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Non Jeff, t’es pas tout seul !

Publié le 02 janvier 2015 par Pantalaskas @chapeau_noir

"Jeff Koons a déjà battu Salvador Dali : en dix-sept jours seulement, sa rétrospective au Centre Pompidou a attiré 112 844 visiteurs. (...) Il pourrait bientôt détenir le record de l'exposition la plus visitée du centre, dépassant, encore, Salvador Dali (840 000 visiteurs). (...) L'exposition détient déjà le record absolu de fréquentation pour une journée avec 9143 personnes, du jamais-vu au centre. Elle devrait aussi dépasser le record pour un artiste vivant qui est détenu par Pierre Soulages avec plus de 500000 visiteurs." (source: communiqué de presse du Centre Pompidou du 17 décembre 2014).
Koons Popeye
Après la récente déferlante Koons sur New York (Cinq étages occupés au  Whitney muséum, sculpture monumentale dans le Rockfeller center notamment), une réplique a lieu à Paris actuellement avec le succès écrasant de l'exposition Jeff Koons au Centre Pompidou.
On peut se réjouir de voir le public se diriger nombreux vers des salles d'expositions.
Pour cette première page blanche de l'année, l'envie est forte cependant de penser à tous les artistes laissés pour compte face à une scène artistique tellement accaparée par quelques noms omniprésents à travers le monde.

La vie d'artiste

Pour la cinquantaine de milliers d'artistes professionnels référencés en France, quelle perspective peut s'offrir pour rendre visible leur travail ? Le temps des salons semble aujourd'hui révolu. Preuve en est la disparition du Salon de Mai qui a tiré sa révérence après une ultime séance en 2014, après soixante dix années d'existence. Ceux qui survivent peinent à conserver un statut central et permettent surtout aux artistes de se retrouver pour une soirée de vernissage.
Autre espace de création, dans le cadre « 1%» , une génération de sculpteurs a investi les cours d’écoles, les halls de lycées et c…  L'obligation de décoration des constructions publiques, plus communément dénommée « 1% artistique » est une procédure spécifique de commande d'œuvres d'art à des artistes. D'abord limité aux bâtiments du ministère de l' Education nationale lors de sa création en 1951, le dispositif a été élargi et s'impose aujourd'hui à la plupart des constructions publiques de l' Etat et à celles des collectivités territoriales, dans la limite des compétences qui leur ont été transférées par les lois de décentralisation. Au-delà de la volonté politique de départ, les œuvres se sont retrouvées à la merci de l'attention que l'on veut bien  leur porter. Ceux qui sont chargés de la pérennité des œuvres ne sont pas les même que ceux qui ont été à l'origine de leur installation. D'où la dégradation progressive des pièces non entretenues, délabrement qui servira ensuite d'argument pour leur destruction.
Si on y ajoute, comme le montre un exemple récent à Hayanges, l'ambition ubuesque d'un maire de repeindre en bleu une sculpture en bronze pour "égayer sa ville", on mesure la difficile condition de l'artiste dans l'espace public.
Cette première pensée de l'année donc pour les artistes de toutes générations qui ont fait de leur vie un projet fou, sujet à toutes les incertitudes, soumis à tous les doutes, éclairé parfois par un succès toujours remis en question. Une pensée pour ce jeune artiste mesurant sur le terrain la difficulté de tracer sa voie personnelle, blessé par un critique d'art ou par l'indifférence du même critique. Une pensée encore pour ce vieux sculpteur bien oublié alors que dans un jardin public des centaines de promeneurs voient son œuvre sans la regarder. Une pensée enfin pour cet artiste décédé dont l’œuvre ignorée même par sa famille, a terminé sa vie dans la benne d'un ferrailleur.

Koons affiche
Page blanche

A tous ces artistes, dont j'ai le privilège de connaître quelques uns, je voudrais dire que cette page blanche, celle de 2015, prendra des couleurs grâce à eux tous, qu'elle portera nos espoirs pour que les formatages ne l'emportent pas sur la conscience, que cet espace restera grâce à leur insoumission parfois douloureuse une promesse de notre propre liberté.
Jeff Koons continuera son chemin mondialisé, peut-être sous les quolibets des "Trissotins de l'art" aurait dit Jean-Robert Ipousteguy. Mais, paraphrasant ce critique anglais, force est de constater : le public aime cette exposition. Il est bien le seul ...


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