Magazine Cyclisme

J’en ai ma claque du Taklamakan !

Publié le 06 juillet 2009 par Sylvie_bigant

Aksu - Korla … 31/07 – 07/08

 

Le matin de notre départ, un drôle de manège nous intrigue : des étrangers vont et viennent entre l’hôtel et l’arrière du bâtiment. Bizarre, ce sont les premiers qu’on croise ici. On va jeter un œil, un bus avec une énorme remorque percée de plein de petites fenêtres est garé derrière l’hôtel ! ‘Rotel Tours – Das Rollende Hotel’ et le bus est immatriculé en Allemagne. Incroyable ! Nous commençons par un détour de 10 km dans Aksu. Ben aurait mieux fait d’écouter son intuition, les indications qu’on nous a donné nous envoient à l’ouest alors qu’il suffisait de descendre l’artère principale. Sylvie se sent fatiguée malgré les deux jours de repos et un peu démotivée. Le vent souffle de face la plupart du temps donc même si on fait des bonnes distances, on force quand même pour avancer. Ce serait tellement agréable de se sentir poussé dans le dos ! Et pédaler tous les jours avec le même paysage n’est vraiment pas motivant. En fin de matinée, un paysage surréaliste se profile à l’horizon. Un immense lac bleu peu profond semble flotter sur le désert, comme une immense flaque d’eau posée sur du sable. La route passe au milieu et c’est comme si, soudain, nous étions transporté dans un tableau de Salvador Dali. Un peu plus loin, un pont traverse une rivière large d’une centaine de mètres. Il y a donc de l’eau dans ce désert ! Nous nous arrêtons pour déjeuner dans un petit village. Il y a un resto chinois, ça va nous changer des laghman. Quand nous poussons la porte, nous découvrons toute une foule de gens attablés. Ils fêtent l’anniversaire du propriétaire du restaurant. Gentiment, ils acceptent de nous servir et nous patientons avec une grosse part de gâteau à la crème. Le genre de crème qui n’a pas besoin de se conserver au frigo… Nous repartons immédiatement après le déjeuner, Alar n’est qu’à 130 km d’Aksu, une petite journée. L’entrée dans Alar ressemble aux autres villes chinoises : une grande avenue bordée d’arbres, avec peu de voitures, que des employés armés de longs balais nettoient en permanence. Le centre ville est généralement 3 ou 4 km au bout de l’avenue. A l’hôtel, personne ne comprend ce qu’on veut. C’est simple pourtant, si on est ici, c’est pour louer une chambre ! Finalement, ils appellent Robin, un professeur d’anglais. Tous les Chinois en contact avec des étrangers prennent un nom anglais (et inversement pour les étrangers). C’est vraiment notre chance, il est de Korla, la deuxième ville du Xinjiang mais il est ici pour une semaine pour recruter les meilleurs étudiants d’Alar et les encourager à venir étudier dans son école à Korla. Les gens des petites villes hésitent souvent à bouger, quitter leur famille, habiter dans une grande ville. Grâce à Robin, tout devient facile. On nous trouve une chambre et les vélos dorment à notre porte dans le couloir. Nous passons l’après-midi et la soirée à bavarder et manger avec Robin et Jessie, son collègue. Robin a 29 ans et est célibataire. Trouver une femme n’a pas l’air facile en Chine. A cause de la politique de l’enfant unique, il y a maintenant moins de femmes que d’hommes. En plus, les femmes cherchent la sécurité financière donc un mari avec une bonne situation. Si l’homme n’est pas assez riche, la femme ou sa famille mettent fin à la relation. Jessie est un peu plus âgé que nous, il est marié et a une petite fille d’un an. Ils nous emmènent dans leur resto favori. Alar est une petite ville de province. Il y a une université et un hôpital mais ce n’est pas Aksu ou Korla. Comme nous dit Robin : ‘On s’ennuie ici. A Korla, je passe mon temps libre dans les maisons de thé. Il y a aussi plein de restaurants et de bars.’. Nous passons la soirée à parler de notre voyage, de la Chine, du Xinjiang. Robin est très ouvert, il critique d’ailleurs beaucoup le gouvernement mais il y a quelques sujets auxquels il ne faut pas toucher. En ce qui concerne le Tibet et le Xinjiang, le gouvernement a bien fait de coloniser ces régions. Les gens avant n’étaient pas éduqués et menaient une vie misérable. Maintenant ils ont un meilleur standard de vie. Quand on lui fait remarquer qu’ils n’ont pas eu le choix et qu’ils étaient peut-être plus heureux avant, il nous rétorque que lui non plus n’a pas le choix souvent : ‘On n’a qu’un seul parti en Chine !’.

