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Alzha…quoi ?

Par Deedoux
L'oubli, Emma Healey, Sonatine, 2014

L’oubli, Emma Healey, Sonatine, 2014

De sujet « délicat », la maladie d’Alzheimer est passé sujet dont on parle.
On dessine, on écrit sur ce qui, finalement, nous touche de plus en plus. Un ami, un parent, un collègue, de près ou de loin, la maladie s’introduit dans nos vies, insidieusement et en nous filant la flipette.
Les auteurs y trouvent même de l’inspiration!
Qu’ils soient auteurs de romans policiers ou illustrateurs de BD, il y a matière et nous, lecteurs, on en sort étonnés, émus et enrichis. Trois titres sont à tirer du lot ces derniers mois.
Commençons par un petit polar, L’oubli est un titre somme toute nettement moins original que son contenu qui vous laissera surement coi.
Maud est une vieille dame. De celle qu’on imagine touchante, un peu tassée, la blouse élimée et le cœur rempli de souvenirs d’antan. Mais voilà, cela fait quelques semaines ou peut-être quelques mois que son univers est troublé.
Sur des petits morceaux de papier, elle écrit. Son quotidien, ses impressions mais surtout son intuition sur la disparition de son amie Elizabeth. Elle n’a plus eu signe d’elle depuis un moment et s’inquiète. Elle en est persuadée, tout ça n’est pas normal. Alors elle tente d’alarmer sa propre fille, le fils d’Elizabeth mais sans succès. Les fils s’emmêlent, les repères se confondent, elle ne sait plus bien discerner le passé du présent. Arrivera-t-elle à se faire entendre ?
Un roman policier très original. En effet, sa structure nous balade entre souvenirs, flashbacks et présent en nous perdant grâce à une écriture qui joue littéralement sur la perte de repères. Emma Healey, jeune auteure, réussit ce tour de force et nous raconte l’intrigue à travers la voix de Maud.
Dès la première page, vous aurez cette étrange impression d’avoir les symptômes d’une personne atteinte de la maladie d’Alzheimer. L’oubli ponctuel puis répétitif, les informations qui se brouillent, le manque de crédibilité auprès de proches, la perte progressif de ne plus savoir quelle est notre propre identité.
Effrayant n’est-ce pas ?
En effet, le frisson risque de vous chatouiller la colonne vertébrale pour enfin vous happer dans une histoire qui imbrique deux faits marquants de la vie de Maud et qui ne sont pas sans liens… Ne lisez pas ce roman policier comme celui de l’année côté enquête ou suspens mais plutôt comme un texte novateur et audacieux pour nous lecteurs, qui nous croyions à l’abri…
Et deux BD qui traitent chacune de la maladie et ce, à leur façon.
La première est construite autour de la fiction. Une histoire de famille qui lie les générations et les sépare et entre elles, la maladie qui ne dit pas son nom et trouble les pistes.
Un jeu d’aller et venue entre le passé et le présent, les faits et les souvenirs qui nous tient en haleine et nous laisse imaginer la suite à mesure que les planches défilent sous nos yeux. Un graphisme épuré, des couleurs pastels qui nous plongent dans une atmosphère toute particulière, feutrée et étouffante.
Un livre qui m’a mise, je dois l’avouer, un  peu mal à l’aise et m’a laissée mi-figue, mi-raisin. Surement car l’histoire pourrait être directement la nôtre et que j’ai trouvé cette BD peut-être un peu brouillonne, nous baladant d’un sentiment à un autre et dans des espaces-temps bien moins maîtrisés que dans le polar.
A lire, l’avis de Calokilit, véritable coup de coeur pour le blog des deux lectrices.
Ceux qui me restent, Damien Marie et Laurent Bonneau, Bamboo, 2014

Ceux qui me restent, Damien Marie et Laurent Bonneau, Bamboo, 2014

La seconde est une BD documentaire qui retrace la maladie de la mère de l’auteure/illustratrice et nous donne du fil à retordre.
Attention, n’y voyez aucun bémol ! Au contraire, cette BD dense sous forme de journal de bord nous attire dès les premières pages et a du mal à nous faire lâcher prise. Une fois entré, c’est avec peine que vous en sortirez.
On entre dans la vie de cette famille Canadienne avec délicatesse, on y est introduit presque sans bruit. On y découvre la maman, sa vie, ses oublis de mémoire qui deviennent de plus en plus répétitifs. Puis, l’évolution de la maladie, l’adaptation de tous les membres de la famille.
Une BD qui traite avec justesse Alzheimer et met à l’honneur les aléas de la vie des aidants et des proches. Les planches soutiennent avec force et sobriété la difficulté et les dommages collatéraux d’une telle pathologie.
Ne vous arrêtez surtout pas aux petits dessins qui peuvent paraître illisibles. Il n’en est rien si tant est que vous prenez le temps de vous immerger dans l’histoire.
Un album qu’on ferme avec les larmes aux yeux et une sacrée envie de vivre.
Le grand désordre, Sarah Leavitt, Steinkis, 2014

Le grand désordre, Sarah Leavitt, Steinkis, 2014

Merci aux auteurs de se pencher sur des sujets aussi délicats, un bon moyen de prendre du recul, de nous poser quelques instants pour réfléchir au sens de notre vie et du temps qui passe.


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