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La disparition du nombril – Emilie de Turckheim

Publié le 19 décembre 2014 par Noann

« Je le regarde comme je ne l’ai jamais regardé. Il est grand. 1,91 mètres. Il me plaît. Même son air débile et déraciné me plaît. Il n’a rien à faire à Paris. Il rêve de désert et de terre rouge craquelée. Demain, il s’en va. Je ne l’enlacerai pas. Ni accolade ni baisers. Pas d’au revoir. C’est un cactus. F. et moi l’avons acheté il y a neuf mois. Nous l’avons choisi parce qu’il était conforme à l’idée que nous nous faisions d’un cactus d’appartement. Il avait tout pour me plaire… »

Son fils Marius a deux ans lorsque Émilie attend un deuxième enfant. Elle couche dans un calepin ses émois, ses joies, ses bouts de vie. On s’imagine d’emblée contraint de lire le journal d’une sempiternelle histoire de grossesse puis de couches culottes, d’une banalité affligeante. Mais l’on est happé par l’histoire d’Émilie, une jeune femme comique qui n’a pas l’intention de nous ennuyer avec ses histoires de future maman inquiète.

La disparition du nombril – Emilie de Turckheim

À travers son journal intime, Émilie dévoile tout avec une sincérité étonnante. Depuis l’annonce de son test de grossesse positif jusqu’à la métamorphose de sa silhouette, la « petite prune » comme elle dit, lui déforme le ventre jusqu’à esquiver son nombril. Toujours avec le même élan de franchise, elle nous parle de ses amours, ses désamours, surtout de son amoureux, le beau F, de ses amis, ses voyages, de ses passions. Ainsi on découvre qu’elle aime le Japon, les gâteaux aux amandes et surtout le sexe… Entre ses multiples activités – elle est auteure, visiteuse de prison, maman – Émilie a une vie exaltante qui regorge de rebondissements.

Et l’histoire débute avec le même piment que les écrits d’Émilie puisque qu’elle décide de rapatrier du balcon au salon un grand cactus. Enceinte, est-ce raisonnable ? F. prend le relais car, non, c’est interdit pour elle.
On suit avec beaucoup de plaisir les péripéties insolites d’Émilie jusqu’à même se prendre d’amitié pour elle. Et les lignes retranscrites d’un quotidien banal sonnent en écho dans le cœur de chacun de nous.
Neuf mois de bonheur mais aussi une invitation à fouiller dans le tiroir des amours qui ont traversé une vie, de celui disparu qui comptera à jamais, ceux qui se sont échappés sans laisser de trace, celui, indélébile, installé à jamais, les incertitudes, les doutes, les désarrois qui grouillent dans ce monde de désolation. L’auteur ne se borne pas à nous saper le moral mais nous divertit, nous fait passer du rire aux larmes, à travers une écriture à la fois rectiligne et élégante mais pointue et révoltée aussi.
Cocasse, émouvant aussi…

La disparition du nombril d’Emilie de Turckheim, éd. Héloïse d’Ormesson


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