Le lendemain matin, réveil avant l’aube. Sylvie est pliée en deux, impossible de tenir debout. On a demandé les plats sans MSG hier mais le bouillon qui vient souvent avec les plats devait en contenir. Allons, ce n’est pas si désagréable de se remettre au lit quand il fait nuit noire ! Robin et Jessie nous emmènent à l’hôpital. On commence par payer 1 yuan (10 centimes d’euro !) puis on nous conduit dans une petite salle. Deux médecins sont assis face à une table et une dizaine de gens leur font face. C’est la salle de consultation… Pas d’auscultation, Robin traduit les symptômes et on nous donne une double ordonnance : un médicament ‘occidental’ et un médicament basé sur la médecine chinoise. Le gouvernement s’est rendu compte des bienfaits de la médecine traditionnelle chinoise donc les médecins prescrivent les deux. Le médicament ‘occidental’ fait effet en deux jours mais il peut avoir des effets secondaires sur la vue donc Sylvie arrête vite. La médecine chinoise prend plus de temps. Ben en profite pour remplacer la cage du roulement à billes de sa fourche avant. Dans cette petite ville, ils ont la bonne taille ! Nous donnons rendez-vous à Robin et Jessie dans une semaine à Korla.

Sur notre carte, la route est censée partir au nord mais dans la réalité, elle se termine en queue de poisson à la sortie de la ville. Nous interrogeons deux joggeurs qui nous envoient à l’opposé. Bon, notre carte doit dater… Plutôt que de rejoindre immédiatement la grande route, nous préférons longer un canal d’irrigation sur 50 km. Nous arrivons au Camp 14, un ancien camp de colons chinois qui a évolué en village. On trouve ces anciens camps un peu partout au Xinjiang, résultat de la sinisation du Xinjiang. Nous refaisons un plein d’eau et partons à la recherche de la Trans-Désert Aksu-Hotan (ou Kucha-Hotan). On nous dit : ‘Passez le pont et c’est dans 2 km’. 3… 4… 5 km, elle est où cette route enfin ? Les km s’additionnent et nous sommes toujours sur une petite route de campagne sans circulation en plein milieu du désert. 8 km plus loin nous arrivons enfin sur la grande route. Elle a été construite il y a quelques années et est flambant neuve. Le péage est en construction et, malheureusement pour nous, les stations services et restaurants aussi. Nous transportons 5L d’eau chacun, pas de quoi s’inquiéter donc nous profitons du peu de circulation et du paysage qui ressemble un peu plus à un désert. En fait, pour voir des dunes de sable et un paysage qui ressemble un tout petit peu au Sahara, il faut s’enfoncer sur une centaine de km dans le Taklamakan. Voilà pourquoi le paysage est si ennuyeux sur la grande route. Le Taklamakan fait partie du bassin du Tarim qui était une grande mer il y a plusieurs milliers d’années. C’est ce qui explique que la terre soit aussi fertile ici et le nombre de plantations qu’on passe sur la route. Les fruits sont énormes ici, de grosses pêches, des melons et des pastèques énormes (nos vélos s’en souviennent !). 