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White God, grand prix 2014 du Certain Regard – notre avis

Publié le 28 novembre 2014 par Tempscritiques @tournezcoupez

Six ans après l’âpre Delta, et quatre ans après Tender Son, le cinéaste hongrois Kornél Mundruczó sort, ce 3 décembre, White God, un bien étrange mélange de genres, qui finalement fascine. Souvenirs de Cannes 2014…

White God Kornel Mundruczo Dogs

La scène d’ouverture de White God

La Croisette, Kornél Mundruczó la connaît bien. Depuis Johanna, en 2005, le cinéaste hongrois est passé par Cannes avec chacune de ses nouvelles réalisations. Pourtant, malgré ces sélections qui pourraient enorgueillir et le talent évident du cinéaste, Mundruczó peine à sortir de l’ombre. Et pour cause, ses films connaissent une sortie très étouffée, et ne peuvent pas se vanter d’être de francs succès commerciaux. Cela pourrait bien changer avec ce nouveau film, White God, encensé en mai dernier par la presse, et couronné du grand prix au Certain Regard. Si elle reste avant tout une œuvre indépendante et conçue avec un petit budget, White God pourrait toutefois bien être la plus fédératrice du cinéaste hongrois.

L'actrice principale (Zsófia Psotta), un des deux chiens ayant tourné White God (justement récompensé de la Palm Dog), et le réalisateur, Kornél Mundruczo.

L’actrice principale (Zsófia Psotta), un des deux chiens ayant tourné White God (justement récompensé de la Palm Dog), et le réalisateur, Kornél Mundruczo.

La clé de réussite du film pourrait être cet étrange mélange de genre distillé tout le long, de la scène d’ouverture (absolument vertigineuse) à la dernière image. Difficile de ranger ce long-métrage, et de le cantonner à un genre précis. White God relève à la fois du drame, du thriller et de la science-fiction, et Kornél Mundruczó s’amuse, dans son écriture et sa mise en scène, à jongler avec les codes de ces genres, les coudre les uns aux autres, les déformer, les remodeler. Certains osent même déjà comparer le film aux Oiseaux d’Alfred Hitchcock, tant le réalisateur a mis l’accent sur l’instauration du mystère dans sa mise en scène spectaculaire. Les cadrages (contre-plongées), les lumières, la composition et la technique photographique de certaines scènes (notamment les scènes de meutes), combinés à une bande sonore intelligemment pensée et diablement efficace (saisissant contrastes entre silences, aboiements assourdissants, et musique extra-diégétique) confirment le talent de mise en scène de Kornél Mundruczó. Finalement, le charme de cette réalisation minutieuse et précisément orchestrée, fascine.

Dans les grosses lignes, l’intrigue de White God, qui expose l’amour entre une enfant et son chien laissé à l’abandon par le père, pourrait en revanche rebuter et apparaître comme bien trop ordinaire voire naïve ou bon-enfant. Pourtant, cette « saugrenue » histoire virant peu à peu à la vengeance animale et sonnant comme un écho à la Planète des Singes, évite le grotesque pour prendre plutôt les traits d’une fable, qui contrairement à ce qui pourrait se laisser penser, n’est pas vraiment destinée à un public d’enfants. La cruauté et la stupidité humaine (émanant surtout d’un monde d’adultes) ainsi que la rébellion animale imaginée par Kornél Mundruczó glace par la froideur de sa violence, et finit par immiscer de force, lorsque s’évapore la dernière image, quelques interrogations sur le rapport de force entre l’Homme et la nature. Cette tournure métaphorique nettement assumée par le film, sonnant comme mystérieuse et étrange, force à l’admiration.

Bien que restant une oeuvre indépendante, White God pourrait bien séduire un public plus hétéroclite que les précédents films du cinéaste, et sortir un peu plus son auteur de l’ombre dans laquelle il stagne encore. Kornél Mundruczó pourrait enfin devenir aux yeux des cinéphiles « un cinéaste à suivre de près ».

White God Poster


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