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La liberté de demain

Publié le 15 janvier 2015 par Alteroueb

Il n’y a plus de Charlie en kiosque. Qu’importe. Rien ne presse. L’important n’est pas là, sur ce seul mercredi, ou jeudi. Charlie existe même si je n’aurais peut-être jamais le numéro 1178 en main. Le papier, aussi fragile qu’une vie, est aussi incroyablement robuste et traverse les ages jusqu’à demeurer avec les pierres, le principal rapporteur de l’histoire des hommes. Certaines pages d’ailleurs sont même devenues fondatrices et objet de croyances diverses. C’est dire sa force.

Ce nouveau numéro, pas même encore sur les rotatives, a fait débat. Sa page de couverture montre le prophète. Etonnant, non ? Elle est magique : le prophète est triste. On y parle de pardon. Une valeur universelle et présente dans toutes les religions. Tel quel, avec ce message apaisant, je ne parlerais presque pas de caricature, même si Mahomet a clairement une tête de bite. Et nous voila revenir au point de départ : ça monte au créneau de partout pour fustiger le journal et crier au blasphème. En Turquie, le premier ministre turc, tout juste revenu de sa promenade parisienne pour réaffirmer la liberté d’expression, en a interdit la parution dans son pays.

censure
Donc on n’a pas avancé d’un pouce. D’autres défilants dans le cortège VIP ont d’énormes progrès à faire en matière de liberté. En Algérie, marches et manifestations publiques sont interdites. En Turquie, déjà citée, les journalistes osant parler de la corruption qui enlace le président Erdogan sont incarcérés. Idem, au hasard, en Egypte, au Gabon, en Jordanie. En Russie, cela va sans dire. Pourtant, présidents ou représentants, tous étaient là, présents en première ligne. Comme Toto 1er.

Coté religions, on a pas évolué non plus, et ce n’est pas non plus une surprise. Le cortège d’avertissements et de menaces repart de plus belle. Cette fois, le «Canard Enchainé» est également cité. L’athée que je suis ne comprend pas cette notion de blasphème. Je respecte infiniment ceux qui croient en quelque chose, qui sont sincères dans leur pratique et sans prosélytisme exacerbé, quelle que soit la confession, mais les règles auxquelles les fidèles s’astreignent ne concernent en rien les non-croyants. Impensable donc pour eux de se plier à cette discipline, impossible aussi de blasphémer ce qui n’existe pas. Elémentaire.

«Liberté de la presse ? Vaut mieux entendre ça que d’être sourd !». C’était à la une du premier Charlie en novembre 1970, une semaine juste après l’interdiction de Hara-Kiri. Les temps ont un peu changé. C’est indéniable. La pensée et l’écriture, dans notre pays laïc exempt de références religieuses, ne sont plus entravés. Il y a bien de temps en temps des tentatives. Mais le douloureux épisode Charlie Hebdo montre que la vigilance doit être continue. Il en faudrait bien peu pour que les censeurs reprennent du service. Certains pays, dont les Etats-Unis, se sont dotés de lois d’exception qui permettent à peu près tout en surfant sur la détresse. On n’en est pas loin.

Alors, merde aux censeurs, quels qu’ils soient…


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