60 km plus loin, nous tombons sur un village ouighour et… un resto ! Bizarrement et c’est très agréable, les gens ne s’attroupent pas autour de nous. Les enfants s’asseyent calmement sur le bord d’un topchan et ‘dévisagent’ nos vélos pendant que les hommes s’expliquent les uns les autres comment ces drôles de machines se conduisent. C’est toujours très drôle de les voir debout sur un pied, l’autre jambe tendue devant eux en essayant d’imaginer la sensation ! Nous apprécions doublement notre laghman. Nous avons fait 115 km avant 13h et les gens sont sympas. Nous repartons pour les ‘derniers’ 70 km. Encore une fois, nous sautons la pause sieste. La chaleur est relativement supportable (35 ou 40C au soleil ?) et nous étalons une bonne couche de crème solaire sous les yeux ébahis des locaux. Une fois qu’ils ont compris que ce n’est pas une crème blanchissante (le must ici), l’un d’eux fait signe à Ben : ‘Pourquoi tu ne mets pas une chemise manches longues ?’. Ben secoue son t-shirt, ‘il fait trop chaud !’. On a bien fait de s’arrêter, il n’y a plus rien jusqu’à Shaya, seulement quelques petits villages et des cultures. L’entrée dans Shaya se fait sur une longue avenue de 5 km. Les villes ne sont pas forcément très grandes mais notre entrée ressemble toujours à une parade sur les Champs Elysées. Beaucoup de villes sont récentes et la place ne manque pas donc les ingénieurs en profitent : les voitures roulent sur une 2x2 voies et, de chaque côté, cyclistes, charrettes et scooters empruntent une voie qui ferait pâlir une piste cyclable suisse. Et ensuite, il y a encore un large trottoir pour les piétons ! Au rond-point, on hésite et Sylvie suggère : ‘c’est peut-être en face ?’. Bam ! Ben fonce dans un barrage de militaires avec matraques ! En fait, il fallait prendre la première à droite. Nous nous dépêtrons des militaires pour tomber sur des policiers qui ont l’air bien embarrassé avec deux cyclistes étrangers sur les bras. Ils tournent nos passeports dans tous les sens, on leur explique le visa puis ils appellent quelqu’un. Nous attendons tout en jetant un petit coup d’œil inquiet à la dizaine de militaires en treillis sagement alignés derrière leurs boucliers transparents. Pourvu qu’il n’y ait pas eu ‘du nouveau’. Un gradé arrive en voiture, nous donne deux bouteilles d’eau, passe un coup de fil puis : ‘Suivez-moi !’. Toujours rien en anglais, on se dit qu’un interprète va bien finir par apparaître. A la station de police, deux autres policiers montent, un homme et une femme. Certains sont Ouighours, d’autres, Hans. On leur dit : ‘Binguan’, hôtel, et tout le monde repart. Evidemment, notre cortège insolite attire l’attention : deux étrangers à vélo couché derrière une voiture de police dans une ville à l’écart de la route touristique… Les filles pouffent derrière leur main, les motos roulent à côté de nous, les enfants nous pointent du doigt à leurs parents. Nous nous arrêtons devant le Shaya hôtel, un bâtiment rutilant, tellement étincelant qu’on se demande si on va pouvoir payer. Une femme arrive quelques instants plus tard. Elle travaille pour le bureau du tourisme de la ville et s’excuse de ne pas mieux parler anglais. Elle a appris il y a vingt ans et a rarement l’occasion de pratiquer. Elle nous dit que nous sommes les premiers étrangers qu’elle voit passer à Shaya ! La chambre est au prix habituel (100 yuans ou 10 euros) et nous recevons un traitement de faveur. Le directeur débarque, nous salue, son second nous accompagne à notre chambre et revient un peu plus tard avec des fruits ! Il y a quelques avantages à voyager ‘hors des sentiers battus’… Nous dînons avec notre interprète. C’est un dimanche soir mais elle a quand même laissé son mari et son fils pour venir nous aider.

