’empêcher de rire en l’écoutant nous parler de tout, de Monia Chokri et son manteau horrible, d’Elisapie Isaac du Grand Nord et des Inuks, du Plateau Mont-Royal complètement démodé et du Mile-End trop cool parce qu’il y a absolument toutes les populations, de son ami Camille fou amoureux d’un mec qui en a juste profité… On en vient presque à penser qu’il vient nous couper exprès entre chaque titre, nous faire rire pour ne pas nous laisser sombrer dans le chagrin qui s’empare de notre âme lorsqu’on écoute ses récits et bouts de vie brillamment mis en musique. Mais attention, ça ne le concerne pas, même si on aimerait penser que tous ces ex dont il parle sont les sien(ne)s. Si les textes sont travaillés et poétiques, musicalement c’est franchement pas joyeux, si mélancolique, mais tellement beau, d’une élégance rare.

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Que dire d’autre sans paraître complètement endoctrinée ? Paris Tristesse ce n’est pas que du Pierre Lapointe. C’est aussi « La maison où j’ai grandi » de Françoise Hardy, « Comme ils disent » d’Aznavour, « C’est extra » de Léo Ferré ou encore « Mal de vivre » de Barbara, splendidement repris. Mais comme il ne veut pas nous laisser partir avec les chansons des autres en tête (après deux standing ovations), Pierre Lapointe reprend place une dernière fois derrière son piano pour « Deux par deux rassemblés », un de ses hits (parce que oui, il a des hits au Québec, « vous pouvez aller vérifier sur Google là ») qu’il a tant joué, un peu offensé de ne pas pouvoir interpréter autre chose au fil des années. Et pour cette « réhabilitation », le voilà en train de nous mimer les paroles des couplets avant de faire chanter en chœur le public chaleureux venu en masse applaudir et adorer cet artiste céleste et précieux. Un grand monsieur.

Oui, je déteste la vie sans Pierre Lapointe.

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