Le lendemain matin, après un fantastique buffet, salades et pains chauds apportés en personne par le chef, nous posons pour quelques photos avec le directeur devant l’hôtel. C’est dur la vie de VIP… Nous sommes un peu déçus, la dame qui parlait anglais n’est pas venue comme elle avait promis. Elle a dû avoir un empêchement car hier elle semblait toute contente de parler avec des étrangers. Il fait beaucoup plus chaud qu’hier mais Kucha, notre prochain arrêt, n’est qu’à 65 km et demain, c’est jour de repos (comment ça, déjà ?). La route traverse de nombreux champs cultivés et nous trouvons de l’ombre sous les arbres pour nous étirer. Le jour se lève à 7h30 et se couche à 22h donc nous faisons de longues journées. Comme en plus le paysage manque cruellement d’intérêt, autant faire de la distance et plus de jour de repos. Mais nos tendons en prennent un coup. Quand nous pédalons 187 km comme hier, nous restons sur le vélo plus de 9h. La journée Bachu-Aksu s’est faite avec le vent de face, seulement 140 km (plus les 100 km en camion) mais là aussi on a pédalé pendant 9h. Nous avons traversé le Khirghistan avec des dénivelés de 2 à 3000 m sans se faire mal et on a mal aux genoux sur le plat, c’est rageant ! A Kucha, nous passons deux heures à chercher un hôtel qui accepte les étrangers. Incroyable, cette ville est sur la route touristique puis qu’elle est dans le guide et les hôtels 3 étoiles nous jettent comme des malpropres. Nous savons que certains hôtels ne sont pas habilités à recevoir les étrangers mais quand c’est écrit ‘Hôtel’ et ‘Réception’ en anglais, c’est risible. On aimerait voir ce qui se passerait en France si les Chinois se faisaient jeter d’un hôtel pour la simple raison qu’ils sont Chinois ! Nous finissons par en trouver deux à la sortie de la ville, un magnifique pour 20 euros et un autre, plus dans nos moyens, pour 12 euros. Si on visite le Xinjiang sur un budget ‘normal’, on peut loger dans des 5 étoiles pour 20 à 30 euros. On passe l’après-midi et le lendemain au frais, on sort juste pour déjeuner et manger des glaces ! La moquette est dans un état désastreux donc on appelle une des femmes et on lui fait signe ‘aspirateur’. Elle revient deux minutes après avec… un balai ! Les saletés sautent de tous les côtés sauf dans sa pelle évidemment…

Le jour de notre départ, nous croisons un linguiste. Il étudie probablement le ouighour car il nous dit qu’il ne peut pas travailler pour le moment, ses ‘informateurs’ ont été déportés. A la sortie de Kucha, nous retrouvons la grosse route. Comme on a bien fait de prendre ces détours ! Des camions nous dépassent en klaxonnant, quasiment toutes les cinq minutes. Quand c’est de notre côté, le souffle nous pousse mais quand ils sont en face, on se prend une grande claque et le vélo ralentit. Aujourd’hui, c’est au tour de Ben de déprimer : ‘J’en ai marre, tous les cyclistes nous ont dit que le vent soufflait d’est en ouest, pourquoi on l’a toujours de face nous ?’. Sylvie s’attendait à ce que la route soit sans intérêt donc, même si elle n’est pas très motivée pour pédaler, elle pousse sur les pédales en comptant les jours jusqu’à Turfan. Par contre Ben s’attendait à être poussé dans le dos de Kashgar à Turfan donc forcément, il est très déçu. Aujourd’hui, pour la première fois depuis Kashgar, il pleut ! Malgré le vent de face, nous pédalons plus vite que les nuages mais ils nous rattrapent à chaque fois qu’on fait une pause. On ne se plaint pas, une petite averse de temps en temps, ça rafraîchit. A part les pauses, la journée consiste à pédaler en se bouchant les oreilles pour échapper aux coups de klaxons et en se concentrant sur la douche et la chambre climatisée du soir. Il y a mieux comme journées. La circulation nous stresse, les Chinois conduisent vraiment comme des dératés. Les pires sont ceux qui doublent en face. Comme s’ils ne pouvaient pas attendre ! Mais non, ils foncent, doublent le camion, parfois c’est un camion qui en double un autre, comme si nous n’étions pas là. On se pousse comme on peut. Le bas-côté est goudronné mais de la largeur d’une piste cyclable européenne et souvent, il y a un talus. Ajoutez à ça les coups de klaxons qui sonnent comme des coups de trompettes… au bout du dixième, on a envie de sauter dans le camion et arracher le klaxon. Bien sûr, c’est pour nous saluer (quand ça vient d’en face) ou nous avertir (quand ça vient de derrière) mais ça nous met sur les nerfs. Il y aussi les chauffeurs curieux qui roulent à côté de nous. Quand un camion arrive à pleine vitesse derrière une voiture qui fait du 18 km/h, que fait-il ? Il klaxonne. Et comme il a klaxonné, il se sent en droit de ne pas ralentir... On arrive donc assez démoralisés et fatigués à Luntai, surnommée la ville du pneu. On entend beaucoup parler des pneus en ce moment. Les Etats-Unis veulent réduire leurs importations de pneus pour éviter de perdre trop d’emplois et les Chinois, bien sûr, crient au scandale. Il y aurait une théorie, d’après les médias chinois (on n’a pas les échos américains bien sûr) comme quoi les pneus faits aux Etats-Unis sont pour les voitures neuves tandis que ceux fabriqués en Chine sont pour les voitures d’occasion. En attendant, ‘Luntai est une ville moche’ comme décrète Sylvie. La route est bordée de petites échoppes sales qui vendent des pneus et tout est noir, la route, les bas-côtés, les gens… C’est peut-être ce qui nous pousse à prendre un bel hôtel, toujours dans nos moyens. Les rues qui partent de la route principale et s’enfoncent dans la ville sont plus agréables, pas de pneus ici ! Le soir, la météo annonce deux typhons pour Taiwan et l’est de la Chine et de la pluie pour le Xinjiang…

Nous nous réveillons avant l’aube, comme d’habitude et Ben s’écrie : ‘Regarde, le ciel est vraiment couvert, je ne suis pas sûr que ce soit une bonne idée de partir’. ‘Ah bon, mais je ne vois rien moi’ dit Sylvie qui scrute désespérément la nuit noire (elle n’a rien contre se recoucher). ‘Si, si, je t’assure !’. Et hop, on replonge dans le lit ! Toute la journée, le ciel est au beau fixe. ‘Tu as dit ça parce que tu voulais rester, avoue’ taquine Sylvie. Finalement cette énième journée inattendue de repos se révèle très productive. Nous en avons assez du vélo en Chine, les paysages sont ennuyeux et on est obligé de dormir dans des hôtels au lieu de rencontrer des gens ‘pour notre sécurité’. Sans compter les policiers qui nous arrêtent dès qu’on prend des chemins inattendus. En même temps, nous avons été très chanceux, personne ne nous a forcés à monter dans un bus ou un camion pour la plus proche grande ville comme c’est arrivé à certains cyclistes. Bref, on pédalera jusqu’à Turfan (Tulufan comme ils disent ici) et ensuite nous prendrons un train pour la côte. Une petite phrase innocemment lancée par Sylvie complique l’itinéraire réglé comme une horloge de Ben : ‘Dis, tu n’as jamais rêvé d’aller au Japon ? Moi j’en rêêêve depuis des années… depuis Shanghai, on n’en est pas si loin, dis ?’. ‘Euh… oui, oui, mais il faut regarder les prix des billets d’avion, et puis c’est cher le Japon il parait, et tu as vu tous ces typhons en ce moment ?’. Et puis il y a une difficulté de taille, notre principale source d’information est en panne, pas d’internet ! C’est là que nous réalisons comme c’est pratique : ‘Mais comment on faisait avant ?’. En plus, nous avons une version digitale du guide de la Chine et nous n’avons que la partie sur le Xinjiang. Le CITS de Kashgar nous donne le téléphone de Shanghai et là, autre surprise, personne ne parle anglais au bureau du tourisme de Shanghai ! Tout ce que la fille peut dire c’est : ‘Guide, tour ?’. Ok, on a compris. Finalement, c’est la fille de Kashgar, une Ouighour qui parle couramment anglais qui appelle et nous retransmet l’information, un comble ! Les billets d’avion sont relativement bon marché avec Air China (180 euros) mais ils ne prennent pas les vélos. C’est encore le ferry qui est le moins cher, 160 euros par personne, vélo compris. Bon c’est un siège et la traversée dure 48 heures… Reste à savoir combien coûtent les vols sur l’Amérique du Sud et si c’est la bonne période pour pédaler au Japon. Il nous faudra donc un arrêt intermédiaire, à Xi’an, pour planifier. Si nous passons par le Japon, nous partirons de Shanghai mais si nous allons directement en Amérique du Sud, les vols sont moins chers de Hong-Kong. On remercie encore une fois le gouvernement d’avoir coupé toutes les communications, grrrrr. Enfin, probablement pas autant que tous les gens qui ont perdu leur travail à cause de l’internet.

Le lendemain, nous pédalons sous un ciel sans nuage et avec… le vent de face. En sortant nos vélos, Ben remarque que son pneu est légèrement dégonflé, bizarre mais c’est réglé d’un coup de pompe. 10 km plus loin : ‘Tu peux jeter un œil ?’. Le pneu est à plat, une agrafe probablement attrapée dans la salle de l’hôtel, le sol était dégoûtant. Ça tombe bien, c’est une petite journée, ‘que’ 180 km jusqu’à Korla ! Ben peste mais il fait du super travail, un quart d’heure plus tard, on peut repartir. On ne peut pas se plaindre, c’est seulement notre deuxième crevaison en 16 mois ! Le paysage est toujours aussi ennuyeux donc nous ne nous arrêtons pas pour le déjeuner, nous grignotons quelques brioches lors d’une pause dans une station service. On a découvert le ‘French soft bread’, des petits pains qui s’approchent des brioches, tous individuellement emballés. Avec les mini bouteilles d’eau, c’est encore quelque chose qui nous exaspère en Chine. Ils ont la manie de tout emballer et même suremballer. Les biscuits et brioches sont emballés individuellement, mis dans une barquette en plastique et emballés dans un paquet. A la caisse, on doit se battre pour refuser les sacs plastiques. Le gouvernement a parait-il passé une loi et dans certains supermarchés des grandes villes, les sacs sont payants. Une réussite si on considère qu’en Angleterre, ils en sont toujours à débattre du sujet. En une journée, nous remplissons les deux petites poubelles de notre chambre. Par comparaison, au Khirghistan, on avait de temps en temps, une boite de sardines et des emballages de nouilles. Ça nous énerve mais c’est dur de limiter la pollution. Nous filtrons l’eau de temps en temps mais ça nous est arrivé d’avoir un goût détestable, pas très encourageant. Le vent de face nous ralentit bien. Il tourne souvent mais jamais de dos. Ben se met devant et Sylvie profite de l’aspiration et de la protection pour avancer. Ben a eu mal aux genoux en quittant Kashgar mais ça va mieux et c’est Sylvie qui souffre passé la barre des 120 km. Sur la fin, elle s’étire tous les 10 km. La douleur passe puis revient. En fin d’après-midi, nous apercevons, une grande ville au loin, à la bordure des montagnes. Des gratte-ciels s’élancent vers le ciel, c’est comme un mini Manhattan au milieu du désert. C’est Korla ! Et pourtant, il reste encore 35 km… Nous appelons Robin qui vient encore une fois nous aider pour la chambre. L’hôtel est superbe, seulement 10 euros mais ils sont inflexibles pour les vélos, ils doivent dormir dans la cour. On nous sort le ‘pas de problème, c’est gardé 24/24’. On nous avait aussi dit ça à Aksu où les vélos ont dormi sur le perron de l’hôtel mais quand on est parti à 7h du matin, il n’y avait pas de garde en vue. D’habitude, les gens finissent par céder et acceptent de mettre les vélos dans le hall ou dans une pièce mais ici, nous nous heurtons à un mur. Pour finir, Robin appelle Lincoln, un Canadien qui habite à Korla depuis quatre ans. Il accepte très gentiment de prendre nos vélos chez lui.


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